Archive for the ‘le blog est un journal intime virtuel’ Category

We Feet

Monday, May 26th, 2008

Il y a une époque, je sais pas si tu te souviens, les appareils électroménagers survivaient plus de trois semaines à leur garantie. Par exemple, moi, dans la vie, j’ai une très vieille télé. Tellement vieille que y a un temps, je la regardais, parce que dieu n’avait pas encore inventé msn. Tellement vieille que, tu vois, je peux pas l’abandonner comme ça, au bord d’une autoroute, pour la remplacer par un vulgaire écran plat, après tout ce qu’on a vécu ensemble (une soirée Shining, la coupe du monde 2002, Dream On avec le son tout bas pour pas qu’on me signale que non mais t’as pas cours demain?,…)

Du coup, tu comprendras bien qu’il m’est impossible de faire comme sur tous les blogs et de te parler de la wii-fit.

Du coup, j’ai été obligé, constatant que le canapé sis face à la dite télé commençait lentement mais sûrement à épouser la forme veloutée de mes fesses évanescentes, tandis qu’à l’inverse, mon ventre jadis jalousé commençait à trahir légèrement la tendresse que je porte aux boissons houblonneuses, de tester un truc archaïque, le fit sans wii.

Mais pas dans une salle de sport ni sur un terrain de squash, hein, faut pas déconner, c’est un blog respectable, ici, y a des enfants qui pourraient tomber dessus en plus. J’ai donc testé pour toi le Nordic Walking, mais sans bâtons. Un sport hype, vivifiant et on sait jamais, au cours de mes 12 heures de pc par jour, je pourrais croiser une fan de randonnée, les chances sont minces, mais tout de même, faut que je m’entraîne au cas où. Oui, en gros, j’ai été me promener, quoi.

Alors comme ça, ça n’a l’air de rien mais crois moi, ce n’est pas un sport sans dangers.

Au début, il fait beau, tu es plein d’entrain, d’espoir et de mp3. Tu arrives vers les petits panneaux jaunes, tu te dis 3 heures, ça a l’air faisable, je vais suivre plutôt celui-là .

Et tu commences à monter, plein d’entrain et de vigueur. L’air poudroie, les buses cacadent, les chevreuils chevrotent, tu es seul au monde, l’esprit libre et la jambe alerte.
Et tu montes encore.
Et encore.
Un coup d’oeil en contrebas, vers un panorama magnifique…
Et là , tu te rends compte que le panorama magnifique, c’est ton point de départ.
Plus petit qu’avant, certes, mais c’est ton point de départ.
Devant toi, la route a pas l’air de vouloir s’arrêter de grimper.
Et y a personne, bordel. Seul trouble l’inquiétant silence le cri déchirant d’un… ah non, c’est juste ton téléphone qui vient de sonner, tu viens de recevoir un sms, tu en profites pour constater que sur les 3 heures, il te reste environ 2 heures 48.

Tu repars, plein de crampes et d’entrain, parce que si tu mourais de fatigue ici, sûr que les secours se moqueraient en portant ta dépouille encore fumante. Tu es toujours seul au monde, ah non, tiens en fait y a des gens qui montent en voiture, ils sont rusés, j’aurais dû faire pareil. Mais tu tiens bon, tu t’accroches. Quand, au deuxième panneau jaune, tu te rends compte que tu as mis une demi-heure dans la vue aux poseurs de panneaux, tu commences à te ressentir léger et primesautier, surtout que tu es sorti de la forêt, il y a des gentianes et des autres fleurs, plutôt genre bleues.

Les mecs des panneaux décident de se venger de toi, d’abord en décidant de faire grève à une intersection pourtant tripartite, puis en racontant franchement n’importe quoi.

Tu commences à sentir le second souffle arriver, sauf qu’objectivement c’est plutôt le 4 ou 5ème, tu es à nouveau plein d’entrain et tu commences à imaginer un petit Moutier – Genève par les crêtes cet été. C’est à ce moment là que tu croises deux types, environ cinq fois ton âge, immédiatement suivis par deux sac à dos, environ cinq fois ton poids et qui n’ont absolument pas l’air (je parle des vieux, pas des sacs)(je crois que cette blague est interdite depuis environ 1922) essoufflé.

Et là, tu décides d’attendre qu’on construise un téléphérique pour redescendre.

