La programmation du Paléo est sortie hier. Je te préviens d’entrée, si tu es jeune, branché et hype, il te faut la critiquer: “Han vraiment, je mets plus les pieds dans ce festival de beaufs, j’y crois pas, ils ont même pas invité Roultaboul et les Banaboo, vraiment c’est devenu trop commercial, je préfère les festivals qui ont une âme comme Benicasim ou Roskilde”.
Parmi les groupes invités du Paléo, cette année, les BB Brunes, un groupe dont le premier album, Blonde comme moi, a fait un malheur. Un groupe très vite adopté par des fans en délire, au point que je compte un peu sur eux pour relancer le marché des commentaires incompréhensibles, même si je m’y prends peut-être un peu tard. Un groupe qui, si j’en crois la très sérieuse Wikipedia, doit sa carrière à Luis Rego, c’est dire.
Nous allons aujourd’hui nous intéresser, si vous le voulez bien, chers amis de la musique et de la gastronomie, au single Dis-moi sorti en juin 2007, ça ne nous rajeunit pas.
Les BB Brunes tirent leur nom de leur passion: la coiffure, ce qui peut sembler étonnant si, pour toi, la rock’n’roll attitude c’est avant tout Slash et Kurt Cobain. Mais n’oublions pas qu’avant eux il y a eu Dick Rivers. De plus, la coiffure est, la tecktonik et Jilian le prouvent hélas, un thème central des préoccupations des jeunes d’aujourd’hui. Il faudra t’y faire, il y a eu la chanson engagée, place à la chanson dégagée.
Bref, dis-moi.
Moi.
Une légère envie de violence quand elle relace ses bas
Donc le narrateur de la chanson, Benedikt Brunes, est coiffeur, il fait la conversation à une cliente, il est justement en train de lui parler de ses problèmes conjugaux: sa jeune épouse, Bernadette Brunes met toujours un temps fou à relacer ses bas, lui au début ça le délassait mais maintenant ça l’énerve, limite il lui foutrait des claques.
Je ne suis plus à vendre, Houna, je n’ suis plus comme ça
Soudain, affolé par l’énormité de cette révélation, il change de sujet. Il avait pensé vendre son salon, peu rentable, et se lancer à corps perdu dans la conchyliculture mais il a changé d’avis, il n’est plus comme ça.
Des rumeurs adolescentes disent que je ne suis pas
A toi
Des adolescents prétendent qu’il aurait d’autres clientes.
et je pense qu’une part de vrai se cache
Il ne le nie pas. Et en profite pour faire une litote, ce qui est moins classe qu’un zeugma, mais bien quand même.
{Refrain:}
Dis-moi si j’dois partir ou pas
Il hésite, tout de même, devrait-il vendre son salon, alors que les affaires commencent à marcher, devrait-il le garder ? Il est indécis (notez dans ce passage le subtil hommage aux Clash)
Dis-moi ! ouh ouh
(Notez, dans ce passage, le subtil hommage à Dorothée)
Dis-moi si tu aimes ça, Houna
Il a fini son travail et tend un miroir à sa cliente pour qu’elle lui dise si elle trouve ça assez dégagé.
Car je suis fou de toi, Houna
Quand tu n’ m’appartiens pas !
Soudain, il avoue à sa cliente qu’il éprouve un léger béguin pour elle, surtout quand elle décide d’aller se faire couper les cheveux au salon d’en face, un peu plus cher mais les coiffeurs sont moins bavards.
Une violente envie de descente lorsque t’embrasses ces gars
Du coup, il est tellement jaloux quand elle embrasse ces gars, c’est plus fort que lui, qu’il descend à la cave rechercher du gel.
Je n’ferai point l’enfant, tout ça ne m’atteint pas
Mais il prétend s’en foutre comme de sa dernière coupe au bol. Surtout qu’il a d’autres soucis.
Des rumeurs adolescentes disent que je ne suis pas
Un homme à femmes
En effet, dans les couloirs du lycée voisin, il se murmure qu’il n’aurait jamais passé son examen de coiffeur pour dames et donc qu’il exercerait illégalement le brushing. Une bien pénible affaire.
et rien d’autre qu’un homme à toi !
Notez au passage que les rumeurs adolescentes maîtrisent super mal l’art ancestral de la double négation. Je ne suis pas rien d’autre qu’un homme à toi signifie qu’il est autre chose, aussi. Ou pas.
{au Refrain}
Quand tu me mords où ça dérange
Et tu m’attaches les bras
C’est un salon SM. Ca se fait beaucoup à Paris. Je crois.
Quand je fais sautiller sa frange
Ses cris se tirent dans les graves
Tu m’étonnes qu’avec les bras attachés, sa frange soit loupée !
Quand les voyeurs en redemandent
Moi, je ne veux que Houna
De plus belle,
Beaucoup de jeunes fétichistes capillaires (ça se fait beaucoup à Paris) viennent le regarder couper les cheveux, ils trouvent ça très sensuel. Tu noteras au passage que le chanteur est un peu incohérent, il parle soudain à sa cliente à la troisième personne.
des plus belles jambes
Et de la place pour trois !
Et alors qu’ils étaient en train de s’attacher les bras, il lui annonce qu’il compte agrandir son salon de coiffure histoire de pouvoir accueillir jusqu’à trois clientes à la fois, ce qui lui permettra de parler à la troisième personne sans passer pour un demeuré, et se lancer également dans l’épilation gambettale.
Dis-moi si j’dois partir ou pas
Dis-moi ! ouh ouh
Dis-moi si tu aimes ça, Houna
Dis-moi ! ouh ouh
Dis-moi ! Non, je ne craquerai pas
Il se montrera très courageux si elle lui dit que sa coupe est toute ratée. C’est bien. C’est un beau message d’espoir.
Dis-moi ! ouh ouh
Dis-moi si tu aimes ça, Houna
Car je suis fou de toi, Houna
Quand tu n’ m’appartiens pas !
Voilà. La chanson est finie.