Archive for September, 2011

Elirium Tremens

Tuesday, September 27th, 2011

Dans un mois, la Suisse aura renouvelé son Parlement national. Sauf les 60% d’abstentionnistes qui auront préféré partir en vacances en Italie ou reprendre des nouilles.

Pour t’aider à faire ton choix ou à mieux comprendre l’épineuse démocratie helvétique, penchons-nous sur les slogans de campagne des cinq principaux partis du pays. Je te laisse te renseigner sur les thèses du parti évangélique ou sur celles du parti anti powerpoint, mais dans un souci purement électoraliste, j’essaie de pas faire trop long sinon après c’est trop long.

L’UDC.
« Les Suisses votent UDC », affirme l’hélas premier parti du pays. 28,9% de 48,3% des Suisses votent UDC serait plus exact, même si c’est sûr que ça ferait pas un super slogan. Tiens, par exemple, moi, je suis Suisse sur tellement de génération que mon arbre généalogique pourrait te préparer des röstis les yeux fermés, et je ne vote pas UDC, même saoul. Il doit donc s’agir d’une erreur du graphiste, plus à l’aise avec les moutons chouqui qu’avec les chiffres. Ou alors d’une erreur de traduction (le nom du parti est lui-même une erreur de traduction, ce serait donc logique), il aurait peut-être fallu écrire “des Suisses votent UDC”, ce qui est vrai, comme quoi nul n’est parfait.

Le Parti socialiste
« Pour tous, sans privilèges » Là, il faut choisir. Soit on est pour tous, comme des mousquetaires. Soit on est pour tous, sauf les privilégiés. Et dans ce cas-là, il faut bien choisir de quels privilégiés on parle. Par exemple, l’autre jour, je suis allé au cinéma, j’ai dit bonjour, je voudrais une place étudiant, on m’a demandé vous avez une carte étudiant ?, j’ai répondu ah ben non, alors, pas de place étudiant, j’ai dit je suis un étudiant de la vie, j’apprends tous les jours, alors on m’a répondu il faut demander au rectorat de la vie de vous faire une carte étudiant, comme je sais pas où ça se trouve, je paie le prix fort, et je ne trouve pas normal qu’on privilégie les étudiants alors qu’en plus ils n’ont pas le temps d’aller au cinéma, ils ont un mémoire à rendre dans moins de douze ans. Mais je doute fort que le parti socialiste distribue des cartes étudiants à toute la population. Alors, bon, je pose la question.

Le Parti libéral-radical
« Par amour de la Suisse »
Aaah l’amour. Quoi de plus beau que l’amour ? Aimer, c’est monter si haut, toucher les ailes des oiseaux. Mais ce n’est pas facile tous les jours, il y a des orages, des heures sombres, des samedis après-midi chez Ikea. Alors aimer tout un pays, même Cossonay, même le birchermüesli, même le secret bancaire, c’est beau. Et continuer à l’aimer quand tu vois que c’est de moins en moins réciproque, c’est très romantique.
Sauf que quand on aime quelqu’un, on aime ses cheveux en pétard le matin, son haleine aléatoire quand il rentre un peu tard de son cours de krav maga. On a des étoiles dans les yeux quand on en parle, on s’ennuie en son absence. Et on n’est jamais complètement objectif à son sujet. Du coup, je te le demande, est-ce qu’on a vraiment envie de siéger dans son Parlement ? Est-ce qu’on a vraiment envie de dire “Chérie, j’ai déposé une intervention urgente pour que tu passes moins de temps dans la salle de bain” ou “Mon roudoudou, ce week-end, c’est toi qui passe l’aspirateur, sinon je lance un référendum” ? Ça ne me semble guère recommandé par les guides pour faire durer l’amour.

Le Parti démocrate-chrétien
« Pas de Suisse, sans nous ». La virgule est d’origine, mais je te propose de l’enlever dans ta tête. je suppose qu’ils ont voulu dire « Pas de Suisse sans nous ». On retrouve donc l’idée de Suisse. C’est pratique, ça évite que des gens n’aillent pas voter, ça s’est vu par le passé, parce qu’ils croyaient que tout ce ramdam, c’était pour les élections maltaises ou ougandaises. En revanche, ce slogan pose un problème. Par exemple, pour les deux matches de l’équipe de Suisse qualificatifs pour l’Euro2012. S’il faut absolument un PDC sur le terrain, on est mal. Remplacer Gökhan Inler par Jacques Neyrinck, c’est suicidaire. De même, dans la recette du suisse, spécialité valencienne, il ne faut jamais remplacer le beurre par Christophe Darbellay.