J’ai mangé que 4 légumes aujourd’hui, je me sens tout pâle

Friday, May 16th, 2008

Deux films plein de testostérone sortent en salle prochainement. Indiana Jones et JCVD.
Si toi aussi, chez toi, tu veux avoir l’air d’un survivor sans devoir passer par des situations terrifiantes et périlleuses comme traverser une fosse remplie de serpents ou écouter Arthur et Jean Dujardin se moquer de toi, il y a un moyen simple: l’hypocondrie.
En effet, la somatisation te permet, avec un peu d’entraînement, de guérir, dans la même semaine, de trois cancers, dont un du sein (ou de la prostate, si tu es une fille), d’un sida et d’une maladie non-répertoriée.

Alors, bien sûr, ça demande un peu d’entraînement. D’imagination. Il faut réussir à te convaincre que si tu es si fatigué, c’est à cause d’un grave problème sanguin, pas à cause de tes trois heures de sommeil de la veille.

Au début, tu auras peut-être le réflexe de foncer chez ton médecin. Surtout pas, malheureux. Les salles d’attente, c’est dangereux. Dans la salle d’attente, tu risques d’attraper une maladie contagieuse. Voire une dépression à force de relire des vieux Gala. Le mieux, c’est d’entretenir le doute. Tu sais que tu n’as rien, que tout ça c’est dans la tête, mais tout de même, si tu souffrais encore des séquelles de cette chute à vélo quand tu avais 5 ans ?

Heureusement, l’Argan moderne a un allié de choix. Fonce sur ton google, tape quelques symptômes et tu te verras conforté dans ta certitude de souffrir de mille maux. Tu finiras forcément, tôt ou tard, sur doctissimo, paradis de la somatisation où, pour ton mal de bras gauche, on te diagnostiquera bien vite une lèpre ou une gale.

N’hésite pas, non plus, à lire attentivement les posologies des médicaments que ton pharmacien t’aura délivrés. Avec un peu de bonne volonté, tu devrais très vite ressentir tous les effets secondaires décrits, même les très rares.

N’hésite pas à lire la presse de boulevard. Ainsi, entre deux éternuements de canard, une agréable promenade en forêt au bras d’une blonde pourra se transformer en expérience mystique. Alors que vous vous allongerez langoureusement pour tenter de capturer au lasso une fraise des bois égarée, tu sentiras une légère chatouille le long de la gambette puis, dans la foulée, les premiers effets de l’encéphalite à tiques et tu te diras que tiens, c’est bien la première fois que c’est toi qui a la migraine en de telles circonstances.

Au bout de quelques temps de cet entraînement, chaque édition du journal de la santé sera pour toi synonyme de vertiges, de sueurs froides et de tiens, j’ai pas un genre de boule, là ? ah non c’est un coude, pardon. Parfois, tout de même, tu trouveras ça un peu absurde, la vision qui commence à se brouiller après un reportage poignant et émouvant de 30 millions d’amis consacré au glaucome chez la truite saumonée, est-ce bien raisonnable ?

funiculi funicula

Thursday, April 24th, 2008

La brume cotonneuse nimbe la ville d’une dépressive aura automnale, mais un je-ne-sais-quoi de printanier embaume l’air, d’ailleurs y a des fleurs alors c’est bien la preuve. Un jeune homme, bien plus printanier que cotonneux, si tu veux mon avis, quitte son bureau à midi précises, car la scène se passe en Suisse et qu’on ne rigole pas avec ces choses-là. Il opte plutôt pour le libanais. Las, il trouve porte close. Mais il n’est pas homme à se laisser abattre et trouve une solution de repli, une sandwicherie américaine spécialisée dans le pain mou et le fromage aléatoire.
L’ambiance est vaguement orange et capillairement tecktonisée. La queue avance comme seules les queues savent le faire. Soudain, le moment qu’il attendait depuis de longues minutes arrive enfin. C’est à lui de parler. Heureusement, il s’était préparé bien à l’avance.

– Je vais prendre le menu salade.

Manger de la salade en ces lieux, c’est follement subversif, se dit-il. Et pourtant, la dame de la caisse ne se laisse pas impressionner.

