Risette by Peer

S’il t’arrive un malheur, accident de tabouret, défaite contre le FC Bâle (non, mais c’est empirique, hein, je sais bien qu’en réalité ça n’arrive jamais), crise financière, problèmes gastronomiques, retour de l’être aimé, la première chose à faire est de prendre les mesures qui s’imposent.

La deuxième chose à faire, c’est d’accuser quelqu’un de tous les maux: « C’est Henri, il a mis un virus d’internet dans l’imprimante ! », « c’est Estelle, elle est suédoise ». Dans ce domaine et en ce moment, le truc à la mode, c’est d’accuser son voisin de faire du paradis fiscal, et donc d’être responsable de la crise, ce à quoi le voisin répondra outré « même pas vrai d’abord et j’te ferais dire que mon papa il est plus fort que le tien, si les gens ils mettent leurs sous chez nous c’est parce qu’on est gentils avec les étrangers (enfin, sauf avec les pauvres, hein, faut pas déconner non plus) ».

Mais donc, qu’est-ce qu’un paradis fiscal ? A priori, le terme est plutôt contradictoire. Le Paradis est un endroit super bien où tu peux te balader à poil et parler aux animaux toute la journée, tant que tu ne manges pas du fruit de la connaissance du bien et du mal©. La fiscalité est forcément une invention démoniaque: trois plombes à t’arracher les cheveux sur une déclaration d’impôts pour ensuite devoir payer, c’est clairement une idée du Malin. Tu remarqueras par contre que les paradis fiscaux, ou les pays suspectés de l’être sont plein de banquiers, des gens qui n’ont visiblement jamais croqué dans l’arbre de la connaissance du bien et du mal© et de traders, des gens qui n’ont encore pas été pendus à la plus haute branche de l’arbre de la connaissance du bien et du mal©.

Les paradis fiscaux ont été inventés aux îles Caïman, des îles dont la population est exclusivement composée de crocodiles, de quelques gavials, d’un ou deux alligators. Ces bêtes étant, par essence, bien trop incultes pour inventer des principes raffinés et sophistiqués tels que la taxe sur le revenu, on n’y paie pas d’impôts. Par l’odeur alléchés, les investisseurs du monde entier ont décidé de créer des entreprises dans cette riante contrée. Mais comme ils avaient un peu peur, je sais pas si tu t’es déjà fait charger par un troupeau de reptiles au galop, ceux qui l’ont vécu ne sont plus là pour en parler (ils sont en vacances au Mexique), ils ont créé des sociétés en mer, plus communément appelées offshore, l’anglais étant la langue officielle des crocodiliens.

Or, le crocodile est un animal fermement attaché aux valeurs du communisme: attristés par cet afflux massif de requins, ils ont perdu leur sang-froid et sur les bords du Nil ils sont partis, n’en parlons plus.

A la lumière de ce qui précède, on peut définitivement réconcilier Micheline Calmy-Rey et Peer Steinbrück et convoquer l’ambassadeur d’Allemagne pour lui dire que à mon avis, la Suisse n’est pas un paradis fiscal, je vois pas comment il pourrait faire si froid dans un paradis.

Lââm est amorphe ? Ose deux Kafka !

Finissons-en une bonne fois pour toute avec cette histoire de Marseillaise, sinon je vais me faire passer un savon. Notons tout de même que cette chansonnette si guillerette n’est plus guère confiée qu’à des chanteuses oubliées, et intéressons-nous de plus près à celle qui était en peine mardi dernier, Lââm.

De Lââm, on sait qu’elle est l’une des trop rares chanteuses avec deux circonflexes à la suite et qu’elle a débuté sa carrière en voulant chanter pour ceux qui sont loin de chez eux, mais force est de constater que ceux qui étaient à la maison ont, et ce à plusieurs reprises, entendu cette chanson, le plus souvent contre leur gré, mais je ne voudrais pas retourner Lââm dans la plaie.

