Archive for the ‘les aventures de la préhistoire’ Category

Le retour du mardi

Thursday, November 16th, 2006

Il y a des gens insouciants, qui ne savent jamais quel jour de la semaine on est. C’était le cas des hommes des cavernes. Mais eux, ils avaient une excuse: personne n’avait jamais songé à inventer la semaine.

C’est le grand chef UhGruhhhhhhhr qui, un soir, alors qu’il était rentré bourré du Mammouths Club (un sorte de club où les chefs de tribu se réunissaient pour picoler) se dit que ce serait vachement cool de vendre des calendriers pour financer les fins d’hiver difficiles. Mais pour ce faire, il fallait inventer un système de comptage du temps qui tenait un peu la route.

Il décida que les semaines auraient six jours, un par doigt de la main (à l’époque, les cavernes étaient petites, les hivers longs et ennuyeux, la contraception moyennement efficace et par conséquent, la consanguinité élevée). Les gens du club d’animation culturelle de la caverne, enthousiastes, décidèrent de donner des noms aux jours. Dorénavant, la soirée jeu aurait lieu le jeudi, la soirée danse du ventre le samedi, le jeu du “dit manche” (une variante ancestrale du ni oui ni non. Le but du jeu est de répondre manche à toutes les questions (ça n’a pas tellement marché)) le dimanche. Le lundi, pour se reposer un peu, on allait sous les étoiles se montrer la lune.

Mais un jour, un rival du chef UhGruhhhhhhhr prit, selon les coutumes démocratiques en vigueur à l’époque, le pouvoir et décida de montrer qui c’était l’patron dans ste caverne en rajoutant un nouveau jour. On l’appela mardi, parce que ça faisait joli.

Depuis, une légende raconte que le mardi est un jour maudit. C’est une légende propagée surtout par des rédacchefs d’hebdomadaires qui n’aiment pas trop le régime sandwich triangle-café (surtout quand c’est du café poudre et du sandwich triangle jambon fromage. Parce que c’est vrai, le sandwich triangle jambon fromage, dedans, ils mettent un truc, ça s’appelle du fromage, mais ça a tellement pas de goût que t’as un peu de mal à croire que c’en est vraiment. Le fromage des sandwichs triangle, c’est un peu le cousin Georges des fromages, tu sais, celui qui est tellement pas comme nous que t’as de la peine à croire qu’il est de la même famille (sauf qu’à l’enterrement de tata Paulette, tu finis par te rendre compte qu’en fait il était super sympa, c’est con qu’on se soit pas vus plus souvent)(alors que pour le fromage triangle, non)).
Mais il est troublant de constater que c’est justement à cause du sandwich-triangle qu’un mardi, l’homme de Néandertal est devenu l’homme de néant-tout-court, laissant le champ libre à notre ancêtre cromagnon, qui en a profité pour faire un peu n’importe quoi.

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Thursday, November 9th, 2006

Le début de la préhistoire était plutôt paisible. Les hommes étaient un peu trop occupés à chasser le mammouth et le bison laineux pour se friter parmi. En plus, à l’époque, y avait suffisamment de grottes pour qu’on puisse développer sa petite tribu sans trop se prendre de bec avec le voisin qui joue du tibia jusqu’à 4 heures du matin.

Mais c’est toujours en période de crise que l’homme doit puiser dans son imagination pour trouver de nouvelles façons d’améliorer son quotidien, et c’est en pleine crise du cours du mammouth que le chef UhhGrrruhrhr inventa ce concept génial, sans laquelle nous ne pourrions plus imaginer vivre aujourd’hui (sauf Laeticia Halliday): la guerre.

Equipé de massues dernier cri et de massue high tech, ses hommes allaient vaillamment massacrer la gueule du voisin, violer les réserves et piller les femmes, pendant que le chef UhhGrrruhrhr restait au village pour s’occuper de l’intendance. Très vite, les tribus voisines comprirent l’intérêt de ce procédé révolutionnaire et le copièrent, pour le plus grand plaisir des mammouths, mais avec moins de talent.

Après chaque bataille, le chef UhhGrrruhrhr accroissait le nombre de ses sujets en leur expliquant comme ça qu’il fallait créer des synergies et qu’il allait malheureusement falloir dégraisser un peu les effectifs afin de réussir le turn around de la caverne. Les gens râlaient cinq minutes, avant de repartir vaquer. Puis on procédait à la pendaison du chef vaincu.

