Posts Tagged ‘journalisme’

interlude publicitaire

Tuesday, February 24th, 2004

“Notre région ne se trouve pas dans une région à risques. Bien sûr, il est impossible d’exclure qu’un tremblement de terre comme celui de Bâle en 1356 ne se reproduise”
“Je ne pense pas encore à la victoire finale, je prends les matches comme ils viennent. Mais je me sens bien ici et si je ne rencontre pas de problèmes, je pense pouvoir faire un bon tournoi.”
“Je reviens à l’instant de vacances et je ne suis au courant de rien, mais je trouve quand même que c’est un scandale”
“Jamais on n’aurait cru ça de lui… Il ne parlait pas beaucoup, mais il n’a jamais causé de problèmes… Non, jamais je n’aurais pu m’imaginer qu’il assisterait un jour à un concert de Kyo.”

Chers journalistes, ce message s’adresse à vous. Trop souvent, vous traquez inlassablement le type qui pourra bien vous raconter des trucs que vous savez déjà qu’il va vous raconter mais que quand même ça fait trop bien en intro de reportage.

Notre société vous propose de nombreux figurants: le témoin de la scène, la concierge, le voisin, le professeur d’Université, le fan du club de foot qui va bientôt mourir, le joueur de banjo, etc.

Finis, les incessants téléphones à la recherche de la nouvelle star du 20 heures, finie la recherche éperdue du spécialiste qui connaît.

Pour vos diverses éditions régionales, de nombreux accents, du vaudois au limousin, sont à disposition. Veuillez consulter notre catalogue. (Pour des raisons de crédibilité, le fan de foot n’existe pas en version accent valaisan). De plus, nos figurants imitent à la perfection le jeune de banlieue, le vieux de périphérie et le entre-deux-âges de centre ville.

Dès aujourd’hui dans les kiosques, le fascicule numéro 1 de la série “les meilleurs figurants pour vos reportages”. En cadeau-bonus, le ramasseur de courge de plus de 130 kilos et l’observateur d’objets non-identifiés.

Attention, pour les crises de larme, prévoir un supplément de 23 euros.

il y a trop d’gens qui s’aiment

Saturday, February 21st, 2004

En exclusivité mondiale, voici la suite de ça :

quelques types de journaleux que vous risquez de croiser si vous n’y prenez pas garde.

le sportif

Il rêvait de finale de coupe du monde, ce week-end il va suivre le derby Alle-Les Breuleux. Mais d’un côté il est content, il a bière gratuite à la buvette de Alle. Il raffole des expressions amusantes (et qui ne veulent rien dire, mais c’est pas grave, les collègues les emploient aussi) comme “pas grand chose à se mettre sous la pupille” ou “gagner sans coup férir”. Il est doté d’un esprit critique à toute épreuve. Seulement, c’est pas sa faute si quand son équipe favorite perd, c’est toujours de la faute de ce salaud d’arbitre.

le faites comme je dis

Il a écrit des livres de journalisme, même qu’il le rappelle souvent. Quand on lui signale que ouais mais là ton article il correspond pas du tout à ce que tu dis, il se justifie pendant une heure et quart. A la fin, l’article ne correspond toujours pas, mais on finit par le croire. Il oublie de demander les fonctions des gens, mais il explique que c’est parce que oui je leur avais demandé mais un ragondin a mangé mes notes. Il écrit des billets d’humeur très drôles (enfin il dit à tout le monde qu’ils sont très drôles, cela n’a jamais été prouvé scientifiquement). Si vous lui glissez une blague, elle se retrouvera dans son prochain billet d’humeur très drôle et il expliquera à tout le monde qu’elle est de lui. Même si dans son livre, il dit de citer ses sources.

