Bon pour ton poil

“Non, je te le prête pas, t’as qu’à avoir tes affaires.”

Longtemps, j’ai considéré les gens donnant cette réponse comme des pétasses (quelque fois, c’était des mecs, mais c’est rare)(c’est quand même malfoutu, le français: un type qui vient faire son malin au milieu de 423 nanas, il se la pète genre ahaha je suis le seul mec au milieu de 423 nanas, mais finalement il reste que 5 minutes parce que ça parle de plein de trucs dégueu, et il faudrait mettre tout le texte au masculin). Aujourd’hui, subitement, j’ai compris: elles voulaient me protéger. Elles avaient compris.

Je sais pas si vous avez remarqué, mais le stylo est un objet qu’on perd facilement. En 29 ans et une ou deux poussières, j’ai bien du perdre 32521 stylos. Pendant ce temps là, je n’ai jamais perdu mes chaussures, mon frigo, ma voiture, mon harmonica, ni même la finale de Roland Garros. J’ai perdu cinq ou six fois le Nord, une seule fois ma virginité, (et encore, pas très longtemps) quelques occasions de me taire, la tête depuis que j’ai vu Suzette.
Dans le même ordre d’idées, combien de fois un collègue vient vous dire: “Oh, Gérald, (enfin, si vous vous appelez Gérald)(ça doit pas être facile à vivre, si?) tu peux me prêter ton stylo, j’ai perdu le mien?” Alors que jamais il ne viendra vous dire “Oh Gérald, j’ai perdu ma mère ce matin, tu peux me prêter la tienne?” Non, jamais.

Alors, me direz-vous (ou pas), pourquoi perd-on si facilement son stylo?

Et bien, je vous le donne en mille (jamais compris cette expression, mais ça permet un petit effet de suspense très hitchcockien)(Maurice Hitchcock, l’auteur de “les oiseaux font du ski”): ils sont déjà parmi nous. Les stylos sont en fait des espions extra-terrestres chargés de nous espionner.

Ils s’infiltrent partout, ils écrivent nos noms sur nos cahiers d’écoliers, sur les pupitres, des fois même sur les arbres, mais ça marche moins bien et ensuite ils reprennent leur liberté et vont espionner quelqu’un d’autre. Entre temps, ils acceptent de se faire un peu mordiller, parce qu’ils sont pervers en plus d’être fourbes.

Ils ont été envoyés par une célèbre famille extra-terrestre, qui envisage de prendre le contrôle du marché mondial du kiwi, pour pouvoir frimer en société par chez eux. Du coup, la famille concurrente a décidé d’envoyer les briquets pour contrecarrer leurs plans.

Par contre, les rasoirs jetables n’ont rien à voir là-dedans.

A la télévision, les gens des sitcoms ne sont pas les seuls à comploter. Un autre groupe de personnages machiavéliques oeuvre pour mener à bien ses terribles desseins (cette phrase a déjà été utilisée dans de nombreuses oeuvres littéraires, notamment le Mickey Parade spécial hors-série (on y voyait Mickey découvrir que Pat Hibulaire était le coupable grâce à son immense sagacité), mais elle passait bien dans le contexte)

Si vous regardez bien la Starac, de temps à autres, vous apercevrez un prompteur. Les textes des chansons, les subtiles réparties du toujours sémillant animateur et peut-être même les réponses balbutiées des apprentis has-been y défilent insouciantes. Sans que personne ne s’en offusque. Et pourtant, il y a une troisaine d’années, le prompteur était un de ces trucs honteux, dont tout le monde connaît l’existence mais dont personne n’a jamais fait l’expérience soi-même, un peu comme le Bois de Boulogne et les spaghettis surgelés.

Aujourd’hui, on les affiche sereinement à la Starac. Demain, les caméramen complices du Plan les laisseront subrepticement apparaître dans toutes les émissions, du TJ aux émissions religieuses en passant par les matches de foot.

Le prompteur deviendra fashion, tout le monde voudra le sien. C’est alors qu’Ils lanceront la deuxième étape de leur Plan: on trouvera dans le commerce des prompteurs portatifs. Ils réagiront aux phrases que vous entendrez et vous n’aurez plus qu’à lire la réponse.

En quelques mois, tout le monde aura son Prompteur portable. Tout l’éventail des relations humaines pourra se résumer en 32 phrases enregistrées (dont Tiens, on dirait que vous êtes une fourchette aujourd’hui, insérée par un programmateur dépressif). Mais pour personnaliser un peu, on pourra acheter des smileys.

C’est alors que le Plan sera réalisé:

Ils avaient échoué lors des débuts d’internet, mais ils reviennent, plus déterminés que jamais.
Un jour, les gifs animés domineront le monde.