Mais des voix s’élevèrent pour protester contre ce système un peu injuste, quand même, de pendre le chef adverse comme ça, simplement, après tout ce qu’il nous a fait subir, il mérite un peu pire. UhhGrrruhrhr, qui était à l’écoute de son peuple, inventa un système de torture sophistiqué: les chefs adverses devaient en plus se taper un jugement équitable, au terme duquel ils étaient condamnés à mort.

Depuis, l’homme a inventé la tourte jambons-champignons surgelée, et de telles pratiques n’ont plus cours.

disclosure: le titre m’a aimablement été suggéré par Aurélia, la fille qui fait pas de vélo

Hiérarchie, demain à Morges.

Thursday, September 21st, 2006

Au début de la Préhistoire, l’organisation sociale était plutôt simple. Chaque tribu avait un chef et des tas de pas chefs. Puis la démographie galopa comme un poney au petit matin, les populations grandirent comme le poney lorsqu’il devient cheval, bref, y aurait eu du monde au portillon si les portillons avaient existé.

Cela impliquait, d’une part, que l’ambiance était un peu tendue pendant les longs mois d’hiver, imagine, quatre mois entassés à 250 dans une caverne, pas de cartes, pas de soirées karaoké, rien à faire à part peindre des mammouths sur les murs et même pas l’espoir d’être nominé à la fin de la semaine, forcément, y a un moment où les blagues d’UuuhGruhur et les jérémiades de UhGrhhur commencent à te taper sur les nerfs sévère, mais là n’est pas l’objet de ce post.

Cela impliquait également et d’autre part que pendant les mois de pas hiver, y avait un peu trop de monde pour aller chasser le mammouth. Le grand chef UhGruhr décida alors de créer des groupes de travail: chasse au gros gibier, chasse au petit gibier, outillage, développement d’activités ludiques hivernales.
Puis il fallut subdiviser les groupes en sous-groupes. Malheureusement, UhGruhr constata une baisse de productivité du groupe “taillage de pointes de silex”, qui n’avait pas atteint ses objectifs au premier trimestre -10012. De plus, des voix s’élevaient au sein du clan pour dire que “ceux de danse tribale et peinture rupestre, c’est des planqués, ils foutent rien de leurs journées”.
UhGruhr décida alors de nommer des chefs de groupe, des sous-chefs de sous-groupes, des adjoints et des sous-commissions de surveillance.

Conscient que ces tâches étaient plutôt ingrates, qui voudrait passer son temps à peindre des rapports et à fabriquer des colliers en trombones quand il pourrait courir gracieusement derrière un troupeau d’aurochs?, UhGruhr nomma aux nouveaux postes des vieux de plus de 21 ans, des boiteux, des “se donne de la peine mais en a aussi beaucoup” et tous les gens qui font moins de bêtises quand ils surveillent que t’en fasse pas que quand ils viennent t’aider à chasser la belette cendrée ou à découvrir le feu.

Mais, contre toute attente, les hommes étaient fascinés par ces nouveaux postes. Ils passaient désormais le plus clair de leur temps à espérer une promotion, dire du mal de leur chef, se plaindre que le boulot était mieux avant leur promotion, se demander pourquoi c’est ce con d’UuhGrhuhur qui est devenu chef du groupe “inventions de trucs plus sympas que le mammouth séché pour le petit-déjeuner”, j’étais meilleur que lui, c’est moi qui ai eu l’idée de traire des mammouthes pour faire du beurre, bon ok ça a fait trois morts mais si ceux de “systèmes de protection divers” avaient inventé le casque, ça serait pas arrivé.

Or, à l’époque, les gouvernements étaient très instables. On pratiquait la démocratie directe: lorsque le chef était contesté, on lui mettait un grand coup de gourdin sur le crâne, on l’offrait en sacrifice au premier tigre à dents de sabre de passage puis on s’élisait démocratiquement à sa place, directement, sans attendre 2007. Cela s’appelait un putsch, à cause du bruit que fait le gourdin quand il entre en contact avec la tête. UhGruhr vit dans ce nouveau système social le moyen d’occuper un peu les gens et, ainsi, de continuer à cheffer tranquillos pendant quelques années: pendant qu’ils s’intriguaient parmi, ils oubliaient de revendiquer la chefferie.

Depuis, le système a un peu évolué puisque “mammouths et tradition” et “furets, ratons-laveurs, pangolins et autres animaux pas très bons mais bourrés de protéines” ont fusionné.

