Archive for September, 2008

Je suis Philippulus le prophète

Wednesday, September 10th, 2008

Tu es probablement au courant, mais aujourd’hui, c’est la fin du monde (pour une explication scientifique, voir cet article très documenté). Pas seulement pour Raymond Domenech.

Très bien. La fin du monde, c’est quand même pas un truc qui arrive tous les jours. Il faut donc l’occuper intelligemment. Intelligemment, ça veut aussi dire avec prudence. On a vu trop souvent, par le passé, des gens profiter d’une fin du monde pour dilapider leur fortune, avouer à leur patron qu’il leur arrivait parfois d’aller sur internet pendant les heures de travail pour regarder des photos de licornes devant un coucher de soleil ou, plus pragmatiquement, se suicider collectivement, avant qu’on leur annonce que oops, désolé, c’était juste une erreur de calcul, mais promis on fera mieux la prochaine fois, LOL ^_^ c’est Henri qui a oublié une virgule, la comète qui devait annihiler toute vie, en fait, elle était pacifique, mais vous inquiétez pas, on lui infligera un blâme, pour que tu te mettes à profiter de ta fin du monde de manière trop démesurée.

Le mieux, c’est de faire un truc que tu as toujours eu envie de faire mais que quand même tu pourras encore regarder ta femme, vos onze enfants et Gaspard, votre labrador nain du Pérou, en face le matin en partant au travail si d’aventure, ce coup-ci encore, c’était du flan. Genre du saut à l’élastique, un sudoku force 4, une quiche ou encore aller à Besançon. Si jamais tu croises un truc noir qui grandit à une vitesse exponentielle, il te restera toujours deux ou trois pico-secondes pour, une dernière fois, faire sauvagement l’amour avec ton voisin le plus proche (oui, même si tu as choisi la solution Besançon, ça doit être possible).

Et si d’aventure tu es entraîneur de l’équipe de France et que par une étrange coïncidence tu perds ce soir, “je sais pas ce qui s’est passé à un moment on a été comme avalés par une puissance mystérieuse et on s’est retrouvés dans une réalité parallèle où on jouait comme des chèvres” me semble 100 fois meilleur comme explication que les “c’est incroyable ils ont eu que deux occasions et ils en mettent trois au fond” ou “Estelle épouse-moi” habituels.

Attention, l’abus de mauvaise presse est dangereux, consommer avec modération.

Monday, September 8th, 2008

Si tu lis la presse romande, tu sais ce qu’est un botellón et tu es inquiet pour l’avenir de notre belle jeunesse. Si tu ne lis pas la presse romande, je t’explique, en gros: un botellón, c’est des grands rassemblements de jeunes qui apportent chacun leur bouteille, de préférence d’alcool, pour les boire. Je te linke l‘article wikipedia, mais vraiment, vraiment, ça soulève le coeur, comment tolérer que des jeunes qui, pourtant, ont été éduqués dans le respect et l’amour, puissent se permettre de mettre du coca dans leur vin rouge ?

Car, vois-tu, les jeunes boivent de l’alcool, et c’est terrible.

Alors oui, oui, je vois ton sourire narquois. C’est vrai que quand on avait 15 ans, nous aussi, il pouvait nous arriver, dans un instant d’égarement passager, de boire un verre d’alcool ou douze. Mais ce n’était pas pareil. Rien à voir. Oui, ok, on s’est mis deux trois murges mémorables (enfin mémorable n’est peut-être pas le mot le plus approprié, d’ailleurs). C’est vrai que des fêtes où chacun amène sa bouteille d’alcool, ça existe depuis longtemps, la semaine passée j’ai été invité à manger chez mon ami Oswald, j’ai amené une bouteille de rouge, personne n’en a parlé dans la presse. Pourtant, y aurait eu de quoi, mais je dis ça, je dis rien. Mais quand même. C’était une super bonne bouteille, j’estime. Et rien, même pas une brève en dernière page du quotidien local. Alors que entre nous, ce qu’il a servi à bouffer, c’est bien simple, je lui ai mis 2 points, mais quand même 5 pour la déco parce qu’il avait une nappe avec des jolies fleurs, dessus, des hyacinthes, ou alors des fougères, je sais pas.