– Sauce italienne ou française ?*

Et là, c’est le drame. Italienne ou française ? Comment choisir ? L’arôme délicat et envoûtant du vinaigre balsamique, son mariage subtil à l’huile d’olives pressées avec amour sur une gondole ? Des siècles de tradition culinaire se mêlant subtilement à l’envahissant modernité du lieu ? Il hésite. Comment trancher entre deux arts de vivre à la fois si proches et si éloignés. L’Italie c’est Rome, le soleil, les filles belles comme le soleil qui se lève sur la Toscane évanescente, les opéras de Verdi, les soirées pizza, le far niente. La France, c’est Melun, le cinéma français, la belote, les apéros de Verdi (c’est un bar pas mal)(ils font des apéros), le far breton. Si j’opte pour la française et que je digère mal, se dit-il, je pourrai toujours accuser le Cheeseburger, probablement suédois, les conditions de jeu déplorables, mais si je prends l’italienne, y aura peut-être un cadeau dedans, je me rappelle quand j’avais été en Italie, j’avais eu un cadeau dans mon croissant mou à la confiture, je l’avais donné à un enfant aveugle.

– Monsieur ? Il y a des gens qui attendent !

Derrière lui, la file s’allonge. Il sent la sueur perler à son front.

– On a faim, gronde la foule.

– Comment osez-vous vous plaindre, alors que des milliards d’enfants tibétains meurent chaque jour au Darfour ?

– Des milliards ?

– Oui bon, mais vous savez ce que c’est, avec Darfour, je positive**.

Il abandonne la foule à ses lazzis et se retourne vers la caissière fulminante.

– Je peux pas avoir un peu des deux ? Genre française mais avec des origines italiennes ? Ca doit être pas mal, ça, non ?

– Monsieur…

– On ne vous a jamais dit que vous étiez très fulminante ?

– Il faut vous décider ou j’appelle la police.

– Bon ben… française, déjà qu’ils ont perdu la coupe du monde sur un coup de tête.

– Frites ou potatoes ?

* Oui, faut être suisse pour comprendre.
** Je sais, mais je me dis que c’est peut-être plus clair la deuxième fois.

Je t’échange Behrami contre Cissé et Bayrou

Saturday, April 19th, 2008

Dans les médias suisses, pour une raison qui m’échappe, on essaie de nous faire croire que le monde, en attendant les championnats d’Europe de foot, ne vit plus que pour une seule chose, terminer son album Panini.

Du coup, j’ai décidé… Non ben non, pas de collectionner les Panini, sois sérieux 5 minutes. J’ai décidé d’arrêter de ressembler à une vignette de l’album Argentina 78 et je me suis donc rendu dans un salon de coiffure.

Où on ne m’a pas tendu d’album Panini mais un catalogue de coiffure. Ca ressemble beaucoup, sauf que les gens sont déjà collés et que y a pas les écussons des pays.

Dans les salons bas de gamme, on te demande “Je vous les coupe comment?”, tu réponds “euuuh…courts?” et ça suffit. Dans les salons classe, on te file un catalogue. C’est plein de beaux gosses (je crois, sinon ils feraient pas mannequins mais palefreniers, comme vous et moi) avec des tas de coupes de cheveux mode, tu as l’impression que des danseurs de tecktonik se sont rendus à un concert d’un groupe pop anglais, je sais plus lequel, je les confonds tous, mais un de leurs morceaux a été repris pour une pub, avec quelques racailles qui sont restées de l’an dernier. Tu optes plutôt pour le britpoppeux (non, pas Pete Doherty, je te dis que j’ai été chez le coiffeur, pas chez l’équarrisseur).

Tu te dis quand même qu’ils ont tous l’air un peu tarte, dans ce catalogue et ça te fait plaisir, les beaux gosses à l’air tarte sont quand même vachement rassurants, tu te dis que y a une justice quelque part. Alors que les beaux gosses type sympa, intelligents que malgré tous tes efforts tu n’arrives pas vraiment à détester, en plus en général, ils savent jouer de la guitare, te feraient douter de l’existence de dieu si tu n’étais déjà rosilicorniste convaincu.
Par contre, tu te demandes si toi aussi, tu vas finir avec l’air crétin, si c’est le prix à payer pour avoir l’air fashion. Tu te souviens vaguement d’un passage à London où, effectivement, dans le magasin hype et trendy où tu t’es réfugié pendant une des 247 averses de la journée, les vendeurs avaient l’air très très tarte, mais comme c’est des anglais on dit pie alors ça va, et tu te surprends une fois de plus à attendre avec impatience le retour du grunge. Tu te dis que la mode, c’est quand même la meilleure preuve de l’absurdité de la vie, tous ces gens qui tiennent à avoir l’air tarte en même temps.