Télécom qui croyait prendre

Thursday, August 10th, 2006

Durant la préhistoire, les mariages se passaient en général entre membres de la même tribu. Mais, parfois, il arrivait qu’un homme des cavernes s’éprenne d’une femme de la caverne voisine. Il demandait alors sa main selon une amusante coutume de l’époque: le coup de gourdin sur la tête.
Très vite, les femmes des cavernes ainsi éloignées de leur home sweet home dépérirent et il fallut inventer un système pour qu’elles puissent raconter les événements importants (et les autres aussi) de leur vie à leur mère cinq fois par jour.
Mais c’était un peu compliqué. L’écriture n’avait pas encore été inventée et le seul moyen de communiquer d’une grotte à l’autre était d’envoyer un messager chargé de se rappeler de tas d’informations du genre “est-ce que tu pourrais prendre du pain en rentrant de ta chasse au mammouth” et autre “bonjour, auriez-vous le temps de répondre à quelques questions pour un sondage, cela ne vous prendra pas longtemps”. Il arrivait souvent que les messagers se fassent boulotter par un tigre à dents de sabre en route ou passsent sous un tunnel.
L’invention de l’écriture permit de charger les messagers de plus d’informations. Ils dissimulaient les messages qu’ils devaient porter dans des vêtements amples coquettement ornés de rayures, et leur confrérie fut surnommée le “réseau large bande”. Mais c’était encore un peu lent. Pour des messages urgents comme “ah au fait j’ai oublié de nourrir les chacaux ce matin, tu sais comme ils sont grognons quand ils ont faim, je voudrais pas qu’ils boulottent l’autre bras du petit”, par exemple, ça n’allait pas tellement.
Les hommes cherchèrent à dresser des animaux pour accélérer le processus. Ils essayèrent toutes sortes de possibilité, l’huitre voyageuse, le calmar voyageur, le chaton cromeugnon voyageur, pour distribuer le courrier, avant de se mettre d’accord pour le pigeon. Mais ceux qui ont déjà eu affaire à ces gracieux volatiles savent bien qu’ils sont cons comme leurs pattes et, bien souvent, un amoureux transi recevait un “je crois que vous vous êtes trompé de numéro, il n’y a pas de madame Baillot ici” en réponse à sa vibrante missive de sept pages où il déclarait sa flamme à la lueur d’une bougie.
L’invention du téléphone passa d’abord inaperçue, puisqu’il n’y avait personne à appeler. Mais il se démocratisa tant et si bien qu’il n’y a aujourd’hui plus besoin de faire le 16-1 si vous habitez la Provence. Puis un jour, Maurice Natel inventa le téléphone portable et depuis lors, nous sommes enfin vraiment libres.

Lutte hégémonique (et Roger sont heureux de vous annoncer qu’ils reprendraient bien une part de pâtes, merci) Version 2.0

Friday, August 4th, 2006

(Les dessins sont de Lµdivine, clique dessus pour les agrandir)

CroMeugnon

CroMeugnon

Premier roots

Monday, July 31st, 2006

Vers environ la fin de la Préhistoire, les hommes commencèrent à s’installer dans des villages, à cultiver des céréales et des poules. Les villages commerçaient entre eux, l’économie prospérait, les gens occupaient leurs soirées en faisant de la poterie ou en tapant sur des ossements (et ça leur allait bien) et tout le monde était content, sauf certains jeunes qui rêvaient de quitter ce village pourri ou y a même pas de terre glaise, franchement, c’est trop la honte.

Mais un jour, le grand chef Uhgruhur, qui en avait marre de la poterie, décida pour se distraire d’aller foutre la pâtée à son voisin, le grand chef Ugrhur, qui l’avait traité de “fils de mauvaise sculptrice” dans leur enfance (à l’époque, c’était une des insultes les plus graves). Il demanda donc à son peuple (52 personnes) de fabriquer des tas de gourdins et d’objets contondants (ndr: un objet contondant est un objet qui peut faire mal tous les jours. Il ne faut donc pas le confondre avec le con tondant, douloureux en général le dimanche matin) pour aller éclater sa gueule au peuple voisin (48 personnes et un cheval blanc).

Ce fut un fiasco total. Les hommes d’Uhgruhur marchèrent nuitamment sur le village voisin, leurs armes à la main. Quand ils arrivèrent, une grande fête étaient en cours. Ils décidèrent donc de demander si ils pouvaient rester et offrirent pour la peine quelques pots traditionnels. Cette première guerre de l’histoire fut la seule à non seulement se terminer sans un seul mort mais en plus à faire considérablement augmenter la courbe démographique des protagonistes, parce que bon, tu sais ce que c’est, l’alcool, la musique, la poterie, y a un moment où tu fais un peu connaissance et de fil en aiguille, tu te retrouves à tricoter de la layette.