Les Verts
« Une longueur d’avance »
Avoir une longueur d’avance, c’est bien si on participe aux championnats du monde de natation, par exemple. Si on est invité chez des amis, non, ça ne se fait pas. En politique, ça dépend. S’il s’agit de cheveux, c’est un choix personnel. S’il s’agit d’idées, c’est bien pour pouvoir dire après on vous l’avait dit avant, mais ce n’est pas très stratégique, les dernières votations ayant clairement montré qu’il valait mieux avoir douze longueurs de retard. Cependant, je soupçonne ce slogan d’être légèrement mensonger lui aussi : comment veux-tu avoir une longueur d’avance dans ta voiture à batteries rechargeables solaires hydrauliques, alors que pendant ce temps-là, les autres sont venus à Berne en 4×4 ?

Et en cadeau-bonus, cette surprenante des jeunes UDC vaudois : après avoir, pendant des années, affiché haut et fort leur rejet de l’Europe, les UDC font une étonnante volte-face et clament enfin, avec un certain courage, qu’ils aimeraient lui faire tendrement l’amour. C’est beau. Et en plus, ils pensent à se protéger, c’est prudent, mais c’est normal, aussi, ils sont très à cheval sur la sécurité.

Venez comme vous êtes

Sunday, September 25th, 2011

Je ne sais pas si ça se sait, mais « Nevermind » vient de fêter ses 20 ans.

Come as you are,

Viens comme tu es,
Moi je veux bien, mais je ne suis ni coiffé ni en pantalons. C’est dimanche matin, là, je peux pas non plus être sur mon 31 et un piédestal à attendre qu’on m’invite. C’est un monde.

as you were,

comme tu étais,
Ça oui, à la limite, mais j’ai déjà mis mes vêtements au sale.

As I want you to be

Comme je veux que tu sois
Ah ben oui mais quand on dit aux gens de venir comme ils sont, on ne fait pas son exigeant.

As a friend, as a friend, as an old enemy.

Comme un ami, comme un ami, comme un vieil ennemi
Oui ben c’est pas en étant aussi confus sur tes critères vestimentaires que tu vas te réconcilier avec tes vieux ennemis.

Take your time, hurry up

Prends ton temps, dépêche-toi
T’es un peu stressant, dans ton genre, quand même.

The choice is yours, don’t be late.

Tu as le choix, ne sois pas en retard
Non mais comme j’ai pas besoin de me changer, ça va, j’ai un peu de temps devant moi, donc je vais le prendre.

Take a rest,

Repose-toi
Oui, je veux bien, parce que tu es fatigant avec tes trucs.

as a friend;

Comme un ami
Tu veux dire dans la chambre d’amis ?

as an old memoria
Memoria, memoria, memoria…

Comme un vieux souvenir, souvenir, souvenir, souvenir…
Se reposer comme un souvenir ? Je ne suis pas sûr de saisir la métaphore.

Come, doused in mud, soaked in bleach

Viens, couvert de boue, imbibé d’eau de Javel
Eh ben, ça va être super, ta fête…

As I want you to be,

Comme je veux que tu sois
A mon avis, tu m’en veux toujours

As a trend,

Comme une tendance
Ah ben non, je ne mets pas ma chemise de bûcheron, mes jeans troués dernier cri et mes Converse usées neuves payées une fortune chez Vögele si c’est pour aller faire le mariolle dans la boue et l’eau de Javel.

as a friend, as an old memoria
Memoria, memoria, memoria…

Comme un ami, comme un vieux souvenir, souvenir, souvenir, souvenir…
Oui ben les amis, on les passe pas à la Javel, ça se fait pas.

And I swear that I don’t have a gun.
No I don’t have a gun !
No I don’t have a gun !

Je jure que je n’ai pas de pistolet, non je n’ai pas de pistolet, non je n’ai pas de pistolet !
Mais si, Kurt, tu en as un, il me semble !

Memoria, memoria,memoria…

Memoria…

Souvenir, souvenir, souvenir, souvenir
Oui ben ne te met pas dans un état pareil, on va le retrouver,

And I swear that I don’t have a gun.
No I don’t have a gun !
No I don’t have a gun !
No I don’t have a gun !
No I don’t have a gun !
No I don’t have a gun !

Memoria…

Et je jure que je n’ai pas de pistolet (plusieurs fois) souvenir (plusieurs fois)
C’est une très belle chanson porteuse d’espoir sur la réconciliation, l’acceptation des gens tels qu’ils sont, le détachant, les pistolets, la mémoire et la réconciliation.

Amour, stupre et verrines

Thursday, September 22nd, 2011

Clique sur chaque image pour l’agrandir, en attendant que j’aie trouvé un truc pour rendre le tout plus lisible



Voilà, ceci est la première planche d’une série sur le thème chatoyant des amours en lignes, dessinée par Luria. La suite, probablement sur un blog dédié, mais pas tout de suite : apparemment, la dessinateuse aurait un travail, d’autres trucs à faire, une vie, ce genre de choses qu’à titre personnel, je réprouve.