Puis au bout d’une demi-heure de coups de ciseaux et de rasoir, de discussions laborieuses sur la météo et la géographie, et 13 tonnes et demi de cheveux au sol, on te tend un miroir et là tu te rends compte que tu as vachement la même gueule que la dernière fois, quand tu avais juste demandé court, alors franchement, est-ce bien la peine d’infliger des catalogues Panini à tout le monde ?

Séquelles et No

Friday, April 4th, 2008

Sinon moi, dans la vie, je suis Genevois. Pas un vrai de vrai, mais quand même. Pour situer, le vrai de vrai Genevois, il sort de temps en temps de sa ville pour les vacances ou pour aller à la campagne, le week-end, à Carouge, mais si tu le forces à rester outre-Allondon un peu longtemps, la pollution lui manque, il suffoque, il blêmit. Moi, la vie m’a expliqué un jour comme ça que j’allais devoir m’installer vachement plus loin que Versoix, au début j’ai eu un peu peur, mais finalement je me suis rendu compte que c’était plein de gens très sympas.

Par contre, j’ai gardé quelques habitudes. J’ai un sourire condescendant quand quelqu’un s’extasie sur le jet d’eau. Je dis 80 et pas 80. Je considère qu’Annemasse et le Salève, c’est un peu à moi. Je connais le début du Cê qué laino par coeur. Et puis, depuis quelques années, j’aime le hockey plus que le foot.

Parce qu’à Genève, avant, on avait une équipe de foot. Elle est tombée tellement bas qu’ils sont obligés d’utiliser son stade pour des concerts de Tokio Hotel. Déjà, engager Karembeu et un escroc pour se sauver c’était pas glorieux mais faire venir un chanteur fraîchement amputé des cordes vocales, comment veux-tu ? Maintenant, à la place, on a une équipe de hockey. Et en toute objectivité, c’est vrai que le hockey c’est nettement mieux que le foot.

Pas en tant que joueur, hein, malheureux, c’est un blog sérieux et responsable, ici, je suis pas en train de t’inciter à faire du sport. Surtout pas un sport à base de patins. Ou alors du patinage artistique, et tu m’envoies des photos de toi dans ton costume à paillettes, ça me fera rêver. Mais en tant que spectateur, un peu bête et chauvin mais pas trop, le hockey, c’est mieux. Déjà, tu remarqueras que les hockeyeurs ne passent pas leur vie à se rouler par terre, sinon ils attrapent des pneumonies.

Et puis le supporter, au hockey, il a des avantages. Parce que c’est vrai, quand tu es supporter, l’arbitre n’est jamais bon. Il siffle contre nous, c’est n’importe quoi, il siffle contre les autres, ce n’est que justice. Mais en hockey, comme les règles sont plus compliquées, des fois on a le droit de se jeter dans son adversaire mais des fois pas, et qu’en plus tu passes les 3/4 du match à ne pas tellement savoir où est le puck, c’est quand même nettement plus facile d’être de mauvaise foi. C’est des fois frustrant, cette histoire de puck, par contre. Au hockey, ils sont obligés d’allumer une lampe rouge quand il y a but, comme ça les supporters savent qu’ils doivent être contents même si, au fond d’eux, ils ont un peu de chagrin, ils étaient persuadé que le palet était première porte à gauche et non, apparemment, selon les dernières informations, il serait dans le but sans qu’ils aient rien vu venir. Par contre, comme il y a trois tiers-temps, ils ont deux fois plus d’occasions de boire de la bière pour se consoler, c’est bon pour l’économie.

Pour le journaliste aussi, le hockey, c’est mieux. Parce que le hockeyeur, sous ses dehors de brute épaisse, est resté un grand enfant. Il aime donner des noms d’animaux à son équipe. Du coup, les Aigles, après avoir battu les Dragons, vont manger les Lions alors que les Abeilles ont perdu contre les Pandas roux. Forcément, pour la métaphore, c’est plus pratique que le FC contre l’AJ. Et comme force est de constater que le journaliste sportif manie l’envolée lyrique aussi bien que le carreleur le chalumeau, il est parfois super heureux de pouvoir meubler avec des histoires de serres, d’ailes et de rémiges.

