Djian comme la pluie

Bon ben puisqu’on parle de ça :

Des hauts, des bas
(Philippe Djian / Stephan Eicher)

Le jour où j’ai appris que Stephan Eicher se faisait écrire ses textes par un vrai écrivain connu, je me suis dit que finalement, je m’étais pas fait tellement rouler que ça quand j’avais acheté ce poncho 30 livres estoniennes après trois heures de marchandage.

La pluie venait du nord
Le vent passait sous ma porte

Tout de même, on sent la patte de l’écrivain, qui réussit à créer en deux phrases une impression de froidure à peine ternie par l’impression que le chanteur est en train de dire “le faon passait sous ma pote”.

Je comptais vivre fort
Et que le diable m’emporte

Il fait froid, mais le chanteur se dit je vais pas me laisser abattre, place à la fête.

J’allais a la fenêtre
Enroulé dans un drap

Il va regarder quand même s’il pleut pas trop. Il est vêtu d’un drap, ce qui est original, normalement, en Suisse, on se promène plutôt enroulé dans une couverture. Ou dans un peignoir Mickey.

Je secouais la tête

Et quand même, il fait très très moche, du coup il secoue la tête de dépit, y a plus de saisons ma brave dame.

J’en écartais les bras

Il secoue la tête tellement fort que ses bras s’écartent. C’est symptôme d’une maladie nerveuse très rare. Mais du coup, te dis-tu, car tu es sagace, il se retrouve tout nu devant sa fenêtre, vraiment, les jeunes, de nos jours, ils sont un peu trop olé olé ! Et bien, attends-toi à être surpris à la phrase suivante.

J’avais des hauts
J’avais des bas

En fait, sous son drap, il est tout habillé. Il porte même des bas, c’est dire.

J’avais plus ou moins chaud

Suivant si le drap est enroulé ou non

Et toute la vie devant moi

Finalement il décide de pas sortir, mais de rester à la maison à faire le con avec ses fringues et ses draps.

J’avais des hauts
J’avais des bas
Je crois que j’en voulais trop

Il se rend compte qu’il est un peu compulsif de l’achat d’habits.

J’ai même eu ce que je n’voulais pas

Il garde même les linges de bain à fleurs qu’on lui offre pour 200 francs d’achat.

Je restais enfermé
Ou errais pendant des jours

Il fait ses achats soit dans des catalogues, soit dans les magasins.

Trop de chemins s’ouvraient
Trop de questions en retour

A chaque fois il hésite beaucoup, C&A, H&M, D&G, M&M’s, la noire, la rouge, ok la rouge mais ira-t-elle avec mes bottes en velours?

Je n’avais pas tué mon pere

Alors là, il faut le prendre dans le sens métaphorique, comme quand on dit ohlala je tuerais mon père et ma mère pour ces cache-rotules en osier inoxydable Gucci. Sauf que là, il a décidé de finalement pas les acheter.

Mais je ne me souvenais pas
Ce qu’il me disait de faire
Ou ce qu’il ne disait pas

Et là il se rappelle que son père lui avait une fois donné un bon conseil. Ou ne lui a pas donné de bon conseil. D’ailleurs c’était peut-être sa mère, il confond souvent. Ou le voisin. Ou pas un conseil, mais le la.

Refrain

Chaque jour je me tenais prêt
Je guettais l’heure et la page

C’est une vieille chanson, de l’époque où on commandait encore ses habits dans des catalogues et qu’il fallait téléphoner pendant les heures d’ouverture pour passer sa commande.

Où les eaux s’ouvriraient
Me laisseraient un passage

Encore une métaphore pour dire qu’il a finalement choisi la rouge.

L’espoir me faisait vivre
L’attente me rendait nerveux

Entre le moment où il passe sa commande et celui où il la reçoit, il a des réactions un brin excessives.

Je trouvais dans les livres
De quoi patienter un peu

Pour se calmer, il feuillette des catalogues, ce qui est aussi vicieux qu’un cercle.

J’avais des hauts
J’avais des bas
J’avais plus ou moins chaud
Et toute la vie devant moi
J’avais des hauts
J’avais des bas
Je crois que j’en voulais trop
J’ai meme eu ce que je n’voulais pas

Et faut pas s’étonner si tu te retrouves au final avec n’importe quoi.

C’est donc une très belle chanson qui dénonce le consumérisme de notre société de consommation.

Le clip est , mais à cause des Inconnus, ces sacripants, il fait un peu rire.

24 Responses to “Djian comme la pluie”

  1. M. Shadok says:

    Preums ?

    Rien ne vaut un bon déjeuner paisible, en fait.

  2. Océane says:

    Deuz :) Je savais bien que la prof de littérature qui nous faisait analyser du Djian au lycée, n’avait pas saisi la substantifique moëlle de l’auteur.
    Et Stefan, il a toujours autant de cheveux rassure moi?

  3. raph says:

    ah ben là on le voit plus tellement… peut-être à cause d’un problème de calvitie ?

  4. yayon says:

    hihihii

    franchement raph t’es fort ssisi très fort ;-)

    une bonne dose de four rire avant d’aller faire le ménage c’est tip top!!!! coool merci! ^^

  5. Alinéa says:

    Je ne savais pas que Stephan Eicher existait vraiment. Je pensais que c’était un mythe destiné à effrayer les enfants.