Si l’on tente de se renseigner plus avant sur cette chanteuse ma foi fort pratique pour truffer une chronique de ces jeux de mots que le monde nous envie, on constate très vite qu’il y a du vague à Lââm: son site officiel est en effet en construction. Il permet toutefois de se rendre compte que ladite chanteuse souffre d’une maladie rare, dont les symptômes sont une abondante toison rose pelucheuse. Malgré cela, Lââm est une femme de coeur, qui n’hésite pas à confier la gestion de sa page internet à un analphabète, voire à se produire à Fourmies ou à Montargis. (Je conseille d’ailleurs à ses fans son show du 17 janvier prochain qui promet d’être ébouriffant, surtout niveau chorégraphie)(c’est bien connu, c’est à Mamers qu’on voit danser)(je vous avais dit, pour les jeux de mots que le monde nous envie?)(pour l’arbre de Noël, par contre, j’hésite un peu). Ceux qui auront le courage de laisser le son sauront qu’elle fait ce qu’il est convenu d’appeler du awanbi, avec un peu de pouet pouet derrière pour faire genre electro (la plus grande arnaque depuis l’invention des modes musicales).

De sa discographie, on apprend qu’elle a une petite soeur, ce qui arrive à des gens très bien. Mais pour mieux savoir qui elle est, penchons-nous sur les paroles de sa chanson « savoir qui je suis », comme quoi tout ça c’est bien foutu, tirées de la comédie musicale Highschool Musical 2, ça fait rêver.

Savoir qui je suis

Non, ça a l’air de rien cette rubrique, mais tu sais que y a tellement de sites de paroles avec écrit n’importe quoi, dans l’internet, que maintenant à chaque fois j’écoute la chanson avant de poster ? Je souffre beaucoup pour vous, quand même.

Il faut que je te parle de moi

Oui, c’est vrai.

C’est vrai qu’entre nous ça ne va pas très bien

Musicalement non, mais sinon, moi, j’ai rien contre toi.

La vie sépare nos chemins

Oui, c’est vrai que là, ça fait un moment que j’avais plus trop entendu parler de toi.

Et puis peu à peu elle nous entraîne
Chacun vers son destin

Ah ça, oui, la vie entraîne les gens vers leur destin, c’est comme ça, limite inexorable. C’est ça le problème, avec les destins: la vie finit toujours par t’y entraîner.

Et ne m’en veux pas
Si je dois trouver ma vérité

Pas de souci, je sais ce que c’est: je suis justement en train de chercher mon mensonge.

Pardonne-moi

C’est bon, je te dis.

REFRAIN :
Je veux découvrir qui je suis vraiment

Justement, je me posais la même question.
Attention ! Strophe suivante, un énorme scoop !

Je ne suis pas de ce monde
Est-ce que tu le comprends ?

Comme ça à brûle pourpoint non, pas très bien, mais si on y réfléchit bien, ça peut expliquer bien des choses. Tu serais pas une melmacienne ? Et la peluche rose, c’est pas une grave maladie, alors ?

Chacun doit trouver sa place dans la vie

Oui. C’est vrai. Au parking aussi, mais ça fait moins bien dans une chanson.

Et dès maintenant
Je dois savoir qui je suis

Oui, c’est mieux: imagine, on te demande un autographe, tu signes Anastacia ?

Je ne veux pas tout oublier

Non: pense à racheter du pain.

Mais j’avais tant de rêves et je les vois tous s’envoler
Une autre journée de ciel gris

Ben essaie de penser positif: Tu les vois s’envoler moins longtemps que si le ciel était bleu.

Et ça fait trop mal de regarder le temps qui s’enfuit

Alors ça, c’est de la métaphore météorologico-nostalgique de classe où je ne m’y connais pas.

Je m’en vais là-bas

N’y va pas !

Car je dois trouver ma vérité
Pardonne-moi

Bon ok, vas-y finalement.

REFRAIN

Ah chouette, justement, j’en parlais l’autre jour, j’adore les refrains.

Je n’oublie pas
Tout ce qu’il y a eu entre nous

Super

Ne m’en veux pas

Mais non, allons !

Je ne voudrais pas te mettre à genoux
Car c’est ma vie
Je veux aller jusqu’au bout

Car comme le disait le poète, quand on est à genoux, autant aller jusqu’au bout.

Je dois me détacher de tout
Oui…

Oui !