Mais surtout, un sport où la Suisse bat régulièrement la France, c’est quand même classe.

Pour votre santé, évitez de manger

Wednesday, March 19th, 2008

Ce jour là, il était midi. L’estomac dans l’étalon, je me décidai à aller dîner, enviant secrètement mes amis français qui, grâce aux 35 heures, à l’héritage déplorable de mai 68 et à Jérôme Kerviel, pouvaient se permettre, à la même heure moins le décalage horaire, d’aller déjeuner.

J’aurais pu, oh oui, j’aurais pu (je trouve que ça rajoute au côté dramatique, non?)(mais si), aller chez le libanais sympa, chez le chinois rigolo (dans les chinois, ils engagent toujours des gens qui parlent super mal la langue du coin (sauf en Chine je crois), pour faire plus traditionnel)(le chinois suisse allemand est un concept merveilleux)(par contre, ils ont des pouvoirs magiques et apparaissent à côté de toi au moment même où tu renonces à attraper le dernier petit pois et où tu reposes nonchalamment tes baguettes dans l’assiette)(et ils ont des aquariums)(et des sculptures en carotte), chez le japonais, chez l’américain traditionnel, qui sert une super recette de là-bas à base de pain, de viande, de graisse et d’un truc vert appelé cornichon mais ça va, je ne suis pas dupe, je sais pas si tu as déjà vu des cornichons, mais ça ressemble pas à ça, chez l’italien moins bien que les vrais voire chez le norvégien manger des fjord goût vanille.

Oui mais il pleuvait sur Brest ce jour-là, ça tombait bien, je n’étais pas à Brest mais ça tombait bien ici aussi, la pluie, je veux dire, elle tombait bien, avec une aisance et une grâce naturelles à faire pâlir d’envie bien des patineurs artistiques, et tu me connais, je veux pas trop me mouiller. Du coup, la mort dans l’âne, je me suis rabattu sur l’horrible boui-boui dont la principale qualité gastronomique est d’être à 2 minutes chrono du bureau, 1 minute 30 par grande pluie. J’approchai, subjugué par le halo saturé en graisses qui semblait entourer l’établissement. A l’intérieur, l’odeur si typique du fennec mort depuis longtemps, qui, telle une madeleine de Proust, me rappelait l’époque à jamais révolue où je mangeais à la cantine de l’école, mais une madeleine un peu rassie, quand même, était légèrement masquée, grâce à la présence salutaire d’un sympathique Saint-Bernard, que nous appellerons Olga, occupé à s’ébrouer nonchalamment après une vivifiante promenade apéritive sous la pluie battante.

Le plat du jour, je men souviens comme si c’était hier, consistait en une viande en sauce munie de légumes et même, comble du luxe, accompagnée d’une salade. Les experts du fbi à qui j’ai immédiatement envoyé un échantillon penchent pour du boeuf, ou de l’okapi. Dans la sauce, je veux dire. Pour la viande, tout ce que l’on sait, c’est qu’elle serait d’origine animale. Le moment où l’on me demanda “pour la salade, sauce italienne ou française” correspond, c’est amusant de le constater, avec une vague de suicides sans précédent à Rome. Alors que je m’apprêtais à finir mon assiette, à 5-32 fourchetées près, la truffe d’Olga si suavement posée à 11 millimètres de mon coude me fit penser que il y a des gens qui meurent de faim, dans le monde, ils seraient heureux d’avoir de la sauce italienne ou française, je vais leur envoyer un doggy bag. Doggy, c’est bien le matériau ?

C’est au moment de prendre un café, car je suis courageux et aventureux, que l’on me posa cette question, cruelle,voire pernicieuse: “Ca vous a plu?”