Buzzter Keaton

Friday, September 16th, 2011

De toujours, l’internaute a rêvé d’être payé pour glander gérer sa communauté. Et de nombreuses régies proposent désormais de te transformer en panneau publicitaire pire que la caravane du tour de France monétiser tes espaces communautaires dans le respect de sa communauté, grâce à la publicité. Car cela prend beaucoup de temps et d’énergie, ça doit donc rapporter.

Et c’est vrai que dans le monde moderne, pratiquer une activité futile pour le simple plaisir est une hérésie digne de l’angélisme béat de dangereux communistes post-soixante-huitard, source de paupérisation et d’insécurité. Au moins.

Mais il y a d’autres activités tout aussi chronophages et prenantes que personne n’a jamais pris soin de monétiser, sans doute un moment de distraction des régies publicitaires.

Par exemple, tenez. Je passe quotidiennement deux heures dans ma voiture. Cela me demande du temps et de l’énergie. Je devrais donc pouvoir monétiser cette activité. Je pourrais, à chaque village traversé, crier : “Oh, que cette voiture est confortable ! Je l’ai achetée au garage Grognuz de Courchapoix ! Elle est super !” De même, et ce serait, même si ma modestie souffre de cet aveu, une idée absolument géniale, le klaxon pourrait très bien être remplacé par une publicité sonore pour une assurance-vie.

J’aime les balades. Je ne suis pas un randonneur de l’extrême, mais j’aime à me promener à travers bois à la recherche de l’air pur et du calme. Sauf que j’habite en zone urbaine, je ne peux pas me perdre dans l’immensité d’une chênaie séculaire sans que des douzaines d’autres chalands ne viennent s’y perdre itou. Or, au lieu d’avoir des semelles rayées comme vous et moi, je pourrais très bien porter des chaussures publicitaires, qui indiquent aux personnes venues troubler la quiétude des lieux à grands coups de jogging où trouver la meilleure bièrerie de la ville pour récupérer bien vite les calories bêtement perdues au cours de leurs louches activités.

Et je ne vois pas pourquoi, quand je sers un cake à mes invités, ce qui me prend du temps et de l’énergie, je ne leur servirais pas un “cake à la farine Migros, aux trois poivrons bio de l’épicerie du Coin en Bas à Droite et au saumon d’Ecosse, un pays où on peut se rendre facilement grâce aux voyages Cuany”

Autre piste à explorer. J’ai un péché mignon. Depuis toujours. J’aime dormir. J’y consacre énormément de temps et pas mal d’énergie. Or, il m’arrive parfois de pratiquer cette activité en binôme. Entrecouper mes ronflements (c’est un exemple, évidemment, je ne ronfle pas) par des slogans publicitaires pour des somnifères, des boules quiès ou easydivorce.ch serait une source de revenus non négligeable.

Ce billet n’est pas sponsorisé, mais il vous est gracieusement offert par les poêles en laiton.

Arrive un assez beau jeune homme, l’air suspicieux

Thursday, September 15th, 2011

– Bonjour, je cherche un concept !
– Ça tombe bien, vous êtes justement dans une fabrique de concept !
– Oui, c’est pour ça que je suis là.
– Quel genre de concept souhaiteriez-vous ? Artistique ? Littéraire ? Chevalin ? Funéraire ? Professionnel ? Politique ? Vaseux ? Sémiologique ? Rouge ?
– Non mais c’est parce que j’ai un blog…
– La honte !
– Je ne vous ai pas interrompu alors ne m’interromp…
– Un blog ! Quel ringard !
– Ouais, je sais.
– Il parle de quoi ?
– C’est ça, le problème. Il ne parle de rien. Du coup, j’aimerais un concept de blog qui parle d’un truc. Parce que les gens aiment bien quand ça parle d’un truc précis, à cause de l’identification.
– Vous avez pensé à raconter votre quotidien avec ironie et décalage ?
– Mon quotidien n’est pas très intéressant.
– Justement, les gens peuvent s’identifier.
– Je préférerais pas. Surtout aujourd’hui, je me suis fait une tache de café alors s’ils s’identifient, ça va être moche.
– Une tache de café ! Excellent ! J’adore cette façon de raconter le quotidien de façon naïve et désinvolte. Une tache de café. mais où ils vont chercher tout ça ?
– Ben, dans la tasse. Mais bon, c’est une tache, j’ai frotté un peu et là… bon ben c’est pas parti, mais enfin, c’est pas non plus la peine d’en faire un roman-photo.
– Pourtant, le roman-photo, c’est un super concept. On appellerait ça Romand-Photo.
– Non.
– Ne soyez pas si impératif. Ça raconterait l’histoire d’un type avec un quotidien, désinvolture et des photos.
– Non mais j’avais pensé à un truc moins photographique.
– Des films ? Des films où vous raconteriez le quotidien avec humour et un montage particulièrement fin, et des mimiques pour que les gens comprennent que c’est drôle ?
– Pas mal, ça peut sûrement marcher, mais je pensais à quelque chose de moins filmographique.
– Des dialogues très longs entre des protagonistes ?
– Je sais pas trop, les gens n’aiment plus les protagonistes, de nos jours.
– Sauf si ce sont des protagonistes qui ont un quotidien décalé.
– Je ne sais pas, j’ai peur que ça fasse trop de décalage, j’ai déjà le sommeil léger.
– Mais avez-vous tenté les concepts à vocation instructive, comme par exemple parler d’une passion pour en faire profiter les autres ?
– Je n’ai, hélas, pas de passion.
– Ah, très bien, dans ce cas-là, vous n’avez qu’à donner votre avis sur la politique et un ton péremptoire.
– Je n’ai hélas pas d’avis et puis j’en ai marre des zeugmas.
– Dans ce cas-là, monsieur, je crois qu’il ne me reste qu’une seule chose à vous dire : …
– Bon. Je vais plutôt vous prendre un concept chevalin, finalement.

