Je sais pas si tu as été dans un festival cet été. Si oui, tu as forcément vu Cali, le chanteur, (à ne confondre ni avec Cali des cailloux, la graphiste blogueuse peintre multi-talents, ni avec Cali de la météo, qui prend sûrement son métier très à coeur, ni avec Medellin) Il a chanté dans 8132 festivaux, dont celui de la chaussure en raphia de Béton-Bazoches.
Pour le reconnaître, c’est facile. Il court sur la scène en agitant le bras et en hurlant le nom de la ville où tu te trouves mieux qu’un gps.
Moi, jusqu’à y a deux semaines, je le prenais pour le dernier grand romantique. Malheureusement, par la faute de deux viles moqueuses, cette douce illusion s’est effondrée comme un château de cartes au soleil.
Mais quand même, j’ai encore un vieux doute. Maintenant qu’il ne chante plus l’amour, mais la révolution, Cali est-il plus proche de Che Guevara ou de Florent Pagny ? Pour le savoir, intéressons-nous aux paroles de “1000 coeurs debout”
Est-ce que tu vois, toi aussi, quand tu fermes les yeux,
Oui oh je te vois venir les yeux fermés. Mais c’est de la poésie. C’est profond. C’est beau.
quand tu serres le poing,
Haut vers le ciel,
Là encore, y a une ellipse.
est-ce que tu sens l’odeur délicieuse de la liberté
Par contre, on saura jamais ce que tu étais supposé voir.
Je signale au passage que si tu écoutes cette chanson en conduisant, n’essaie pas de serrer le poing haut vers le ciel les yeux fermés, ou ça va te pincer très fort.
Quand tu craches des soleils, la tête haute, dans le vent,
Ça aussi, il faut éviter. Quiconque crache des soleils contre le vent finit brûlé au troisième degré.
quand tu chantes à tue-tête
A l’amour qui revient
Ça c’est un domaine qu’il connaît bien, Cali. Avant, Cali, c’était des chansons d’amour. Sa nana partait, il était triste, elle revenait, il était content, elle repartait, il était content, elle revenait, déboussolé, il se demandait quand c’était, le bonheur. Elle partait et revenait tellement en l’espace d’un seul concert que des scientifiques norvégiens ont calculé que la durée moyenne d’une relation de Cali est d’environ 8 secondes 32. Du coup, pour son troisième album, celui de la maturité, il a décidé de faire la révolution.
, couronné de lauriers
Je ne vais pas faire durer le suspense plus longtemps, il ne terminera jamais cette phrase. Donc quand l’amour revient avec ses herbes aromatiques sur la tête, on ne sait pas ce qui se passe. Enfin immédiatement au moment où il revient, oui, on peut imaginer, quoique si tu chantes à tue-tête l’amour risque d’avoir la migraine, mais ensuite, on sait pas. C’est de l’ellipse poétique.
Nous sommes des milliers, un fleuve extraordinaire
Tu m’excuses mais des milliers, ça fait plus rivière que fleuve, quand même. Enfin ça dépend pour quoi.
Notre force est sublime, elle emportera tout
Voilà, pour tout emporter, comme un ouragan, qui passait sur moi, il faut être des dizaines de milliers, environ.
Et s’ils essaient encore ils se frotteront
Je ne sais pas qui est ce ils, et ce qu’ils sont supposés essayer, mais ça a pas l’air sympa.
à mille c�oeurs debout
Donc sur des milliers, il ne sont que mille à avoir le coeur debout. Je suis pas chirurgien mais je pense que c’est pas normal.
Le combat a fait rage, le combat était dur, il a fait des ravages
C’est écrit sur les rides de nos pères ivres de fierté, ils n’ont rien lâché, jamais
Il y a là la victoire qui nous tend des bras d’or
Et puis ces rues qui chantent et ces drapeaux dehors
Je te prendrai la taille et puis nous goûterons à ces instants de vie
Pour un mec qui change de petite copine aussi souvent, je le trouve un peu naïf, le Cali. Je veux dire, tu veux séduire une fille, tu lui dis viens, on va manger polonais, regarder un film ouzbek, je sais pas, mais si tu espères la prendre par la taille, tu l’emmènes pas faire la révolution, ou alors faut qu’elle soit sacrément gauchiste, quand même.
Nous sommes des milliers, un fleuve extraordinaire
Notre force est sublime, elle emportera tout
Et s’ils essaient encore ils se frotteront à mille c�oeurs debout
Ça, c’est fait.
Est-ce que tu entends l’écho noir du naufrage,
Quand la nuit gémissait, on rampait sous la peur
Je comprends pas, il l’a faite en bateau, sa révolution ? C’est imprudent.
Et la douleur des autres nous tenait éveillés
En même temps, quand tu rampes après un naufrage, tu as meilleur temps de pas t’endormir, sinon tu risques de te noyer très fort.
Est-ce que tu te souviens de l’enfant africain qui vivait en dessous
De ses parents raflés
Le bateau a méchamment dérivé, là.
Des fusils de la honte qui encerclaient nos écoles, je n’oublierai jamais
Alors autant je comprends bien qu’on n’oublie pas ça, autant j’ai du mal à vraiment saisir de quel événement on parle. A mon avis, Cali, il a dû faire toutes les guerres pour être si fort aujourd’hui. Il a dû faire toutes les guerres de la vie, et l’amour aussi.
Nous sommes des milliers, un fleuve extraordinaire
Notre force est sublime, elle emportera tout
Et s’ils essaient encore ils se frotteront à mille c�oeurs debout
Est-ce que tu vois, toi aussi
Quand tu fermes les yeux, quand tu serres le poing
Haut vers le ciel, est-ce que tu sens l’odeur délicieuse de la liberté
Moi, je trouve cette chanson très forte. Oui, Cali a le courage de le dire, la guerre c’est pas joli, la liberté c’est bien, Eric Nollot est méchant. Mais comme il est prudent, il commence avec des causes faciles. Quand tu cries merde à Franco, tu peux partir du principe que les gens seront relativement d’accord avec toi. C’est le niveau 1. Pour la tournée suivante, il s’attaquera à des thèmes plus audacieux, fi à Charlemagne, bouh à Napoléon, à bas Alexandre le Grand.