Le jargonneux

Il aime bien les mots compliqués. Quand il fait un article sur Alinghi, au lieu de parler de blaireau friqué qui s’achète des coupes, ce que tout le monde comprendrait, enfin les gens qui connaissent Alinghi, donc les suisses qui n’ont pas hiberné ces 3 dernières années, il parle de godillage, de louvoyage et de hauban. Du coup, t’as un peu l’impression d’être stupide en le lisant, ce qui est toujours utile en cas d’attrappage de grosse tête.

le double-casquetté

Il est à la fois correspondant régional à Fornet-Dessous et organisateur de la fête au village de Fornet-Dessous. Ecrire “la fête au village de Fornet-Dessous, organisée de superbe manière, a été un véritable succès et les spectateurs sont partis ravis” ne lui pose aucun problème. Il oulie de préciser qu’ils étaient trois. Par contre, il a un talent pour l’écriture certain: il est capable de glisser une référence à la fête au village de Fornet-Dessous. (“Un incendie s’est déclaré hier soir, détruisant entièrement le cabanon de jardin de Maurice Grumluk. “Malgré cela, j’irai à la fête au village de Fornet-Dessous, l’événement que je préfère de le monde”, a déclaré Maurice Grumluk.) En plus, il est fan de Kiss.

gros titre

Thursday, December 11th, 2003

Y a des journalistes qui vont dans des pays, se battent contre des méchants, vivent des aventures, tombent les plus belles filles de le monde et accessoirement, quand ils ont cinq minutes, écrivent des trucs.

Y en a, enfin sûrement, j’en ai jamais vu à part dans des films holywoodiens et des bédés belges.

Mais le journaliste le plus répandu, c’est quand même le régional.

Son quotidien, même s’il bosse pour un hebdomadaire, c’est l’inauguration d’une place de sport à Fornet-Dessous, la conférence de presse des amis des ratons-laveurs du Bas-Vallon, des trucs passionnants.

De temps en temps, il se passe un évènement important genre 11 septembre, guerre en Irak, élections fédérales, journée mondiale du truc ou du machin, procès contre Michael Jackson, inauguration d’une place de sport à New-York.

Le journaliste régional, ça le frustre. Il aimerait bien en parler, mais il peut pas: c’est pas dans sa région que ça se passe. Il ne lui reste alors qu’une solution: monter une armée et partir envahir la région ou ça se passe, histoire que ça devienne sa région aussi. Mais, je vais en décevoir plus d’un, les journalistes ne sont pas des gens très très riches. Ou alors on me ment. Donc il n’a pas les moyens de monter une armée, vu qu’il lui manque des nerfs pour la guerre et il ne lui reste qu’ue solution: régionaliser.

Il parcourt donc son carnet d’adresses et recherche fébrilement une personne de sa région concernée par le sujet pas de sa région.

Ce qui donne parfois lieu à des phrases étranges lors des séances de rédaction et des apéros après la conférence de presse des amis des ratons-laveurs. Du genre: “trop fou, j’ai un irakien, le Journal Concurrent Qu’On Les Aime Pas ils aimeraient bien savoir où je l’ai trouvé mais je leur dit pas, gnark gnark gnark” Ou alors: “Dis, vous avez un petit myopathe pour le Téléthon?? Vous l’avez trouvé où? Accepteriez-vous de me l’échanger contre un type dont la grand-mère connait quelqu’un qui était à New-York deux mois avant le 11 septembre? Nous vous offrons également un magnifique porte-clés en bois massif”

Bon ben là, j’y vais, faut encore que je trouve quelqu’un pour la journée mondiale des politiciens nains.

Coming out

Wednesday, November 5th, 2003

Journaliste, c’est un des rares mots de la langue française à ne pas avoir la même signification au pluriel et au singulier. Prenons deux exemples concrets: “Ah ces journalistes, tous des menteurs”, mais “Quoi? T’es journaliste? Waaah trocoooool! Tu voyages beaucoup?” (à cette question, jeune padawan scribouillard, il faut répondre par un sourire monalisatesque. Il ne faut pas détruire les rêves des gens qui nous voient rampant sous les bombes alors qu’on est en train de s’empiffrer à l’apéro du choeur mixte)

Quelques exemples presque au hasard de journaleux: (mais de toutes façons, tous des menteurs)

Le ‘tit jeune qui n’en veut:

Il rêve de gloire, de strass, de paillettes, de signer des autographes, de CNN. Ce qui est idiot, les gens ne lisent pas les signatures en bas des articles, sinon ils se rendraient compte que tous les articles de la rubrique internationale de son quotidien régional sont signés par les dénommés Reuters et AFP (Alain-Ferdinand Poujol) et arrêteraient de demander si on voyage beaucoup. Mais bon, ne brisons pas les rêves du ‘tit jeune qui n’en veut. Il fait donc toutes les inaugurations, les assemblées communales de parti, serre des tas de mains et consomme des wagons entiers de cartes de visite.

Le consciencieux: (je mets tout au masculin pour généralifier, mais les consciencieux que je connais, c’est des consciencieuses)

Il vérifie 21 fois chacune de ses sources. Il veut être sûr de n’oublier aucun détail dans ses papiers. Du coup, le moindre article sur la courge de 320 kilos cultivée par monsieur Ducommun de Vugelles-la-Motthe lui prend une semaine de préparation, une semaine de rédaction, une semaine de “rah mais je vois pas où je pourrais encore racourcir, j’avais 12724 signes, là j’en suis à 8012 et je dois en faire 400… Non parce que si j’enlève le passage où je dis qu’il aime bien la fondue savoyarde, ça risque de vexer son cousin au sixième degré…je vais appeler la marraine de son plombier pour voir ce qu’elle en pense”

Le j’m’enfoutiste:

Le même que celui d’avant, sauf que c’est le contraire.

L’écrivain raté:

Il est persuadé qu’il écrit trop bien pour le commun des mortels qui a l’outrecuidance d’acheter le journal dans lequel il a la bienveillance d’écrire, parce qu’il faut bien manger et que ces salauds d’éditeurs lui refusent tous ces romans pourtant merveilleux, parce qu’ils ont peur qu’il fasse de l’ombre aux écrivains déjà établis. Quelque part, il a un peu raison: il écrit tellement bien qu’il faut prévoir quatre ou cinq heures pour comprendre le lead de son article “les sapeurs-pompiers de Rueyres-les-Prés tiennent leur assemblée générale”.

le Bluthund:

il aime les histoires qui sentent le sang, le sexe, la fange, les trucs sordides. Du coup, on les lui refile avec plaisir. Il hésite pas à se salir les mains. Il n’a pas d’amis. Si il apprend un truc malodorant sur quelqu’un, il ne lâche plus sa proie. Même si le quelqu’un est son concierge, son ami d’enfance, sa mère. Il a un gros salaire, mais il le dépense en procès. Il reçoit plein de coups de fils en période électorale.

L’ex ‘tit jeune qui n’en a voulu:

A force d’apéros, il a pris du ventre et ses joues arborent de magnifiques teintes automnales, dues à des années de p’tits verres de blanc. Il est divorcé, sa femme en ayant eu un peu marre des “ouais mais je peux pas louper l’assemblée du ski-club de Suscévaz, tu comprends, Jean-Robert Gloupowsky sera là, c’est super important, il va probablement annoncer sa candidature au poste de vice-secrétaire de l’association des amis de la pêche au vairon du Pied du Jura, j’aimerais pas que la concurrence l’apprenne avant moi, tu comprends, mais promis, dans six mois j’ai un trou dans mon agenda, on passe la soirée ensemble”. Il tutoie plein de monde, mais à force de p’tits verres de blanc, il ne se souvient plus trop qui. Il aime bien les nouveaux ‘tits jeunes qui n’en veulent à qui il dit: “ouais moi j’aurais pu aller à CNN mais bon, tu comprends, j’suis mieux là, j’ai des relations et tout”

Le supertalentueux:

Il est trop gentil pour faire un bon journaliste. Et trop flemmard, aussi, un peu, mais bon il compense. Son rêve, c’est d’être payé pour écrire/filmer/microphoner des conneries. Ou alors d’être nommé correspondant permanent aux Maldives. (On sait jamais, ça peut toujours marcher ce truc là)