***

Post tenebras scriptum: à propos de gastronomie, si d’aventure vous seriez du côté de Lyon, il y a ce week-end une incroyable soirée de la francophonie, vendredi, à Oullins, en présence de nombreux blogueurs francophones beaux et ombrageux comme la pluie en été, au moins, et qui présentent l’amusante particularité d’avoir participé au livre “Tempus Fugit”, dont un type plus ou moins connu a dit “Pas mal”, et samedi, un tempétueux café littéraire, avec plus ou moins les mêmes, ou pas, bref, si tu es du côté de Lyon, chante, danse et mets tes baskets, viens, c’est sympa tu verras. Les détails techniques sont ici. Et si tu n’as pas encore acheté le livre, crois-moi, tu t’en mordras les doigts dans 150 ans. Et si tu n’es pas du côté de Lyon mais que tu aimes bien la francophonie, tu peux aller demain, en plus c’est le printemps, sur le fabuleux blog des journées de merde. Mais tu peux y aller aujourd’hui aussi.

J’suis pote avec des mots pourtant infréquentables

Sunday, February 24th, 2008

Si un jour y a des gens ils te disent, comme ça, l’air de rien, t’as du talent, tu devrais écrire, fais semblant que tu as compris “tu as des talons, tu devrais les frire”. Ou fais semblant de pas les connaître. Réponds leur qu’un jour, quelqu’un a dit ça à Michael Crichton et t’as vu où on en est, avec leurs conneries ? Critique Marc Lévy aussi, même si t’as jamais rien lu de lui et eux non plus, c’est pas grave, ils comprendront.

Parce que si tu les écoutes, tu vas commencer par devoir avoir des idées. Des idées que personne n’a jamais eues avant toi (non arrête avec Marc Lévy, je t’ai dit, je connais pas), ou alors autrement. Du coup, arrête de lire, définitivement, sinon tu vas bien finir par te rendre compte que cette histoire de martiens qui envahissent la terre pour découvrir le secret des madeleines et finissent par balancer l’anneau, ça a comme un air de déjà vu (en français dans le texte).

Ensuite faut commencer par faire un plan. Un plan, bordel. Un peu comme si tu savais déjà où t’allais passer tes vacances le mois prochain, tu vois ? Les plans, ça va pour les gens qui disent “non mais on va refaire le toit avant d’acheter une nouvelle voiture”, mais ces gens-là, c’est pas des poètes dans la tête, si ? Et pourtant, après, quand t’auras ton Goncourt, tu pourras dire des conneries genre je me suis laissé porter par mes personnages, l’histoire a complètement dévié pour vivre par elle même, mais pour ça, il te faut quand même un plan, alors que même pour aller à Chaffois tu hésites.

Ensuite, il va falloir t’y mettre, jeter tes mots sur le papier comme on jetterait des pandas sur un damier, mais je vois pas trop pour quoi faire, te relire, te dire que bordel de merde c’est pas moi qui ai écrit ça, je dois avoir un petit frère de 8 ans en secret. Et faut bien avouer que la technologie moderne a fait perdre toute sa poésie au moment où tu balances rageusement ton brouillon dans un coin de la pièce.

Le truc emmerdant, c’est que pour devenir écrivain, faut être solitaire et torturé. Obligé. C’est pour compenser le fait qu’après on va te dire vos mots m’ont trop trop touchée, surtout la métaphore avec les petits lapins, emmenez moi danser sous les sunlights des Tropiques. Donc si tu es plutôt du genre amical et enjoué, faut arrêter tout de suite. “Salut, tu peux venir m’aider à déménager, samedi?” “Ah ouais, j’adorerais, mais je suis solitaire et torturé, tu comprends?” Par contre quand tu vas marcher par monts et par vaux pour te retrouver seul avec toi même, évite plutôt les monts, ça grimpe et c’est plein de veaux.

Puis réalise que ton futur best seller fait 7 pages, remerciements compris et que ton plan est suivi jusqu’à la corde. Tu as beau réfléchir à une description et éventuellement à un oxymore, ça reste plus guère épais que Crime et Chatoiement. Du coup, tu t’y remettrais bien, mais y a un truc super intéressant à la télé, ça parle de chasse et de pêche.

Si un jour y a des gens ils te disent, comme ça, l’air de rien, t’as du talent, dis leur que c’est gentil mais demande à tes vieux, la prochaine fois, de plutôt te refiler le gène de l’horticulture, parce que bon.

Chapi Chapo au Congo

Friday, January 25th, 2008

Lectrice, lecteur,
Il est, dans la vie du blogueur bleu, des jours, merveilleux et cristallins, où les mots courent sur le clavier comme un faisan sur les grands boulevards.