Quand on était jeunes, donc, il pouvait nous arriver de nous soûler un peu, comme ça, par inadvertance. Mais ça n’avait rien à voir avec ce qui se passe aujourd’hui. Parce que c’était une époque heureuse et bénie où on pouvait tranquillement tester le baileys-vodka-limonade sans que personne ne prenne de photos. Comment veux-tu que notre jeunesse, qui est l’avenir de demain, se construise une identité dans un monde où, si tu ne te souviens plus de ce que tu as fait la veille, il y a demi-douzaine de vidéos sur youtube pour te le rappeler ? Dans un monde où, au lieu de tranquillement avoir la gueule de bois en te disant je ne boirai plus jamais, tu dois passer ta journée à détaguer 3600 photos (dont 3558 très floues, mais tout de même) sur facebook en te disant je ne boirai plus jamais ? Dans un monde où, au lieu de faire des théories à des inconnus dans le même état que toi, tu envoies des sms abscons à ta prof de piano, ce dont tu te souviendras au moment de sa réponse à 8 heures le lendemain et elle est toujours aussi forte cette sonnerie parce que là tu as l’impression qu’on vient de t’arracher un bout de cerveau ? Et dans un monde où tu peux même plus organiser des beuveries tranquille sans qu’un journaliste de gratuit en manque d’indignations gratuites ne débarque en hurlant “chouette, je vais pouvoir mettre un sondage demain dans mon journal, êtes-vous pour ou contre l’alcoolisme ?”

Moi, si j’étais les jeunes d’aujourd’hui dans ce monde où on peut même plus tranquillement affirmer “ajvada gné que jé agnéjghé” en fin de soirée sans faire la une de youtube, de facebook et de 20 secondes le lendemain matin, pour oublier, je boirais.

Il n’y a que ceux qui n’ont jamais joué qui n’ont pas tenté leur chance

Friday, September 5th, 2008

Comme tout le monde, cette semaine, tu as joué à l’Euromillions. Tu l’as fait en rigolant, sans y croire, mais quand même, tu attends un peu de savoir si tu vas pouvoir signer ta lettre de démission et acheter cette bicoque d’à peine 13 pièces à Nassau.

Tu as commencé par jouer tes numéros fétiches, la date de l’anniversaire de ton chien, le nombre de tes gencives, le 42 et pour les étoiles le 3, à cause de ces vacances si romantiques que tu avais passées à Troyes.

Tu as pas pu t’empêcher de les dépenser dans ta tête, ces sous. Tu en as donné à la famille, aux amis, et même aux petits enfants aveugles. Tu t’es dit, en passant, qu’avec tout cet argent qu’on allait refiler comme ça à un mec juste parce que son chien était né le bon jour et qu’il avait jamais lu H2G2, on pourrait probablement résoudre deux ou trois fois la faim dans le monde, ça t’a inspiré un peu de misanthropie et, du coup, tu as racheté un deuxième billet parce que si ça se trouve, ce mec, là, avec son chien moche et ses goûts littéraires pourris, il les mérite pas vraiment, ces millions. Si ça se trouve, il va même pas t’en donner un peu.

Là, tu sais très bien qu’au tirage, tu vas perdre ton veau, ta vache, tes cochons. Ca va même pas t’empêcher de dormir. Perdre 100 balles, c’est terrible mais quelques centaines de millions, ça fait moins peur, tellement tu arrives même pas à imaginer combien de glaces cannelle basilic (vous, les riches, vous avez des goûts si excentriques) ça peut représenter. Tu stresses pas trop. En plus, à un moment, avec ton argent imaginaire, tu avais offert un pneu en or massif à ton oncle Wenceslas qui collectionne les pneus, ça avait fait des jaloux, tout le monde s’était disputé et tu avais fini par te dire que c’était mieux avant.

Et tu avais raison. Car l’argent, finalement, n’apporte que des joies matérielles futiles, les vrais bonheurs de la vie ne s’achètent pas. Et surtout, ces millions, c’est moi qui devrais les gagner, j’estime.

Comme c’est Caucase

Thursday, September 4th, 2008

Cette nouvelle importante t’a probablement échappé, préoccupé que tu étais, et c’est bien normal, par un concours de nichons sauvage sur un blog bleu pourtant pur et innocent l‘actualité brûlante de ces derniers jours, mais le Nicaragua vient de reconnaître l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud.