Mais Uhgruhur, qui avait la rancune tenace, n’en resta pas là. Il inventa donc le concept d’amour de la patrie. Il demanda à son cadet, Ugruhr-le-simple, de lui faire un joli dessin sur une peau de gnou et expliqua à son peuple que c’était un drapeau, que c’était vachement joli et que ça symbolisait bien à quel point ils étaient courageux, forts et doués en poterie, il demanda à son aîné, Ugruhr-le-facétieux, d’inventer un joli air d’ossements tapés et expliqua à son peuple que c’était un hymne national, que c’était vachement joli et que ça symbolisait bien à quel point ils étaient civilisés, intelligents et doués en poterie. Il décida également d’instaurer une journée nationale de fête, pour célébrer à quel point son peuple avait de la chance de pas être des barbares.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, son idée prit. Très vite, ses sujets se mirent à dire que “bon, moi je suis pas tribuiste ou quoi, mais quand même, on est bien obligé de reconnaître que les Ugrhur, ils sont pas comme nous” et à colporter des nouvelles du genre “paraît qu’ils mangent de la dinde et même du boeuf, vraiment, ils sont bizarres”, voire pire “mon cousin Uhgrurh, qui a un peu dû aller là-bas à cause de ses affaires, m’a dit qu’ils ne faisaient pas de poterie, tu imagines un peu?”. Dans la foulée, ils se mirent aussi à dire du mal de ceux qui avaient choisi de rester nomades, des vrais sauvages, en plus ils paraît qu’ils volent des poules et des bébés et qu’ils fabriquent des paniers en osier, vraiment, on n’a pas idée.

Une vingtaine d’années plus tard, Uhgruhur put faire sa guerre tranquille. Il se fit rétamer, surtout son peuple. Ce qui n’empêcha pas d’autres chefs de tribu de trouver ses idées marrantes.

Joyeuse fête nationale aux Suisses et un bon mois aux autres

On ne souligne jamais assez l’importance des titres

Monday, June 26th, 2006

Nous le vîmes dans un post préalable, le jour où l’homme inventa l’argent, sa vie fut bouleversée: il crut dès lors avoir enfin découvert le sens de l’existence: En Gagner Le Plus Possible En En Foutant Le Moins Possible.

Il développa alors des tas de concepts pour aboutir à ses fins: l’hérédité, le loto, les hypothèques,…
Un jour, dans la banlieue sud de Babylone, le jeune Uuglukh partit apporter à sa grand-mère un pot de beurre, des galettes et L’Equipe magazine. En chemin, il rencontra son cousin Ugrunht, vendeur de poteries en gros. Mais celui-ci était fort malheureux. Il ne vendait plus rien depuis que son voisin avait créé le concept de concurrence déloyale et songeait à mettre la clé sous la paillasson, ce qui était malheureusement impossible, puisque la semelle n’existait pas encore.

Uuglukh lui dit alors: tu devrais mettre un panneau affirmant que ta poterie a été reconnue la meilleure par des experts en poterie, ça attirerait le client. Et repeindre ton enseigne en fuchsia, aussi. Il venait ainsi de créer le marketing.

Trois mois plus tard, Ugruhnt faisait faillite et s’immolait par le concert de Kyo, alors que Uuglukh monta son entreprise de consulting et fut notamment à l’origine de la mise à disposition des boucliers de la garde royale aux publicitaires.

Alors qu’en fait, le sens de l’existence est petit pour sa taille, bleu-mauve et fait pouet quand on appuie dessus.

Qui ne dit mot n’a pas d’odeur

Thursday, June 1st, 2006

Hier, des tas de beaucoup de gens sont venus en ces lieux. Sans que je sache comment ni pourquoi (quoique sur le comment, j’ai une vague idée – sur le pourquoi, j’aimerais bien). Ils sont venus, ils ont vu, ils sont repartus. Qui sont-ils, que veulent-ils, aiment-ils les saucisses apéritifs?

Si ça se trouve, y en a qui traînent encore dans le coin. Alors, pour les retenir, un post racoleur.

Mais comme j’ai définitivement perdu le public de Frank Dubosc, un post racoleur qui ne parle pas de cul. Il ne reste donc plus qu’un sujet universel.