Mais il en est hélas d’autres où les idées sont aux abonnés absents, prière de rappeler plus tard. Inutile alors de chercher désespérément un sujet, cela ne fera qu’empirer le problème car, comme le disait souvent Lao-Tseu les soirs de match, plus tu pédales moins vite, plus t’avances moins fort.

Et d’autres jours, bien plus pernicieux (pernicieux, adj., de Pernaud, animateur de journal télévisé: Moralement nuisible), où les idées se bousculent au portillon comme des petits ragondins affamés en train de tenter l’ascension du col du Portillon par la face Nord, mais où les mots pour le dire restent coincés dans ledit portillon, comme des sardines resteraient coincées le samedi soir dans une boîte hype de Bussigny. L’esprit peut-être embué par la déconfiture de tes compatriotes (Roger a enfin perdu, Stéphane commence à muer), tu te hasardes à un vague jeu de mots sur déconfiture (abricot-framboise) avant de renvoyer ta fébrile tentative d’exister pour quelques heures dans l’immensité netvibienne aux calendriers Pirelli grecs. Les brouillons s’entassent dans la partie brouillons de ton moteur de blog, qui est quand même bien foutu, y a pas à dire, et tu songes non sans émotion aux archéologues qui les redécouvriront dans une onzaine de siècles. Ou alors au jour où tu vas enfin te décider à tous les effacer, à la limite.

Ces jours-là il n’est, ma foi, pas grand chose à faire. Une seule solution s’impose. Facile, diront les uns, lâche, diront les autres, je vais le prendre en trois briques, aspirateur, diront les fans de Laurent Broomhead, car je sais qu’il en reste, même si, en cette période consumériste et iconoclaste, trop rares sont ceux capables de s’enthousiasmer pour un homme capable de plaquer la gloire et Pépita pour aller lancer une chaîne de télé exclusivement dédiée au culte du poney.

Une solution de facilité, donc, penserez-vous et pourtant, croyez bien qu’il m’est très difficile d’y avoir recours. La mort dans Lââm, irais-je même jusqu’à ajouter si je savais où c’est, ajouter.

chaton bronzé

Un cambrioleur à Stans

Tuesday, November 27th, 2007

Faut le reconnaître, tu as bien joué ton coup, avec culot et sang-froid. Maintenant, bon, j’ai beau aimer Brassens, je vais avoir du mal à te faire des éloges. Parce qu’avec tes conneries, j’ai dû ressortir mon vieux pc du placard. Il souffle comme un ancien fumeur au huitième étage d’un gratte-ciel sans ascenseur, il se met à ramer dès que j’essaie de lui faire faire des trucs trop compliqués, genre envoyer un mail, bref, je me rappelle un peu pourquoi j’en avais changé.

A cause de toi, j’ai dû changer tous mes mots de passe de peur que tu ne joues mes parties de tout le monde veut prendre sa place, parce que franchement, ça me gênerait que tu fasses 30 points sur un questionnaire Miou-Miou ou Maquillage sous mon nom. D’ailleurs, bon, j’espère bien que tu vas te dépêcher de formater le disque dur, la relation voleur-victime éplorée qui nous unit n’étant, à mon avis, mais tu vas peut-être me trouver vieux jeu, pas assez intime pour que j’apprécie que tu termines ma partie de Football Manager, regardes mes photos de chatons ou lises mes vieux spams. La collection de mp3, c’est bon, tu peux garder, voler des trucs volés je crois que ça annule.

A cause de toi, j’ai dû supporter des tas de yaka, ces gens charmants qui savent tout mieux que toi ce que tu aurais dû faire, mais après, je sais pas si on en rencontre aussi dans ton corps de métier?

D’un côté, tu vois, je te comprends. Moi, par exemple, le seul truc que je sais faire c’est écrire. Je suis devenu journaliste: c’est pas très courageux. Toi, petit voleur, t’as choisi la voie de l’artisanat au lieu de finir assureur, avocat ou délégué du conseil d’administration. C’est tout à ton honneur.
Le truc c’est qu’à mon avis, tu t’es trompé de cible. Déjà, de nos jours, voler un PC qui a déjà quasi une année, c’est con: ça perd tellement vite de valeur que le prix auquel tu vas le revendre n’est probablement même pas égal à ce que je dois encore payer pour qu’il soit enfin à moi. Mais le plus grave, tu vois, c’est que les témoins de mon infortune n’étaient même pas étonnés, alors que moi, je vivais encore dans un monde où on pouvait tranquille laisser son protable cinq minutes le temps d’aller se chercher un café et que le risque de se le faire chourrer, c’était juste en période de campagne électorale ou à l’heure du journal de Pernaut.

