ce billet est une contribution tardive (et un peu trichée, y a pas tout) à l’armée des douze singes de janvier de Martine Pagé
Alors d’abord y a eu le boulot dans une ferme. Un truc gratifiant et vivifiant. C’est vrai, toucher dix francs par jour pour promener des brouettes de fumier, c’est gratifiant et vivifiant.
Ensuite, y a eu l’usine de cornichonnage. Huit heures par jour à regarder des cornichons passer sur un tapis roulant, c’est un truc important: c’est à ce moment là que tu te dis que t’as intérêt à pas (trop) foirer tes études. C’est d’ailleurs pour ça qu’on appelle ça un job d’étudiant. A ta gauche, y a des employées de la boîte qui s’engueulent à cause d’un épisode de Taupe Modèles. A ta droite, un étudiant qui raconte ses problèmes de coeur à sa voisine d’en face. Au bout de trois jours, tu te mets à parler aux cornichons.
Mais si t’as de la chance, tu peux gravir un échelon social et monter jusqu’au deuxième tapis roulant. Là, c’est plus simple. Tu regardes passer des bocaux de cornichons plein de vinaigre. Si il manque du vinaigre, tu dois leur faire un double mawashigeri, arrêter la machine et demander une intervention de l’ONU. Et c’est en général au moment où tu t’endors que la machine arrête de vinaigrer.
Sinon, y a la caisse de grand magasin. Un job riche en relations sociales, bonjour, huit francs vingt, et trois qui font dix, oui madame je sais que le fromage est en action, la machine décompte automatiquement alors on va pas en faire un. Un job tellement prenant qu’en général tu continues à bosser toute la nuit.
Le truc bien, c’est qu’on te donne une petite plaquette avec ton nom dessus. C’est pratique, à la fin de la journée tu peux facilement retrouver ton adresse.
Et finalement, y a le petit job peinard dans un bureau, ou les madames qui bossent la depuis dix ans te regardent avec admiration parce que tu sais faire ctrl+c ctrl+v. Sauf que au début, tu fais surtout des photocopies et tu prends le carton tout en haut de l’armoire parce que la dame elle arrive pas à l’atteindre.
Et là, mon délai d’écriture s’achève.