  6. Joker says:

    J’adore le coup des eaux qui s’ouvrent pour indiquer qu’il choisit la rouge, carrément biblique la métaphore, c’est ce qui arrive quand les textes viennent d’auteurs ‘achement super célèbres et intelligents. Sans toi, nous, commun des mortels, serions passé à côté de tant de finesse. Merci.

  7. Aurélia says:

    \o/
    Une de tes meilleures traductions de chansons, à n’en pas douter.

    Heureusement que tu nous as indiqué le sens caché de ce texte, parce que sans ça ça ne voulait juste rien dire, pas vrai ?

  8. funambuline says:

    Merci. J’aime enfin comprendre les chansons grâce à toi.
    Merci aussi de ne pas t’être encore attaqué à celles que je pourrais aimer vraiment et que du coup, après ton explication de texte, plus trop.
    Et non, je ne dirai pas lesquelles. Trop peur !

    Ce clip donne très envie d’une “version littérale”, du genre : http://www.youtube.com/watch?v=lj-x9ygQEGA&eurl=http%3A%2F%2Ffunambuline%2Eunblog%2Efr%2Ftag%2Foueb%2F&feature=player_embedded non ?

  9. fabienne says:

    non mais c’est quoi des cache-rotules ?

  10. Lorenzo says:

    oh mais tu as raison, on ne comprend pas tres bien ce qu’il raconte, il n’articule pas. C’est a cause du drap devant sa bouche? Ou bien de son accent merdique? Et c’est moi ou il ressemble a Federer?

    http://teemix.aufeminin.com/star/photo-281199-roger-federer.html
    http://www.stars-celebrites.com/EICHER-STEPHAN/wallpaper-eicher.htm

  11. Oui bon c’est un peu salaud de s’en prendre comme ça aux Suisse-allemands… (même si c’est vrai qu’ils ont un peu tous la même tête avec leur accent qui fait mal à la tête)

    http://desencyclopedie.wikia.com/wiki/Bourbines

  12. Sébi says:

    Ma parole, cette chanson aurait aussi bien pu être un billet de blog de fille.

  13. TT02 says:

    Il s’enroule d’un drap et il écarte les bras. Moi j’aurai continué par un “coucou la voilà”. Mais non il marmonne “j’avais des hauts J’avais des bas”. C’est beau la poésie quand même.

  14. Chtoing says:

    Le rapport avec ton post n’est pas direct, mais toi qui es fan du Coup de soleil, tu connais
    Eels, “That Look You Give That Guy” ?
    Ecoutable là, par exemple : http://www.youtube.com/watch?v=wREjT7DlI7M

  15. Nandou Guanaco says:

    Non mais j’ hallucine. V’là un mec mille fois plus compliqué qu’ une nana pour choisir ses fringues et qui y passe toute une chanson.
    Ah ben ça alors, tu me l’ aurais pas dit, je ne l’ aurais jamais cru.

  16. Nekkonezumi says:

    Haha, Djian a des problèmes d’Oedipe et se prend pour Moise devant la Mer Rouge ! Choli ! Voilà qui récompense allègrement mes pélerinages web estivaux (meuh)

  17. tupeutla says:

    Avec cette histoire de fringues je suis tout perdu dans
    ma tête.
    j’ai cru que tu nous parlais de Jean’s et de Daniel Hechter !

  18. Emma says:

    Oh là là, non, le contresens, Raph ! Relis bien le texte, tu verras que “Des hauts et des bas” est une chanson qui porte sur le choix d’un déodorant, oas de fringues !

    (Mais Dijan est quand même un sacré escroc, je suis bien d’accord avec toi : faire de ses tergiversations de toilette matinale une pseudo chanson à texte, tout ça en les dissimulant dans un calembour foireux… fallait oser ! )

  19. arpenteur says:

    Ok, ok, je veux bien qu’on rigole, mais quand même pas avec les suisse-allemands… vous croyez pas qu’ils ont déjà assez de peine comme ça… Alors on se moque pas, ok??

  20. CaSS' says:

    Merci d’avoir su faire rire aux éclats une inconnue qui en avait besoin à 4:05 du matin..

  21. Cassandre says:

    Article paru dans l’édition du
    Vendredi 15 Août 2008

    Colmar
    Interviews
    Le serein helvète
    Quatre années après son premier passage au théâtre de plein air, Stephan Eicher est de retour, avec une sérénité nouvelle, mais un humour et un bagou toujours intacts.
    DNA : Vous avez choisi de revenir vous produire à Colmar. C’est un choix volontaire ? « Vous allez penser que je dis cela pour vous faire plaisir. C’est une des meilleures scènes que j’ai pu faire. Sauf que j’aurais dû jouer après Bashung (rires). Il y a quatre ans dès que j’ai vu la salle j’ai trouvé l’architecture intelligente, la programmation aussi. L’équipe technique est très professionnelle, souriante. De plus, j’ai une attache affective avec Colmar. Pour ma …
    Ch. Schneider

    Pour lire l’article complet :
    accédez aux archives de dna.fr

    Les articles de la rubrique Colmar du Vendredi 15 Août 2008 :

    Et toujours sur les ecrans en friche
    se place la tecktonik
    sur les chemins des chapelles
    à de nouvelles places
    releve des compteurs de gaz,
    des brassees de gleckhampfala
    s’explosent…

  22. Bouyouyou says:

    Un peu facile…

  23. raph says:

    Complètement, oui

  24. Cassandre says:

    J’aime!