Mais là, avec tes conneries, le risque, c’est qu’un jour je devienne de droite surtout que je suis persuadé que tu es étranger dans au moins une centaine de pays, alors c’est bien la preuve. Bon, ok, j’extrapole, va falloir encore que tu me voles mes chaussettes et ma collection de pandas pour que je bascule du côté obscur, mais tout de même, tu as déséquilibré durablement la balance de mes convictions. Or, plus y aura de gens de droite, plus y aura de caméras de surveillance et de polices et tout le tintouin, moins la vie sera facile pour tes collègues et toi. Ca me semble assez logique, comme raisonnement, non? Donc la prochaine fois, franchement, fauche son pc à un mec déjà de droite et qu’on n’en parle plus.

Tout mon passé dans trois cartons

Saturday, September 29th, 2007

Des fois dans la vie, tes parents déménagent, et t’as beau leur dire que c’est un peu déplacé et que c’est pas comme ça que tu les a élevés, y a bien un moment où il va falloir te résoudre à retourner dans ta vieille chambre, celle où tu as amené tes premières conquêtes mais pas tant que ça à cause d’une bête histoire d’opticien aux conseils aléatoires, celle où tu avais tant de rêves et d’espoirs comme par exemple finir le niveau de Lemmings sobrement intitulé Postcard from Lemmingland (depuis ça va mieux mais t’as passé les deux niveaux suivants avant de te rendre compte que tu tombais de Charade en Sicilia), celle où t’es parfois rentré dans des états aléatoires alors que on y montait par une échelle et franchement, c’était acrobatique, celle où maintenant y a 3 tonnes de poussière sur les vestiges de ton passé qu’on dirait un peu un Pompeii en miniature, mais sans lave ni gens morts.

Tu fouilles dans tes vingt ans et j’aime autant te dire que c’est un peu le bordel, tu retrouves des photos de cette époque lointaine où on devait envoyer le film à développer et, franchement, des fois ils ont dû avoir un peu peur, les pauvres, et tu te demandes si tu dois prévenir les copains que tu as retrouvé ces photos là, parce que ils commencent à devenir pères de famille et ingénieurs et tout, y a peut-être moyen de se faire de la thune avec ça.
Tu fouilles dans tes vieux bouquins, les livres dont vous êtes le héros, les bd que tu as relues 600 fois, les cd de mauvais metal et tu te dis que si tu pouvais croiser ce jeune homme que tu étais y a 10 ans, tu fuirais en courant non sans lui conseiller de faire un truc pour cette histoire de lunettes, puis tu trouves une vieille collection de magazines, Marco Grassi explique pourquoi il revient en Suisse et Moulinex fait une blague avec des mérous, mais toi tu jettes quand même tout ça dans le sac du vieux papier qui pèse un cachalot parce que tu as rien retrouvé d’intéressant dans tes vieilles notes d’étudiant et c’est un peu l’impression que ça t’avait laissé quand même, à part que tu réalises que t’étais déjà aussi con à l’époque, malgré tes lectures aléatoires, par exemple tu écrivais “l’arrêt vocation de Lady de Nantes” dans tes notes d’histoire, c’est très facétieux, et tu te dis que tu pourrais poster un texte de quand t’avais 20 ans sur ton blog, pour voir, mais ces ingrats risqueraient de le trouver meilleur que ce que tu ponds maintenant.

Tu te demandes quand même si il faut garder les livres sur les animaux, parce que depuis y en a au moins 37000 qui ont disparu, mais quand même, 20 ans après les avoir lus tu peux encore te la péter grave quand tu regardes le jeu avec Nagui et que la réponse à la question 3 c’est Gérard de Narval, cash.

Et là, alors que tu viens de remettre la patte sur une photo bien sympa, mais pas celle avec les poneys, tu commences à avoir les yeux rouges et le nez qui coule et tu te dis, quand même, je suis très nostalgique, comme gars, puis tu te demandes si la nostalgie, ça peut faire éternuer, et c’est juste au moment où les pompiers arrivent que tu te rappelles que tu digères pas bien la poussière.