How i met your modem S01E05

« Ah tiens, je t’ai raconté des bêtises. Il y avait encore des journalistes en 2009. Je le sais, c’était mon métier. Je suis devenu peintre sur chinchillas plus tard, en 2012. Il y avait encore des journalistes, mais ça commençait à sentir le sapin… C’est une expression qu’on utilisait pour dire que quelque chose touchait à sa fin. Le sapin, c’était un arbre qui… ben qui devait sentir une odeur particulière, je suppose.
Il me semble pourtant qu’en 2000, alors que j’étais un étudiant fringant et consciencieux, c’était encore classe, comme métier. Bien sûr, des gens nous reprochaient déjà de ne parler plus que de people et de faits divers, mais en général, c’étaient les mêmes qui ne lisaient que ces deux rubriques-là.
Puis les sources d’information se sont multipliées comme des lapins OGM sous une pluie d’été, il a fallu aller toujours plus vite, plus loin, plus fort, être le premier à publier l’info ou, à défaut d’info, quelque chose, sous les yeux des blogueurs qui jouaient leur rôle de quatrième pouvoir et demi en hurlant LOL FAIL sitôt qu’ils trouvaient une faute d’orthographe, mais poussaient à la consommation en se jetant comme des morts de faim sur la moindre dépêche histoire d’avoir quelque chose à commenter.
Puis les médias ont commencé à ouvrir leurs commentaires et le village global est devenu le plus grand café du commerce de l’Histoire. Et comme ça faisait des pages vues sur les sites des médias, ceux-ci préféraient rallumer le feu plutôt que de tenter de faire un peu d’information. Et tout ça s’auto-alimentait : les journalistes publiaient des articles, les internautes les commentaient, les journalistes faisaient un article sur les réactions des internautes. Et comme ça faisait de la page vue, ceux-ci se dépêchaient d’être les premiers à réagir sur les premières infos publiées, histoire d’optimiser leurs chances d’être de la revue. En 2014, année de lancement du GoogleNewsDigest, les infos qui “buzzaient” comme on disait à l’époque, je crois que ça venait du bzz de ces insectes qui font beaucoup de bruit pour une bien petite piqûre, étaient évincées en moyenne 34 minutes plus tard. 34 minutes pendant lesquelles il fallait absolument faire un mot d’esprit ou une parodie, voire enregistrer un nom de domaine rigolo.
En 2016, quand un journaliste s’est fait agresser en pleine rue par un ministre pour avoir révélé que celui-ci avait bu du café en public malgré l’interdiction, ses confrères ont commencé à cacher leurs cartes de presse. Comme de toutes façons, leur boulot consistait le plus souvent à trouver des vidéos youtube amusantes en rapport avec les articles qu’ils publiaient, cela ne dérangeait personne.

Voilà, je me suis un peu égaré en route, mais tu devrais avoir de la matière pour ton exposé… »

– Boah zargla koss omagh, de toutes façons, les exposés, c’est limité à 140 caractères.

– Ah, oui, tu vas devoir résumer beaucoup là.

– Non mais c’est bon, blinka, chabawong, j’ai fini, là.

– Fais-voir ? “Lé vie, sa parl bokou. LOL”.

6 Responses to “How i met your modem S01E05”

  1. Et la prochaine fois, on étudiera ce qu’était un journal ? Ah oui, ça c’était encore avant les années 2000…

  2. Fennec says:

    Cette histoire de vitesse… j’ai l’impression que c’est pour tous les métiers pareil : on voudrait faire les choses bien, et on aime, d’ailleurs, les choses bien faites, recherchées, soignées… mais on n’a pas le temps, alors on bacle.
    Et puis de toute façon le client est un con, alors…

    Trêve de jérémiades, la chute est sympathique. J’étais sur le point de m’exclamer “MER IL ET FOU”.

  3. ophise says:

    Suis-je encore dans les 35 minutes pour faire un commentaire ???

  4. ophise says:

    34 ah merde…

  5. Aurélia says:

    T’es grave inspiré je trouve.

    Lol.

    Tro je kif ta séri tro dla balle.

  6. Nekkonezumi says:

    34 minutes pour une bouse, c’est beaucoup trop.