REFRAIN x2

Je dois savoir qui je suis
Je dois savoir qui je suis

Par contre, nous, on n’en sait pas plus, on n’en sait pas plus

UBS is now listed as in a complicated relationship

Les commentaires du post précédent sont édifiants: même quand tu demandes gentiment, personne est foutu capable de t’expliquer ce que c’est le sentiment de fierté nationale. On en cause sans savoir ce que c’est et sans être sûr que ça serve vraiment à quelque chose ni même que ça existe toujours, un peu comme de dieu ou de « des chiffres et des lettres ».

Mais il ne faut pas se voiler la face ni raison garder. L’humain aime à appartenir à des communautés, cela lui permet de créer un tissu social d’un côté, et d’un autre, il faut bien qu’il y ait des étrangers sinon qui nous volerait notre pain ?

Or, permets-moi de te dire que c’est complètement con, comme concept. Se sentir fraterniser avec des gens juste pour une vague histoire de promiscuité géographique, c’est pas toujours évident. Les soirs de foot, tu fais un effort et tu es pour les rouges. Mais le reste du temps, tu as du mal (du coup, on te prend pour un rouge).

Je préconise donc de supprimer cette absurdité. Et de remplacer les pays par un truc beaucoup plus porteur d’avenir: les groupes facebook. Leur avantage principal, c’est de n’être peuplés que de gens qui pensent pareil. Imagine: tu ne vas pas rejoindre le groupe « Les chatons, c’est un peu moche » si tu ne le penses pas, de peur de donner une fausse image de toi à tes 842 friends. Le groupe facebook réunit donc des gens désireux de discuter de points sur lesquels ils sont tous d’accord. Ce qui, jusque là, ne sert pas à grand chose. Mais avoue que l’idée a du bon. Pour le sport, d’abord. Franchement, c’est beaucoup plus logique de crier « Allez les Je trouve Yann Barthès très beau » que « Allez les fuchsias ». Beaucoup plus simple de s’identifier avec quelqu’un parce qu’il est membre de « je mets deux sucres dans mon café » que parce qu’il est vaguement né à Echichens.

Et si ça simplifie les choses pour le sport, imagine un peu pour la guerre. Parce que oui, autant supprimer le concept de nation, ça me semble pas mal, autant celui de guerre, économiquement, ce serait une erreur. Mais bon, c’est bien plus réaliste de partir la fleur au fusil parce que les « 10’000 personnes et je traverse La Bourboule nu » menacent l’intégrité de « Je ne dis jamais huit fois tractopelle le même jour »

Alors, tu vas me dire, des gens sont membres de plein de groupes.

C’est vrai.

Allons enfants de l’apathie, le jour de foire est arrivé

Je vais t’avouer un truc, dans la vie, il y a des notions simples que je ne comprends pas. La bourse, la mode, le sentiment de fierté nationale. Des trucs que personne ne m’expliquera jamais tellement ils sont, apparemment, normaux.

Par exemple, en ce moment, tous les journalistes du monde ne parlent plus que de la crise, dans les quotidiens, les magazines, partout, bientôt ça va rejoindre même les magazines féminins (les 10 moyens de convaincre votre homme de vous acheter ces magnifiques bottines rouges en fourrure de casoar malgré la crise hihihihihihi) et masculins (Hans s’apprêtait à s’endormir sous un pont quand deux suédoises, qui avaient dû manger tous leur vêtements à cause de la crise, lui demandèrent si elle pouvaient partager son carton). Tous, sauf les journaux français. Parce que, vois-tu, des gens ont sifflé la Marseillaise (l’hymne national des français, pas une fille qui passe sa vie à jouer à la pétanque en buvant des apéros et en disant putain ou peuchère suivant la situation). Et que, pour une raison qui m’échappe, c’est tellement important que même des ministres réagissent.