Après sa période mammouth-caverne-feu de bois, l’homme préhistorique a décidé, et c’est légitime, de s’installer peinard dans une petite villa en banlieue. Il a également eu envie de plus de variété dans sa nourriture. Dès lors, il s’est sédimentisé et au lieu de chasser, il s’est mis à cultiver des moutons et des laitues. Comme ça poussait bien, il pouvait donner du rab de laitue à ses potes. Ceux qui étaient habiles de leurs mains devenaient potiers ou tanneurs, les nostalgiques redevenaient chasseurs et ceux qui ne savaient pas faire grand chose devenaient soldats ou chefs.

Un jour, Ugluk demanda à son voisin Ugrunth un peu de gigot et deux trois laitues, pour le souper, et si tu avais encore un peu de ragoût, c’est pour le gosse, tu sais comment ils sont à cet âge ahaha en échange on t’a fabriqué un magnifique pot de style mésopopotamien ancien, tu verras, c’est super pratique pour ranger le lait de mouton. Mais Ugrunth avait déjà 432 pots super pratiques et répondut que non mais c’est pas grave, ça ira pour cette fois, c’est la maison qui offre. Ugluk lui dit alors que bon écoute, à la place, je te donne ces trois cailloux. Dans le dialecte de l’époque, c’était une super blague (malheureusement intraduisible), mais Ugrunth, qui était un peu empoté, à force, prit ça pour argent comptant.

Et l’idée, malgré la méridionalité de cette anecdote, fit boule de neige. Tout se payait en petits cailloux. C’était une époque de grande prospérité et l’on avait coutume de dire ici, suffit de se baisser pour ramasser des pépètes (c’est comme ça qu’on disait caillou, à l’époque). Mais à force de se promener avec des cailloux plein les poches, ce qui devait arriver arriva: le premier crac boursier de l’histoire.
On décida alors que seuls les chefs pourraient se promener avec des tas de cailloux, vu qu’ils avaient pas grand chose à faire de leurs journées. Les chefs ajoutèrent, par facétie, à la loi que les autres avaient qu’à être contents, quand même, à la fin, et devraient redonner 10% de leurs cailloux à la fin de l’année.

Comme les gens étaient un peu jaloux des chefs et de leurs gros tas de cailloux, ils inventèrent des tas de métiers et de concepts inutiles pour pouvoir gagner eux aussi des tas de pépettes: la bourse, la comptabilité analytique, le marketing, le golf professionnel.

le carrefour des chemins

Wednesday, May 3rd, 2006

Lundi, donc, c’était la fête du travail. Depuis c’est comme d’hab, la fête des patrons.

Le travail existe à peu près depuis le jour où le premier homme a dit à ses parents “oh zyva quoi, vous êtes trop des singes, c’est la honte, vous êtes trop pas des civilisés quoi” et est parti, plein d’usage et raison, fonder une colonie avec des potes.

Seulement, à l’époque, on n’appelait pas ça comme ça. Il faut dire que tout le monde exerçait le plus vieux métier du monde, chasseur. Alors forcément, les conversations auraient été un peu limitées : “tu fais quoi dans la vie?” “chasseur et toi?” “ah ben tout pareil…”

A l’époque, l’économie mondiale tournait autour du cours du mammouth et les délocalisations étaient plus dictées par la marchandise que par les actionnaires. Mais faut bien dire ce qui est, chasser le mammouth c’est fatigant, c’est salissant et c’est un peu dangereux.

Un précurseur de génie, Uuuh-Grruhr, eut l’idée de créer des sociétés de chasse. “J’investis un tiers de mammouth dans votre entreprise”, expliquait-il, “comme ça j’en détiens le 51% et en échange de l’énorme risque que je prends, vous me redonnez les cuissots.” Mais les gens de l’époque n’étaient pas raisonnables et préféraient passer leur temps à dessiner des mammouths sur les murs plutôt qu’à faire des investissements pour l’avenir.

Uuuh-Grruhr décida alors de commencer par inventer le concept de patron. “Je vous explique, sur un schéma, comment chasser et vous y allez. Comme c’est une énorme responsabilité, vous me donnez les cuissots.” Mais les hommes des cavernes se comportèrent en primitifs et l’envoyèrent balader. Ce qu’il fit. C’est au cours de ses pérégrinations qu’il eut enfin l’idée de génie.