Tu trouveras mon billet un peu fade mais je ne me prononcerai pas trop, d’autres l’ont fait de manière bien plus rigolote. En gros imagine que Kevin vole les billes de Maurice et que le grand frère de Maurice récupère les billes, casse les deux jambes de Kevin, brûle sa maison et mange son chat, tout ça sous l’oeil d’un surveillant qui promet d’envisager de dire au frère de Maurice que c’est pas bien, et tu as un bon résumé géopolitique de la situation.

Par contre, tu t’es probablement posé cette question, et c’est légitime: Comment, moi aussi, déclarer mon indépendance ? Peut-être par exemple te sens tu bafoué dans ton identité parce que l’Etat t’interdit de parler le langage que tu avais inventé pour parler avec Rudy, ton ami imaginaire ? Quelles que soient les raisons, je ne suis pas là pour juger.

Admettons, par exemple, tu décides, avec les gens de ton immeuble, de créer la République Démocratique Autonome Bolivaro-Michel Druckerienne du 27bis, rue des Acacias. Avant toutes choses, il faut préparer le terrain. Quel sera ton drapeau ? Ta monnaie ? Ton régime ? (En ce moment, je te conseille plutôt la démocratie, très in, même si les dictatures font un très beau retour au premier plan. Evite par contre la théocratie, sauf si tu es bouddhiste, c’est très mal vu)

Il faudra ensuite acheter de quoi tenir un siège (méfie-toi des attache-siège en rotin de chez Ikea), des fois que l’Etat dont tu te déclares indépendant refuse, car tu sais comment sont ces gens.

Une fois le siège tenu, tu ne peux pas encore t’entraîner pour le match contre le Groenland de la phase qualificative pour les prochains championnats du monde de polo-velo. Il faut d’abord te faire reconnaître. Ca marche comme ça avec les pays. Si un seul te reconnaît, tu n’existes pas officiellement. Par exemple, lors d’un congrès international des pays, un émissaire fidjien dit “tiens, pour les vacances, j’étais au 27b rue des Acacias, c’est très beau, mais quels voleurs!”, les autres vont lui répondre “non mais t’es con, ou bien, ça n’existe même pas ?”
Mais si une douzaine se mettent à parler de toi, tu sais comment sont les gens, les autres vont douter et, pour ne pas avoir l’air bête, dire “ah oui, ma belle-soeur y a été, elle m’a ramené un superbe poncho, par contre elle a été malade trois semaines, ils mangent des trucs bizarres”. A ce moment-là, c’est gagné: tu es enfin reconnu.
Le mieux, donc, pour être reconnu par la communauté internationale, c’est de lui envoyer des photos de toi.

C’est doux, c’est neuf ?

Wednesday, September 3rd, 2008

Je sais pas si tu en as entendu parler, mais Edipresse a été obligé de supprimer 50 emplois, et crois-moi bien que ça les a beaucoup fait pleurer.

Le problème, c’est le recul des recettes publicitaires.

Alors ne t’inquiète pas, les recettes publicitaires, dans leur ensemble, ont encore de beaux jours devant elles. Pour une raison qui m’échappe, des tas de gens sont persuadés qu’il faut absolument dépenser plein d’argent pour venir te dire à la télé, dans ton journal ou dans ton internet que le nouvel Omo lave plus blanc que blanc. Seulement, ils ont plus envie d’en mettre dans les journaux, de la pub, parce que ça a fini par se voir que les gens ne lisaient que leur horoscope et les mots fléchés.

Du coup, les malheureux publicitaires sont obligés d’explorer de nouvelles voies pour faire entendre leur voix. Il y a déjà eu les placements de produits dans les films, les placements de produits dans les blogs qui, de scandaleux espace de liberté de parler de ses problèmes gastriques sont devenus des lieux respectueux d’une morale néo-libérale saine et réjouissante où l’on parle de crème pour la peau et de ses 7230 classements de blogueur le plus influent du monde. Mais cela ne suffit pas. Si tu es le chef de la compagnie mondiale de la publicité, je te fais part d’une idée pour le moins époustouflante qui m’est venue comme ça, au volant d’une voiture bleu-gris, alors que j’essayais d’oublier qu’un de mes collègues avait écouté The Final Condom d’Europe la veille. Et ah tiens, j’aurais pas dû en parler.