Moi, donc, à la base, le principe de fierté nationale, ça me dépasse un peu. Je suis fier, par exemple, quand mes lacets restent attachés toute une journée: ça n’a l’air de rien mais, pour moi, c’est un énorme exploit. Par contre, être suisse, c’est un truc que je fais depuis tout petit et qui ne me demande pas plus d’efforts que ça. Je sais pas comment ça se passe, pour les autres: à 14 ans, ils s’enferment dans les toilettes du lycée et se montrent leurs cartes d’identité ? « Waaah t’es laotien ? Trop cool ! » « Ohlala lui il est guatémaltèque, la honte! »

Cette suissitude forcée ne m’empêche pas outre mesure de trouver l’hymne national suisse un peu couillon. Bucolique, mais couillon. Si, si. Je l’ai jamais entendu chanté par Lââm, peut-être que ça changerait la donne, mais je ne crois pas. Et je t’avoue que je suis tout aussi gêné pour les gens qui applaudissent un carton rouge, ou une double faute en tennis, que pour les gens qui sifflent un hymne national.

Parce que ce truc de sentiment de fierté nationale, ça a l’air de vachement tourner autour de l’hymne. L’autre jour, j’étais au restaurant, pour l’anniversaire de ma grand-mère, quand soudain un membre de ma famille dont je préfère garder l’anonymat par peur des représailles a dit: « Non merci, pas de spätzlis, donnez-moi des nouilles », bafouant sans vergogne un symbole national. Personne ne s’est indigné, personne n’en a parlé au JT, aucun membre du gouvernement n’a menacé de quitter le restaurant et de faire annuler le repas. Pareil quand je dis « Oh tu sais moi le ski ». Y a bien quelques réactions indignées, mais ça va, sans plus. Alors que chez nous aussi, quand notre hymne national est sifflé dans un match de foot, ça indigne plein de gens. Parce que si tu habites dans un pays, apparemment, tu dois l’aimer. Alors qu’aimer un pays, ça ne veut pas dire grand chose. Aimer la viande, oui, on peut, c’est même normal, mais aimer un pays, je vois pas comment.

A la limite, si je devenais français et que vraiment, on m’obligeait à être super fier d’un truc, ce serait probablement du fromage. C’est bon, le fromage. Mais l’hymne national ? C’est de la cruauté d’obliger tous ces gens, dont certains sont plutôt sympa, hein, à aimer ce truc. Déjà, il a été écrit par un poisson. J’aime bien les poissons, je dis pas, sympas, jamais un mot plus haut que l’autre, mais comme paroliers, ils valent pas un Furnon ou un Obispo. Parce que quand même, la Marseillaise, ça raconte l’histoire de gens qui s’énervent à cause d’une vache !
C’est une Marseillaise, elle a jamais vu de vaches de sa vie, dans les calanques y a que des dauphins, alors quand elle entend mugir dans ses campagnes, elle monte sur ses grands chevaux, même si y en a pas plus que de vaches chez elle, c’est pas ça qui va l’arrêter. Elle est persuadée que les vaches vont venir dans ses bras égorger ses fils et ses compagnes. Alors bon, je sais pas si tu t’y connais en vaches, mais si vraiment elle voulait égorger tes compagnes, la Marguerite avec ses grands yeux, elle viendrait pas te sauter dans les bras d’abord, elle est pas aussi bête. Mais bon la Marseillaise ne l’entend pas de cette oreille, elle se dit qu’elle va se venger avec son bras. Et elle voudrait qu’un sang impur abreuve ses sillons. On met des millions dans la lutte contre le dopage, et tout ça aux frais du contribuable, bien sûr !, et voilà que la première cagole venue veut égorger des vaches dopées à l’hormone de croissance juste parce qu’elle pense que ça va faire pousser l’anis plus vite, de qui se moque-t-on ?

Donc bon, si on pouvait m’expliquer…

Gråddur på wwruksz

Je sais pas si t’es au courant, mais la mode, c’est les biopic. Un biopic, c’est comme un film biographique, mais avec un nom de croquettes pour chien 100% naturelles. Ça raconte l’histoire de quelqu’un de mort, et pour le titre, au lieu de « Je suis garé en double file » ou « N’oublie pas ton parapluie si tu sors », on met juste un nom de famille, Sagan, Coluche, Mesrine (le célèbre footballeur), la Môme ou Godzilla, donc c’est plus simple. L’avantage du biopic, c’est que des gens morts, y en a des paquets.