Il revint à la caverne un soir d’orage, avec une peau de mammouth en rotin sur la tête et dit à ses collègues: “les dieux font un peu la gueule, là, rapport à 2-3 trucs un peu chelou que vous avez fait, bon, ils veulent bien vous pardonner si vous leur faites une grosse offrande. Et moi, comme je leur cause un peu et tout, je veux bien les cuissots, merci”. Les gens des cavernes, qui avaient très peu la télé, ne se rendirent pas compte qu’il s’agissait d’un très habile subterfuge que même Derrick aurait eu du mal à comprendre et obtempérèrent. Le deuxième plus vieux métier du monde, prêtre, était né et ce fut dès lors la porte ouverte à toutes les fenêtres. Uuuh-Grruhr inventa dans la foulée les heures supplémentaires et les licenciements pour faute professionnelle grave (“les dieux ont dit que y en avait un peu marre du mammouth, débrouille-toi pour leur trouver un peu de panda et plus vite que ça ou ils te condamneront au bannissement”).

Quelques temps plus tard, quand les hommes firent remarquer que oui mais des orages, y en a autant qu’avant, Uuuh-Grruhr conciliabula avec son beau-frère, qui expliqua comme ça que si les hommes faisaient pas dare-dare ce que les dieux disaient, y allait avoir de la massue perdue. Le troisième plus vieux métier du monde, police (les gens qui l’exerçaient étaient vétus de pelisses et avaient un léger défaut de prononciation) était né.

Les hommes se mirent alors à créer tout un tas de métiers et plus y en avait, plus les gens qui chassaient le mammouth bouffaient des raviolis en boîte, le mammouth étant totalement hors de leurs moyens. Ensuite, les mammouths décidèrent de disparaître et les hommes allèrent aux champs.

Actualité du ping-pong

Thursday, January 19th, 2006

Selon mon machin à statistiques, 98,3% des gens qui viennent ici ne sont pas américains. On va donc partir du principe suivant, sans choquer trop de monde: l’homme descend du train à 7h52, mais surtout du singe.

Aujourd’hui, quand, confortablement installé dans son canapé, une petite bière à la main, l’homme moderne regarde distraitement Dider Barbelivien dresser un portrait élogieux de Nicolas Sarkozy sous l’oeil énamouré de Michel Drucker, tout en pensant qu’il doit encore remplir sa déclaration d’impôts et passer au garage, il lui est difficile de se sentir proche de son ancêtre cavernicole, un morceau de bison à la main, confortablement assis sur un rocher, regardait Uuh-Gruut dresser un portrait élogieux de Uuh-Gruuhuut, un jeune chasseur désireux de devenir chef du village, sous l’oeil énamouré de Uu-Gruuhuuht, le sorcier, tout en pensant qu’il lui restait un bison à dépecer et un autre bison à dépecer aussi (les distractions étaient rares à l’époque, Zinedine Zidane n’ayant pas encore inventé le football).
Il faut dire à sa décharge qu’à l’époque non seulement il n’y avait pas de décharge mais que le jeune Uuh-Gruuhuut n’était pas obligé d’attendre les prochaines élections et de faire un tas de meetings, d’apparitions télévisées et de podcasts. Il s’approchait du chef du village, lui donnait un bon coup de tibia de bison sur la tête et le tour était joué. Mais là n’est pas le débat.

Depuis, l’humanité a évolué (évolué de ex et velus: ça veut dire qu’elle a moins de poil qu’avant, pas forcément qu’elle est plus maline qu’avant). Elle a inventé le feu, l’outil, le travail, les tripes à la mode de Caen, la ville de Caen, la religion, le sudoku, Michel Drucker, le tank, les impôts, le chewing gum, les sitcoms, les chihuahuas. Mais, tapis au fond de nous comme un tamanoir guettant sa proie, l’instinct ancestral ne demande qu’à ressurgir.

C’est pour assouvir cet instinct que l’humain a créé les soldes.
Observez attentivement une foule qui apprend que merveilleux, il y a encore 50% de rabais sur les articles déjà marqués d’un point rouge.
Regardez madame Chompard se jeter sur une paire de mocassins en simili-panda que jamais elle ne mettra, en plus c’est du 51 et son mari était cul-de-jatte avant de décéder irrémédiablement d’un accident de banjo, mais quand même ça peut toujours servir et à ce prix là, c’est pas cher. Ne retrouve-t-on pas en elle quelque chose du jeune Uu-Grhuhut qui se jetait désespérément sur un bison avant que les hyènes et son pote Uuh-Grut, plus costaud, ne viennent bouffer leur part?

Ou pas.