L’idée, donc, c’est de personnaliser toujours plus avant la publicité. Demain, vous, moi, chacun, sauf ta voisine chauve à cause de son lumbago, pourra devenir le vecteur de cette merveille de la communication moderne qu’est la pub grâce à ce concept génial, le placement de produit dans des vieilles blagues: C’est l’histoire d’un homme qui, n’ayant pas entraîné son cerveau avec la méthode du docteur Konishiwa, souffre de déraison. Il décide de repeindre son plafond avec la nouvelle peinture Vegetaline à l’huile de bois. Il rencontre sur le nouveau Meetoc un de ses congénères, devenu fou car il n’a pas pu acheter le dvd de la saison 17 de la nouvelle série que le monde s’arrache (et qui parle de médecins qui résolvent des enquêtes). Celui-ci s’exclame alors: “Tiens-toi bien à ton pinceau Offenstrue (si tu en avais acheté deux, le troisième t’aurait été offert), j’enlève l’échelle Ikea en acier inoxydable”.

Rentrée Academy

Tuesday, September 2nd, 2008

Je sais pas si tu as eu vent de cette info capitale mais la première école de télé-réalité vient d’ouvrir ses portes à New York.

Alors si tu es le chef de M6, je te fais part, comme ça, gratuitement, d’une idée qui m’est venu entre la poire et le fromage (c’est une expression, hein, je ne mange jamais de poires, ça fait vulgaire): une série qui se passerait dans une école de télé-réalité. Ça s’appellerait…

Oui voilà, “poubelle la vie” c’est une excellente idée.

Extraits:
La cour de l’Académie Raphaëlle Ricci. Harassés par le poids du savoir, mais heureux d’appartenir à l’Elite de leur génération, Mike et Styven discutent
Mike: “Tu as pris quoi, en option, toi ?”
Styven: “Je voulais prendre Ile de la tentation, mais j’ai pas les moyennes en langue de putisme. Et puis je suis célibataire… Comme j’ai les moyennes en rien, j’ai finalement pris Loft Story. Et toi ?”
Mike: “J’ai raté les examens d’entrée en Pekin Express. J’ai eu les moyennes en langue, alors ça allait pas. Ils m’ont mis en Star’Ac, du coup.”

La cantine. Ermelinda pose violemment sa fourchette, l’air dégoûtée
Ermelinda: “Non mais c’est incroyable ! Une chenille, dans ma salade !”
Styven: “Laisse, c’est normal. Cette semaine, c’est l’option KohLanta en cuisine.”

La classe de blagues scatologiques de M. Bigard. Ermelinda et Suzette chuchotent à voix basse. Mais pas trop sinon après on entend pas à la télé.
Ermelinda: “Dis, tu as fini tes devoirs, toi ?”
Suzette: “Oui, et je te passe pas mon cahier, la dernière fois on s’est fait prendre et j’ai dû aller au confessionnal !”
Ermelinda: “Non, non, c’est pas ça… C’est pour le cours d’Audimat de cet après-midi…”
Suzette: “Quoi, tu l’as pas encore fait ? Mais on avait ce devoir depuis un mois !”
Ermelinda: “Oui, je sais, je sais, mais j’ai oublié et puis je savais pas trop comment faire…”
Suzette: “Non mais ma pauvre, si tu es même pas capable d’un truc aussi simple que tromper ton copain devant les caméras, tu arriveras jamais à rien, dans la vie.”

Mike rentre chez lui, dans la banlieue louche de Pontarlier, pour le week-end. Il est nerveux à l’idée de faire signer son carnet de notes à ses parents.
Raymonde Froubeche: “Mais qu’est-ce que c’est que ces notes ? Quand ton père va voir ça…”
Fondu au noir. Intérieur jour. Solo de musique genre un peu inquiétante
Robert Froubeche: “Mais enfin Michel…”
Mike: “Mike, à l’école ils ont dit que je m’appelais Mike maintenant”
Robert Froubeche: “Mais enfin Michel ! Ta mère et moi nous saignons aux quatre vents pour t’envoyer dans cette école et voilà comment tu nous remercie ? Jamais, tu m’entends, jamais je ne me serais permis, à ton âge. Comment comptes-tu être accepté à la Star’Ac avec un vingt de français ?”

Dix ans plus tard. Chez Jean-Luc Delarue
Styven: “C’est toujours moi qu’on choisissait en dernier quand on faisait les groupes pour le cours de piscine, je l’ai très mal vécu.”