Or, je tiens à te rappeler que, comme pour les poneys, Bon Pour Ton Poil est sur le coup depuis au moins longtemps (comme le prouverait aisément ce lien si j’avais un peu mis mes tags à jour (mais je vais pas commencer à mettre de l’ordre dans mon blog alors que l’équipe de « C’est du propre » tente par tous les moyens d’entrer dans mon appartement depuis 6 mois, quand même ?))

Tout ça pour te dire que.

Jean-Ullåf Nobel connut un destin tragique et cruel. Le jour de ses 5 ans, il perd sa mère, Chantal, une actrice française adulée, dans un terrible accident de voiture. Quelques heures plus tard, son père, Alfred, inventeur de la dynamite, défunte à son tour en allumant le gâteau d’anniversaire de son fils.

Les années passent, le petit Jean-Ullåf est adopté par une famille d’employés de pompes funèbres qui l’aiment comme s’il était leur propre fils (c’est à dire à coup de savates). Mais toujours il gardera au fond de son coeur le souvenir de ses vrais parents et l’envie, comme eux, de laisser son nom dans l’Histoire.

Jean-Ullåf décide de compléter l’oeuvre de son père et de créer de nouveaux prix Nobel dans des domaines injustement oubliés: la pyrogravure, la guerre, les fourchettes, le barbecue, la cuisine au beurre et la spéléologie. Hélas, ses économies sont maigres, car il a dilapidé sa fortune dans le jeu, notamment le Cluedo. Un calcul rapide lui permet de déterminer qu’il pourrait offrir à tous les lauréats un prix d’environ une couronne suédoise (soit 12 lauriers danois) pendant environ 0,78 ans.

Il décide alors de gagner plein d’argent et se tourne vers le domaine merveilleux et rémunérateur de la télévision. Il propose à toutes les chaînes suédoises de créer un jeu, « Le juste prix Nobel », un jeu dans lequel des candidats doivent déterminer la valeur marchande d’une vitrine dans laquelle se trouvent le vaccin contre le cancer, un modèle économique révolutionnaire, un genre de molécule vachement petite et la paix dans le monde et si il s’approche du juste prix, mais sans le dépasser, il gagne un voyage pour deux tout frais compris pendant une semaine à Honfleur.

Personne ne voudra de son émission, car à l’époque la télé suédoise était très conservatrice et ne diffusait que des reportages sur les biscottes, 22 heures par jour. Il mourra dans le dénudement le plus total suite à un terrible accident de fourchette électrique, un mardi, seul et abandonné de tous.

Prolégomènes ostentatoires

Tu es probablement au courant: c’est la crise. Enfin bientôt. Alors bien sûr, comme ça va faire deux ans, ou sept, que c’est bientôt la crise, ton attention s’est relâchée. Mais là, ça se précise. A cause de Stefan Lehmann, mécontent que le poste de gardien de l’équipe suisse de foot ait été supprimé après sa retraite, et qui met des banques en faillite avec ses frères pour se venger. Bientôt, nous serons tous condamnés, pour survivre, à manger des animaux morts et peut-être même des végétaux.

Peut-être te dis-tu que si des gens perdent des tas et des tas d’argent, d’autres, ailleurs, doivent en gagner puisque comme le disait Maxime Le Corbusier, rien ne se crée, rien ne se perd, pour tout le reste il y a Eurocard Mastercard.

Bon. Je vais te dire, ça se voit que tu n’y connais rien en économie.

Seulement voilà, moi non plus.

A la place, je vais donc te parler d’un sujet tout aussi important, le poney.

Le poney est un animal de la famille des équidés. Mais, et c’est là que le bât blesse, le poney n’est pas un petit cheval. Il s’agit d’un animal à part entière avec ses coutumes, ses amusantes traditions folkloriques, ses joies, ses peines, ses passions, sa crinière qui vole au vent. Cousin du cheval, mais originaire d’îles où on se les caille grave, le poney a dû, comme avant lui l’huître de Tasmanie, faire face à des conditions climatiques extrêmes. Il habite des steppes arides et inhospitalières, où le vent balaie les plaines et gèle le coeur des hommes et des bêtes, et a très vite compris que la vie était une lutte de chaque instant. A peine âgé de treize ans, il a décidé de ne pas finir sa soupe et de se mettre à fumer comme un pompier, ce qui allait immédiatement interrompre sa croissance.