A l’ombre, des jeunes filles.

Friday, September 2nd, 2011

Cette année, c’est le 20e anniversaire du meilleur album de rock’n’roll de tous les temps (si, si, j’insiste). Mais ça fait aussi 20 ans que nous autres, francophones, préférons Nirvana en yaourt et n’avons jamais vraiment cherché à comprendre de quoi ça parlait. Hélas, je me propose de rerompre le charme.

In Bloom

En fleur

Sell the kids for food

Vends les enfants pour de la nourriture
Justement, parce que j’habite près d’une école, je me posais la question : est-ce que je peux vendre ceux des autres ? Et est-ce que ce ne serait pas plus économiquement responsable de supprimer les intermédiaires et, au lieu de les vendre pour de la nourriture, de les manger directement ?

weather changes moods

La météo change les humeurs
C’est vrai.

Spring is here again

Le printemps est de retour
C’est faux. Mais c’est parfois vrai.

reproductive glands

Glandes reproductives
Bien sûr, tout ça n’a pas l’air hyper cohérent. Mais quand on y réfléchit, si : cette chanson parle d’un jeune homme qui, à cause du retour du printemps, est d’humeur badine et démonstrative. A tel point que, quand la brise revient, il se retrouve affublé de nombreux enfants et de pas un seul petit morceau de mouche ou de vermisseau pour les nourrir, alors il décide de les vendre pour se nourrir, et c’est bien légitime.

[Répétition 1] :

Hey – He’s the one
Who likes all our pretty songs

Hey c’est celui qui aime toutes nos jolies chansons
Le vendeur d’enfants est un fan de Nirvana, mais seulement des chansons jolies (genre celles qui parlent d’un enfant qui veut sa maman ou encore celles qui parlent de boire du thé, je suppose).

And he likes to sing along

Et il aime chanter tout le temps
Quelqu’un de très badin, de très joyeux, donc.

And he likes to shoot his gun

Et il aime tirer au pistolet
Et du coup, la vente de ses enfants est une très bonne chose, car ce n’est pas un loisir très familial, contrairement à la couture (par exemple).

But he knows not what it means
Don’t know what it means, when I say:

Mais il ne sait pas ce que ça veut dire, sait pas ce que ça veut dire quand je dis..
Suspense. On ne saura pas ce que le jeune homme ne sait pas. Je sais pas vous mais je suis impatient.

[Répétition 2] :

He’s the one
Who likes all our pretty songs
And he likes to sing along
And he likes to shoot his gun
But he knows not what it means
Knows not what it means when I say yeaahh …

Il est celui qui aime toutes nos jolies chansons et il aime chanter tout le temps et il aime tirer au pistolet, mais il ne sait pas ce que ça veut dire, sait pas ce que ça veut dire quand je dis ouais.
C’est souvent le problème des teasers : l’attente est meilleure que le verdict.

We can have some more – nature is a whore

Bruises on the fruit – tender age in bloom

Nous pouvons en avoir plus, la nature est une pute
Pourriture sur le fruit, âge tendre en fleurs.
Kurt Cobain, apparemment, a acheté les enfants de son fan qui voulait les vendre pour manger. Mais il constate que ces derniers souffrent d’acné juvénile et il est très énervé, et on peut le comprendre, quand on fait un achat important, on peut s’attendre à ce qu’il ne souffre pas d’acné.

C’est une très belle chanson, porteuse d’espoir et d’un message fort : quand vous achetez quelque chose à un marchand ambulant, vérifiez attentivement la marchandise, sinon vous ne pourrez pas vous plaindre ensuite.