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Dans mes chaussettes, t’as regardé ?

Tuesday, April 12th, 2005

Il n’y a pas de sot métier, dit-on souvent, pour consoler les vendeurs de machines à fabriquer les roues dentelées servant à construire les composants des chenilles de tractopelles.

Mais il y a tout de même des métiers qui, à défaut d’être sots, sont un peu moins gratifiants que d’autres.

Souvenez-vous, il y a longtemps, avant qu’on parle d’Europe, il y avait des types en casquette dont le boulot était d’empêcher qu’on vole les frontières. Et bien, ils existent encore, mais ils sont tous autour de la Suisse.

Douanier, donc, c’est pas un boulot super funky. Gamin, on rêve d’être aventurier, princesse, pompier, cascadeur ou éboueur, pas de passer ses journées à demander aux gens si ils ont des trucs à déclarer.

Mais bon. Suite à je ne sais quel alinéa de la vie, une déception amoureuse, un accident de vélo, un concert de hard-rock passé trop près des enceintes, un type décide de devenir douanier. Il est gentil avec les dames, il ne fouille que les jeunes et les gens un peu arabes, comme on lui a appris à l’école de douanisme, il fait même des plaisanteries de temps en temps et il porte la moustache.

Son fils Rodriguez, dix ans, admire son papa qu’il prend pour un genre de superhéros. SuperVospapierssiouplait. Avec Kevin, quinze ans, par contre, c’est plus difficile, il fait la gueule depuis qu’il n’a pas eu le droit d’aller en vacances à Amsterdam, où il voulait passer quinze jours avec des potes, mais pas pour se droguer, ni pour faire du lèche-vitrines, simplement par passion pour le peintre, là, celui qui a reçu un coup de téléphone pendant qu’il faisait son repassage et en a perdu l’oreille droite.

Et puis un jour, enfin, le douanier a son heure de gloire. C’est lui qui a arrêté des dangereux trafiquants, qui a démantelé un terrible réseau. Sa famille va l’admirer, sa femme qui était partie avec un immigré clandestin moldave va revenir, ses potes vont lui payer l’apéro.

Il se voit déjà en haut de l’affiche, il imagine très bien Brad Pitt, ou à la limite Christian Clavier, jouer son rôle au cinéma.

Seulement, quelque part, il se dit que bon, à choisir, dans un monde parfait, il aurait pu causer la perte d’un trafic un peu plus reluisant que celui-là.

Faudrait voir pour pas pétouiller

Monday, July 19th, 2004

Quand on se promène d’un pied du Jura à l’autre pied du Jura, des fois, on passe par Goumois. Des fois pas, aussi.

Goumois, c’est un petit bled au fond d’un trou, entre Saignelégier et Maîche, qui ont quand même des noms rigolos. C’est aussi une douzaine de maisons, au bord du Doubs et un pont sur le Doubs. Et au milieu du pont une frontière. Une vraie, avec douanier qui demande zavez vos papiers et qui vous fait ouvrir le coffre si vous avez l’air un peu jeune et un peu étranger.

Même que si on veut déménager d’un côté à l’autre du pont, c’est la croix et la barrière. (surtout quand les lois changent au 1er juin et que le 19 juillet, les sites Internet officiels n’ont pas encore été mis à jour (où l’on comprend certaines idées reçues))A moins de faire du sport. Ou d’autres trucs.

Ca doit être sympa, la vie dans ce bled. Pour aller boire l’apéro chez le voisin, faut prendre son passeport (surtout si on a l’air un peu jeune et un peu étranger). Et faut faire des efforts intenses pour comprendre ce que dit le voisin, qui parle une langue barbare: il dit soixante-dix, petit-déjeuner ou encore serpillère, on n’a pas idée.

Comme ça, si on regarde pas trop attentivement, on a pas vraiment l’impression que c’est important, ce truc de frontières. Y a une jolie rivière, une colline d’un côté, une colline de l’autre. Et si on se place en haut d’une des collines, on voit pas vraiment que l’autre est une étrangère qui fait rien qu’à manger notre pain, tout ça. Même si, des deux côtés du Doubs, y a plein de gens qui sont persuadés que c’est super important. Rive gauche, on y tient même tellement que on s’enferme sur nous mêmes. Et rive droite, on est encore champions du monde bien longtemps après.

Et ça, c’est un truc qui risque pas de nous arriver, rive gauche. Sauf peut-être dans des sports plus anecdotiques. Par contre, on a inventé un concept bien pratique: la défaite honorable: “Ouais, bon, on a perdu, mais on a quand même pas trop mal joué, ou bien?”

C’est pourquoi, j’aimerais bien que vous votassiez la moindre pour moi, afin que ma défaite annoncée fusse honorable.

(Et oui, tout ça pour ça: je suis quand même mégatrop doué en circonvolutions, moi. Un pau comme le Doubs, quoi)