Le poney souffre atrocement de cette comparaison de chaque instant avec son prestigieux cousin. Il souffre aussi de son physique ingrat. Chaque fois que, dans une série américaine, une petite fille hystérique hurle « je veux un poney », il se sent humilié, il souffre au plus profond de son gésier.

Contrairement au wallaby, qui s’en fout complètement qu’on le prenne pour un petit kangourou, le poney n’a pas d’humour. Bien qu’acceptant de porter des enfants sur son dos, car il faut bien gagner sa vie, il n’est que rancoeur et aigreur. Il déteste les chevaux, toujours à se la raconter, les petites filles hystériques, les constructeurs de jouets, les balades et la pizza aux anchois. Secrètement, il rêve d’un monde meilleur, dont il serait le maître. Mais pour cela, il lui faut beaucoup d’argent. C’est pour ça qu’il investit massivement en bourse, caché sous un habile déguisement. Le poney complote pour la domination du monde. J’en veux pour preuve le nombre toujours croissant de groupes avec des poneys dans le nom, Poni Hoax, Pony Pony Run Run ou Poney M, preuve s’il en est que le farouche animal tente de s’infiltrer dans toutes les sphères de la société.

Seulement, le poney est aussi un peu couillon, et c’est à cause de ses placements hasardeux qu’on va bientôt se prendre l’économie mondiale sur le coin de la gueule.

Un train-train peut en cacher un autre

Le vélo, une fois que tu sais en faire, tu oublies jamais. C’est pratique, comme ça on peut dire « ah ça, c’est comme le vélo », à  propos de plein de choses. Par exemple si à  ton pote Hans, celui qui sort d’un divorce pénible et tout et qui n’a plus eu d’aventures amoureuses depuis seize ans (vraiment très pénible), tu lui dis « non mais c’est comme le vélo », ça ne veut pas dire « avec la gueule que t’as, tu vas devoir sacrément pédaler pour pécho », mais bien plus « non, mais c’est comme le vélo, j’espère que t’as vérifié la pression de tes pneus avant de te mettre en ménage avec une danseuse ».

Mais a-t-on la preuve que le vélo ne s’oublie pas, où est-on confronté à un énième complot ourdi par le gouvernement avec la complaisance bienveillante des medias ? Lance Armstrong démontre qu’on peut arrêter le vélo, se marier avec des tas de chanteuses et revenir deux ans après comme si de rien n’était. D’autres sportifs ont moins de chance. Le football, par exemple, ça peut très bien s’oublier: tu joues contre une bande de luxembourgeois tous amateurs, l’après-midi ils complotent contre l’économie mondiale dans leurs banques alors que toi on te paie trois milliards de francs par mois pour jouer à la balle et le soir, ils profitent que tu as oublié le foot dans un instant de distraction pour te mettre minable. Ca arrive. Pas très souvent, heureusement, mais ça arrive.

Les musiciens, eux, ces temps, ils arrêtent pas de s’arrêter des années, revenir et gagner le tour de France. Alors qu’eux, en plus, ils se droguent, tous, c’est stipulé dans leur contrat de star, et la drogue c’est rarement très bon pour la mémoire. On peut en déduire que le rock’n’roll, c’est un peu comme le vélo, d’ailleurs je pense qu’Oasis a complètement déraillé.

J’ai toujours entendu des gens utiliser cette expression, je l’ai peut-être employée un jour de grande fatigue, un mardi de novembre, va savoir. Mais je n’ai jamais vérifié empiriquement. J’ai appris à faire du vélo, c’était à  la campagne, avec un ami de mon père, il s’appelait Edmond, il avait de la moustache. Je l’ai un peu perdu de vue depuis, pour la moustache je sais pas mais je pense qu’il s’appelle toujours Edmond. Un moment il m’a dit « ahaha t’as vu je te tiens plus, lol, truc de fou », ou quelque chose d’approchant, et je me suis écrié « par la malpeste, c’est inouï, je sais désormais faire du vélo », ou quelque chose d’approchant, puis j’ai filé par monts et par vaux, fendant l’air comme un faon aux aguets, pour aller demander à des hordes de types louches de ma connaissance de lui péter sa gueule parce que quand même, lâcher les vélos des gens comme ça sans prévenir, ça se fait pas. Même quand on s’appelle Edmond (mais si ça se trouve, c’était Raymond).

