Aujourd’hui (bon ok en fait hier, mais je n’ai pas eu le temps de terminer mon article, j’avais les quinze ans des Pokémon à célébrer), l’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl fête ses 25 ans. Bonne fête à tous les enfants à trois bras. Une catastrophe ne venant jamais seule, cette semaine, nous fêtons aussi les dix ans de l’arrivée de la télé-réalité en France et, par effet collatéral, en Suisse romande, toujours très inspirée par les avancées culturelles de sa voisine.
Penchons-nous donc sur cette décennie et sur les nombreux apports de la télé-réalité à notre société :
La télé-réalité de type classique, celle où il ne se passe absolument rien, type “Loft Story”, “Nice People” ou encore “l’île des mots fléchés”, a réconcilié avec l’ennui tout une génération d’employés de bureau, a prouvé que la vacuité pouvait être sympathique, mais surtout, a rappelé à tout une génération traumatisée par des années de bons sentiments télévisuels à quel point c’est bon de se moquer. Et c’est à mon avis dans cette voie qu’il faut chercher l’avenir de l’armée suisse : 15 semaines, 200 candidats, beaucoup de temps perdu, des répliques culte comme “qui c’est qu’a pété” ou “établissez un hérisson front ma main”, chaque vendredi, le public élimine les plus mauvais et à la fin, ceux qui n’ont pas été capables de se faire éliminer gagnent un grade.
La télé-réalité de type karaokesque, façon Nouvelle star ou X-Factor, qui n’est pas un remake de Fear factor avec des stars du X, comme je le croyais, parce que je ne regarde plus la télé pour enfin devenir un bobo et manger des pizzas cool, qui nous a donné beaucoup de grands noms de la chanson, comme Cyril Cinelu ou Myriam Abel et a fait naître bien des vocations, par exemple à un moment, j’ai eu envie de devenir orthophoniste.
La télé-réalité de type réinsertif, celle où on va rechercher des has-been pour en faire des ringards et inversement, comme dans “Sortez-moi de là je suis une célébrité”, est une excellente publicité pour le recyclage, surtout avec l’apparition de la télé-réalité bi-réinsertive, qui recycle des anciens participants d’autres émissions.
La télé-réalité de type agricole, comme “l’Amour est dans le pré” ou “la Ferme célébrité”, a fait énormément, plus même que FarmVille, pour la réhabilitation de l’agriculture, profession nécessaire, belle et mal considérée. Et puis, à titre personnel, en tant qu’habitant plus ou moins récurrent de localités où l’on sent encore un secteur primaire bien présent, voir toutes ces exploitations sans que jamais l’odeur du champ fraîchement puriné ne vienne nous titiller les narines, j’aime bien.
La télé-réalité de type aventurier, Koh-Lanta spéciale Vanuatu ou Pékin Express sur la route des Andes, nous a permis de relativiser toutes ces histoires de géographie, si futiles à l’heure de la mondialisation. C’est grâce à elle qu’aujourd’hui, enfin, on accepte l’idée d’un Paris-Dakar en Amérique du Sud ou de Gruyère français.
Mais la télé-réalité de type aventurier a d’autres atouts. Elle nous familiarise avec l’idée de manger des insectes, si utile à l’heure d’enfourcher son vélo pour avoir l’air écolo. Et, surtout, elle redonne de l’espoir à bien des réalisateurs amateur : oui, il est facile de faire complètement oublier aux téléspectateurs que oui, là, au milieu de rien, dans ce désert hostile où l’homme est face à lui-même, il y a douze caméramans, un preneur de son, de l’éclairage, des mètres de câble partout et le sandwich du deuxième assistant réalisateur que sa maman lui a fait.
La télé-réalité de type incompréhensible, illustrée par mon émission préférée du genre, Le Royaume, a prouvé à tous les organisateurs de soirées jeux que plus de 47 minutes d’explication des règles, c’était pas une bonne idée.
La télé-réalité de type culinaire, comme Un dîner presque parfait et Top chef, prouve à tous les amateurs de junk food que c’est très simple de cuisiner un bon petit plat avec des ingrédients du marché, les mains dans le dos, une enclume attachée aux gencives et un jury impitoyable qui te lance des pierres.
La télé-réalité de type coachons, émouvante ode au quart d’heure de gloire dont tout le monde peut aujourd’hui rêver, où l’on vient t’expliquer comment te relooker, faire ton ménage, repeindre ton plafond en échange d’un petit quart d’heure d’humiliation publique.
La télé-réalité de type meetique, avec d’audacieuses émissions comme “l’île de la tentation” où des amoureux transis peuvent se prouver la fidélité de leur engagement, avec d’émouvantes émissions comme “Next” qui illustrent à merveille qu’on ne voit bien qu’av
La télé-réalité de type helvétique, celle qui essaie de ne pas être voyeuse, mais d’apporter quelque chose au téléspectateur, comme “Y a pas pire conducteur” ou “5 de der”, et qui finit invariablement par être extrêmement chiante, car on peut bien faire de la télé-réalité sans renier nos valeurs ancestrales.
Et puis surtout, n’oublions pas l’apport capital de la télé-réalité sur l’économie : sans ses innombrables stars éphémères, les trois-quarts de la presse people seraient en faillite, et les 112 chaînes du câbles ne sauraient plus quels invités exclusifs convier à leurs passionnants débats sur l’avenir de la saucisse dans l’aligot.