Télécom qui croyait prendre

Durant la préhistoire, les mariages se passaient en général entre membres de la même tribu. Mais, parfois, il arrivait qu’un homme des cavernes s’éprenne d’une femme de la caverne voisine. Il demandait alors sa main selon une amusante coutume de l’époque: le coup de gourdin sur la tête.
Très vite, les femmes des cavernes ainsi éloignées de leur home sweet home dépérirent et il fallut inventer un système pour qu’elles puissent raconter les événements importants (et les autres aussi) de leur vie à leur mère cinq fois par jour.
Mais c’était un peu compliqué. L’écriture n’avait pas encore été inventée et le seul moyen de communiquer d’une grotte à l’autre était d’envoyer un messager chargé de se rappeler de tas d’informations du genre “est-ce que tu pourrais prendre du pain en rentrant de ta chasse au mammouth” et autre “bonjour, auriez-vous le temps de répondre à quelques questions pour un sondage, cela ne vous prendra pas longtemps”. Il arrivait souvent que les messagers se fassent boulotter par un tigre à dents de sabre en route ou passsent sous un tunnel.
L’invention de l’écriture permit de charger les messagers de plus d’informations. Ils dissimulaient les messages qu’ils devaient porter dans des vêtements amples coquettement ornés de rayures, et leur confrérie fut surnommée le “réseau large bande”. Mais c’était encore un peu lent. Pour des messages urgents comme “ah au fait j’ai oublié de nourrir les chacaux ce matin, tu sais comme ils sont grognons quand ils ont faim, je voudrais pas qu’ils boulottent l’autre bras du petit”, par exemple, ça n’allait pas tellement.
Les hommes cherchèrent à dresser des animaux pour accélérer le processus. Ils essayèrent toutes sortes de possibilité, l’huitre voyageuse, le calmar voyageur, le chaton cromeugnon voyageur, pour distribuer le courrier, avant de se mettre d’accord pour le pigeon. Mais ceux qui ont déjà eu affaire à ces gracieux volatiles savent bien qu’ils sont cons comme leurs pattes et, bien souvent, un amoureux transi recevait un “je crois que vous vous êtes trompé de numéro, il n’y a pas de madame Baillot ici” en réponse à sa vibrante missive de sept pages où il déclarait sa flamme à la lueur d’une bougie.
L’invention du téléphone passa d’abord inaperçue, puisqu’il n’y avait personne à appeler. Mais il se démocratisa tant et si bien qu’il n’y a aujourd’hui plus besoin de faire le 16-1 si vous habitez la Provence. Puis un jour, Maurice Natel inventa le téléphone portable et depuis lors, nous sommes enfin vraiment libres.

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