Et si j’ai peut-être oublié certains détails de cette croustillante anecdote, le vélo, je sais toujours en faire, je suppose, même si là , on m’a volé le mien, dans quel monde vit-on ?

A l’inverse, et à la même époque à deux ou douze ans près, un dénommé Joseph, je crois qu’il n’avait pas de moustache « alors, c’est die ou c’est das? » (et il fallait répondre c’est der)(mais pas toujours)(il était rusé comme un troupeau de renardeaux) et aujourd’hui, je me demande si cétait pas quand même das, comme quoi, contrairement au vélo, la moustache, ça s’oublie.

Mais jamais, jamais, je l’avoue aujourd’hui, je n’ai essayé d’organiser de Tour de France pour malades de l’Alzheimer. Je ne peux donc pas vraiment dire si c’est possible d’oublier le vélo. Et donc, je l’avoue, il m’est arrivé d’utiliser cette expression à tort et à travers.
Il est en revanche des choses qui doivent sans cesse se réapprendre. L’Amour, par exemple. Où a-t-il sa source ? Où se jette-t-il langoureusement dans l’océan comme d’autres se jettent dans le tricot (que celui qui a répondu dans ton cul se dénonce immédiatement, merci, on peut jamais être sérieux dans cette baraque)(en plus, c’est complètement faux) ? Il faut sans cesse le réapprendre (à moins d’avoir une très bonne mémoire, parce que c’est des noms compliqués)(mais c’est en Russie)(ou en Chine). De même, le blogging, même quand on est le 11e fournisseur mondial (à l’heure où je vous parle) de culture et de plaisir, si l’on veut mériter ce statut et les honneurs, champagne, saucisses de Morteau, filles nues et poneys Shetland qui l’accompagnent, après trois semaines de pause, deux de vacances sous le soleil nonchalant du Grand Sud et une sous le soleil blafard d’une caserne chancelante, ben y a un moment où tu sais tellement pas quoi raconter que tu te prends à ressortir le mail du mec qui voulait que tu fasses un post sur une espèce d’émission de décoration.

Je suis Philippulus le prophète

Tu es probablement au courant, mais aujourd’hui, c’est la fin du monde (pour une explication scientifique, voir cet article très documenté). Pas seulement pour Raymond Domenech.

Très bien. La fin du monde, c’est quand même pas un truc qui arrive tous les jours. Il faut donc l’occuper intelligemment. Intelligemment, ça veut aussi dire avec prudence. On a vu trop souvent, par le passé, des gens profiter d’une fin du monde pour dilapider leur fortune, avouer à leur patron qu’il leur arrivait parfois d’aller sur internet pendant les heures de travail pour regarder des photos de licornes devant un coucher de soleil ou, plus pragmatiquement, se suicider collectivement, avant qu’on leur annonce que oops, désolé, c’était juste une erreur de calcul, mais promis on fera mieux la prochaine fois, LOL ^_^ c’est Henri qui a oublié une virgule, la comète qui devait annihiler toute vie, en fait, elle était pacifique, mais vous inquiétez pas, on lui infligera un blâme, pour que tu te mettes à profiter de ta fin du monde de manière trop démesurée.

Le mieux, c’est de faire un truc que tu as toujours eu envie de faire mais que quand même tu pourras encore regarder ta femme, vos onze enfants et Gaspard, votre labrador nain du Pérou, en face le matin en partant au travail si d’aventure, ce coup-ci encore, c’était du flan. Genre du saut à l’élastique, un sudoku force 4, une quiche ou encore aller à Besançon. Si jamais tu croises un truc noir qui grandit à une vitesse exponentielle, il te restera toujours deux ou trois pico-secondes pour, une dernière fois, faire sauvagement l’amour avec ton voisin le plus proche (oui, même si tu as choisi la solution Besançon, ça doit être possible).

