Longue est la nuit

J’aimerais pour une fois aborder un thème de société sur ce blog :

Pour ou contre l’insomnie ?

A priori, poser la question, c’est y répondre. En ce temps de crise et de morosité, dormir, c’est du temps perdu. L’insomnie, c’est des heures et des heures de gagnées, que l’on peut enfin consacrer à des activités délaissées durant la journée comme penser au temps qui passe ou écouter le robinet goutter dans la cuisine. Elle peut également être le prélude à d’amusantes distractions : qui n’a jamais repeint son plafond sur le coup de 4 heures du matin ?

Il est de plus bien connu que l’insomnie aide à la création artistique. Avez-vous jamais lu un roman parlant de quelqu’un qui dort super bien ? Connaissez-vous un seul artiste expliquant qu’il crée surtout au cours de ses nuits de sommeil profond ? Et ces français romans au style enlevé, ceux dont l’auteur n’a pas cette sotte vulgarité de s’intéresser à l’histoire alors qu’il pourrait rajouter un adjectif, leurs foisonnants oxymores, leurs amphigouriques catachrèses que louent les critiques subjugués par cet impétueux amas de sémillants vocables, qui donc, dans un funeste monde dépourvu d’affables insomnies, les lirait ?

L’insomnie permet aussi de compter les moutons, ce qui nous rapproche de la nature dans un monde où de plus en plus de bergers font appel à des compte-moutons automatiques.

Et puis il faut bien que les fabricants d’anti-cernes gagnent leur vie, avec tout ce chômage.

Non, vraiment, l’insomnie a tout pour elle. A condition de respecter quelques règles simples qui permettent de la vivre pleinement. Ne faites pas comme ces insomniaques débutants et naïfs qui croient dur comme fer qu’ils vont se rendormir. Des heures perdues à tenter de faire le vide dans son esprit, à en chasser toutes pensées interlopes, alors qu’on pourrait très bien se lever, aller à la cuisine et se préparer une bonne interlope panée, ça me chagrine. Et dans un souci de confort, il est préférable que le nombre d’insomniaques à domicile soit supérieur ou égal au nombre d’habitants.

Mais bon, ça fatigue un peu, à la fin.

9 Responses to “Longue est la nuit”

  1. TT02 says:

    Ah non, 4 heures du mat c’est l’heure de nettoyer les pinceaux. Après tu t’occupes des moutons.

  2. mlle-cassis says:

    “Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : « Je m’endors. »”
    Quel nargueur, ce Marcel! (il en a écrit cent mille pages, sur le sujet, d’ailleurs)

  3. Monsieur Prudhomme says:

    À 4h du matin je joue les variations Goldberg sur mon piano. Mais les voisins se plaignent car ils n’arrivent plus à compter les moutons à cause des appoggiatures.

  4. M.Shadok says:

    Très bonne idée ! Avoir enfin le temps de profiter de l’intégrale des intégrales de Clayderman sans parasites et à donf… quoiqu’à quatre heures du mat’, faut mieux mettre le casque : voisinage oblige !

  5. Il est une heure du mat’, je relis ce poste dans mon lit, sur le portable, et je n’arrive pas à dormir.

    Je me dis que t’as bien raison, je m’en vais écrire une pièce de théatre, ça m’occupera.

  6. Nekkonezumi says:

    Ceci n’est pas un somnifère.

  7. Leïleï says:

    T’as des actions en bourse quelque part toi. Mais j’arrive pas à déterminer où.

  8. Fofo says:

    Je confirme que quand on se promène pendant deux heures dans l’appart au coeur de la nuit avec un bébé dans les bras (bon, OK, c’est le bébé qui fait des insomnies et pas le parent, mais ça marche quand même), on trouve des tas de bonnes idées de déco, genre “tiens, si je mettais mes dicos sous mes boîtes à chaussures et ma lampe de chevet sur ma machine à laver, je gagnerais assez de place pour installer mon raton-laveur au-dessus de l’imprimante.”

    Sinon je n’ai pas compris la phrase qui affirme qu’il faut qu’il y ait plus d’insomniaques que d’habitants, mais comme je suis visiblement la seule, je n’ose pas le dire.