(Regarde les fourbir leurs armes ici, c’est effrayant)

Lors d’une visite plus ou moins fortuite à un skyblog, j’ai constaté que les jeunes, ces êtres étranges et mystérieux, concluent régulièrement leurs phrases ainsi: “lol bisous”. Au début, cela m’a semblé innocent et charmant et je n’y ai guère prêté attention.
Jusqu’au jour où je me suis trouvé assis, dans le train, juste à côté de jeunes. Discrètement, j’ai tendu l’oreille et l’oeil. Et bien, en 23 minutes de trajet, pas un seul lol, pas un seul bisou.
Alors, pour en avoir le coeur net, je me suis déguisé en jeune et me suis subrepticement immiscé dans une de leurs réunions (une boum, comme ils appellent ça). Et bien pareil. Bon, à un moment, grisés par la sangria et les chansons de Kyo, certains ont émis l’équivalent d’un lol (ils se sont mis à rire) et ils se sont bien fait quelques bisous en fin de soirée, mais enfin, ce n’était pas aussi systématique que sur les skyblogs.
Après intense reflexion, j’ai ainsi décodé ce fameux “lol bisous”:
Largage Odessus Lespagne (une pratique intense du sms laisse forcément des séquelles) Balises Itinérantes Sous Ote Surveillance, ce qui donne LOLBISOS, mais ils ont rajouté un u pour déconner, il faut savoir que les jeunes aiment bien déconner.
J’ai dû me résoudre à l’évidence: Maïa avait raison, les jeunes préparent une révolution, comme ça pour déconner. Probablement un jeudi, y a pas grand chose à la télé.
Si vous rencontrez une bande de jeunes, ne paniquez pas, le mieux est de leur lancer une playstation allumée, ça devrait les retenir 8-12 heures, le temps de fuire.

Oui, mais que veulent-ils, vous demandez-vous? Et bien, je me dois de méaculper. J’avais pris un peu trop à la légère la chanson de leur cheffe, Ilona M. Plus qu’une simple bluette, il s’agit là d’un véritable programme politique. Ils vont ouvrir les cages aux oiseaux et planter des chèvres un peu partout, comme le premier baba venu, lâcher des tas de crocodiles dans les rues et ensuite partir en vacances en Italie pendant qu’on se fera boulotter. Et ça, c’est pas très sympa, lol, bisous.

Il y a le mystère Frantico et le cas JLR, des gens qui faisaient déjà couler la chronique de leur vivant blogosphérique avant de disparaître subrepticement, laissant malheureux plusieurs fans de par le monde. Il y a aussi l’affaire étrange de ce jeune chanteur qui, en pleine gloire, à 4 ans, disparaît sans tambour ni harmonica, pour revenir des années plus tard dans la peau d’un fermier boutonneux. Tout comme celle de ce politicien qui prétend être parti faire de la pêche à l’île de Ré.

Mais il y a d’autres cas, tout aussi étranges. Le fait même qu’ils soient totalement inconnus du grand public et même du moyen public prouve que quelque chose de louche se trame.

De 1979 à 1983, Grégoire Blutzoire termine 12 fois champion du monde de ping-pong artistique. Mais alors qu’il est adulé des foules et notamment de sa grand-tante Ursanne Blutzoire, il disparaît en pleine gloire. La rumeur dit qu’il se serait retiré pour embrasser une carrière de vendeur d’harmonicas en tefal. Ce qui prouve que la rumeur raconte souvent des conneries.

Le 12 juillet 1421, Chrisostome Moulinot, célèbre dans le monde entier pour sa magnifique interprétation de la seizième symphonie en mi majeur de Mozart au fer à souder, décide, contre toute attente, d’arrêter la musique pour soi-disant devenir graveur sur marbre.

Plus près de nous, un jeudi, Esculape dos Fonjallaz y Bollomey, qu’on ne présente plus, décide de se retirer car, prétend-il, il doit reprendre la direction de l’usine de vilebrequins paternelle.

Qui sont réellement tous ces gens? Lewis Trondheim qui fait des blagues? Et si non, que sont-ils devenus? Aiment-ils à se balader, la nuit, sous les étoiles? Collectionnent-ils les albums de Stone and Charden? Savent-ils pourquoi des fois y a des genre de trucs bizarres qui apparaissent bizarrement? Pourquoi font-ils tant d’efforts pour cacher leur véritable identité? Le fbi est-il dans le coup?

Après de longues années de recherches sur des forums dans l’internet, je puis aujourd’hui crier haut et fort que je n’en sais strictement rien.

Le Mystery Park d’Interlaken est un parc d’attraction unique en son genre, qui présente des énigmes insolubles mais néanmoins réelles de notre monde.

Vous y découvrirez prochainement quelques merveilleuses expositions thématiques, consacrées à des thèmes.

• Des ufologues vous expliqueront les mystérieux mystères qui ont fait que Indochine et U2 sont des groupes connus.
• Un spécialiste en truc chelou vous expliquera, avec force schémas explicatifs, pourquoi il y a encore des gens qui participent à Questions pour un champion pour gagner l’encyclopédie des abris-bus du Poitou.
• Une exposition spéciale nouvelle technologie vous expliquera comment des gens arrivent à se toucher l’épaule avec leur nez.
• Une exposition bourrée d’effets spéciaux vous expliquera comment des gens réussissent à gagner plein de pépettes en vendant supercher des services qu’on trouve moins cher ailleurs et en publiant des photos d’eux en train de faire du kite-surf avec des natels qui leur sortent des oreills, mais aussi comment d’autres font pareil avec un parc consacré aux trucs mystérieux.
• Enfin des hypnotiseurs tenteront une expérience unique et peu académique: ils hypnotiseront collectivement des millions de gens, qui se mettront alors à avoir des comportements incohérents. Ils passer leurs soirées devant leur téléviseur à regarder seize jeunes écervelés croire qu’ils apprennent à chanter. Puis les cobayes se mettront à trouver du talent à un jeune myopathe (choisi parce que c’est moins cher à nourrir) qui, objectivement, a un peu la voix de Mireille Mathieu et enverront des tas de sms pour le sauver. Enfin, les hamsters se rueront dans les magasins pour acheter la compil’ spéciale reprises de chansons à boire et une bouteille de coca