Et si d’aventure tu es entraîneur de l’équipe de France et que par une étrange coïncidence tu perds ce soir, « je sais pas ce qui s’est passé à un moment on a été comme avalés par une puissance mystérieuse et on s’est retrouvés dans une réalité parallèle où on jouait comme des chèvres » me semble 100 fois meilleur comme explication que les « c’est incroyable ils ont eu que deux occasions et ils en mettent trois au fond » ou « Estelle épouse-moi » habituels.

Attention, l’abus de mauvaise presse est dangereux, consommer avec modération.

Si tu lis la presse romande, tu sais ce qu’est un botellón et tu es inquiet pour l’avenir de notre belle jeunesse. Si tu ne lis pas la presse romande, je t’explique, en gros: un botellón, c’est des grands rassemblements de jeunes qui apportent chacun leur bouteille, de préférence d’alcool, pour les boire. Je te linke l‘article wikipedia, mais vraiment, vraiment, ça soulève le coeur, comment tolérer que des jeunes qui, pourtant, ont été éduqués dans le respect et l’amour, puissent se permettre de mettre du coca dans leur vin rouge ?

Car, vois-tu, les jeunes boivent de l’alcool, et c’est terrible.

Alors oui, oui, je vois ton sourire narquois. C’est vrai que quand on avait 15 ans, nous aussi, il pouvait nous arriver, dans un instant d’égarement passager, de boire un verre d’alcool ou douze. Mais ce n’était pas pareil. Rien à voir. Oui, ok, on s’est mis deux trois murges mémorables (enfin mémorable n’est peut-être pas le mot le plus approprié, d’ailleurs). C’est vrai que des fêtes où chacun amène sa bouteille d’alcool, ça existe depuis longtemps, la semaine passée j’ai été invité à manger chez mon ami Oswald, j’ai amené une bouteille de rouge, personne n’en a parlé dans la presse. Pourtant, y aurait eu de quoi, mais je dis ça, je dis rien. Mais quand même. C’était une super bonne bouteille, j’estime. Et rien, même pas une brève en dernière page du quotidien local. Alors que entre nous, ce qu’il a servi à bouffer, c’est bien simple, je lui ai mis 2 points, mais quand même 5 pour la déco parce qu’il avait une nappe avec des jolies fleurs, dessus, des hyacinthes, ou alors des fougères, je sais pas.

Quand on était jeunes, donc, il pouvait nous arriver de nous soûler un peu, comme ça, par inadvertance. Mais ça n’avait rien à voir avec ce qui se passe aujourd’hui. Parce que c’était une époque heureuse et bénie où on pouvait tranquillement tester le baileys-vodka-limonade sans que personne ne prenne de photos. Comment veux-tu que notre jeunesse, qui est l’avenir de demain, se construise une identité dans un monde où, si tu ne te souviens plus de ce que tu as fait la veille, il y a demi-douzaine de vidéos sur youtube pour te le rappeler ? Dans un monde où, au lieu de tranquillement avoir la gueule de bois en te disant je ne boirai plus jamais, tu dois passer ta journée à détaguer 3600 photos (dont 3558 très floues, mais tout de même) sur facebook en te disant je ne boirai plus jamais ? Dans un monde où, au lieu de faire des théories à des inconnus dans le même état que toi, tu envoies des sms abscons à ta prof de piano, ce dont tu te souviendras au moment de sa réponse à 8 heures le lendemain et elle est toujours aussi forte cette sonnerie parce que là tu as l’impression qu’on vient de t’arracher un bout de cerveau ? Et dans un monde où tu peux même plus organiser des beuveries tranquille sans qu’un journaliste de gratuit en manque d’indignations gratuites ne débarque en hurlant « chouette, je vais pouvoir mettre un sondage demain dans mon journal, êtes-vous pour ou contre l’alcoolisme ? »

Moi, si j’étais les jeunes d’aujourd’hui dans ce monde où on peut même plus tranquillement affirmer « ajvada gné que jé agnéjghé » en fin de soirée sans faire la une de youtube, de facebook et de 20 secondes le lendemain matin, pour oublier, je boirais.