Don’t tell me there is a twist

Il y a, en littérature, des petites astuces qui sont interdites tant elles ont été usées par le passé.

Parmi celles-ci, le coup du “fais gaffe derrière-toi” que connaissent bien les amis de la bande dessinée franco-belge, des séries américaines, mais aussi des romans de gare :

“L’émotion étreignait le visage poulpin de Jean-Sven. Combien de fois avait-il rêvé à des retrouvailles enfiévrées avec Esperanza, son amour de jeunesse ? Quand il l’avait croisée au rayon charcuterie de l’épicerie du village, il en avait à peine cru ses yeux.
– Esperanza, est-ce bien toi ?
– Fais gaffe, derrière toi, y a l’épicier qui essaie de t’attaquer avec une mortadelle géante !
Le temps que Jean-Sven réalise qu’il était tombé dans un piège grossier, les cruels aléas de la vie l’avaient à nouveau éloigné de la belle Esperanza, disparue comme neige au soleil.”

A noter que le coup du double fais gaffe derrière toi est également totalement proscrit :

“- Cette histoire de mortadelle ne tient pas la route, Jean-Sven ! Dis-moi ce qui s’est réellement passé !, s’exclama l’inspecteur Håffnardøttir dans un rictus sardonique.
– Très bien, je vais tout avouer… Oh, fais gaffe, derrière toi ! Un troupeau de wapitis !
– Ah, tu crois me piéger avec cette vieille ruse ? Malheureusement pour toi, hier soir, alors que je souffrais d’insomnies, tant j’ai du mal à retrouver le sommeil depuis que Gulbrandsson, ma ravissante épouse, s’en est allée refaire sa vivre avec Esperanza, j’ai relu un vieux Mickey Parade qui traînait, je connais très bien ce truc…
Quand soudain, le bus 17 des transports publics morgiens, qui venait justement d’être détourné par un wapiti cocaïnomane, le faucha de plein fouet.”

Le coup du triple fais gaffe derrière toi avec inversion simultanée, bien que plus rare, est toutefois fortement déconseillé :

” – Fais gaffe, derrière toi, les choeurs de l’armée rouge !
– Attends. C’est une ruse. Tu essaies de me faire croire qu’ils ne sont pas derrière moi parce qu’en fait ils le sont vraiment, donc… non, attends, c’est le bordel, ils sont là, ou pas ?
– Je ne sais pas, je ne sais plus, ne pourrions-nous refaire notre vie comme avant, nous commanderions des pizzas toi, la télé et moi ?
– Mais il est trop tard, trop tard, si je ne t’arrête pas, adieu mon passage à “les 100 plus grands détectives moustachus”, ma pauvre mère qui est mourante ne me le pardonnerait jamais.
– Oh fais gaffe, derrière toi, Julien Lepers !
– Non mais arrête avec ça, bordel, ça devient lourd.
Quand soudain, ils se firent encercler par une horde de scénaristes hollywoodiens qui revendiquaient de meilleures conditions de travail.”

A noter que ces interdictions ne s’appliquent pas au domaine de la politique, où le coup du fais gaffe derrière toi est encore parfois usité dans des situations urgentes :

“Le désarroi se lisait sur le visage de Nicolas. Il ne comprenait pas pourquoi ses amis européens s’emportaient pour quelques renvois de Roms : après tout, eux aussi savaient bien ce que c’était d’avoir une réélection à préparer, non ? Et même si la base de son électorat était toute prête à croire que la plupart de ses soucis quotidiens étaient de la faute non plus des 35 heures mais des Gipsy Kings et de Thomas Dutronc, il sentait bien qu’il fallait détourner un peu l’attention. Mais comment faire ?
– Fais gaffe, derrière toi, demanda-t-il à ses ministres de s’exclamer, une menace terroriste !”

13 Responses to “Don’t tell me there is a twist”

  1. AppAS says:

    Fais-gaffe, derrière-toi, un mec qui va poster un commentaire idiot. Non, je déconne. Mon commentaire est stupide.

  2. Océane says:

    Excellentissimo !

  3. mlle-cassis says:

    On veut la révolution du saucisson!

  4. Fennc says:

    haha ! Le pire c’est que tout le monde le sait (d’ailleurs au début de son mandat on l’accusait de changer de sujet toutes les 2 secondes exprès pour ça). Les prestidigitateurs connaissent bien ce petit truc de détourner l’attention, mais c’est vrai qu’au niveau politique c’est moins magique (et je ne parle même pas du fait qu'”on” essaie de nous faire peur : si tu ne votes pas pour moi, les Roms/terroristes/père fouettard (rayer le bouc émissaire inutile) viendront te chercher !)

  5. Nekkonezumi says:

    Et une fois que le gars s’est retourné pour admirer le wapiti qui fume de la mortadelle en chantant “Kalinka”, est-il envisageable de lui crier : “Attention, devant toi !(un yéti/trumeau/Brice H.etc etc)” ?

  6. vivien says:

    Attention, derrière toi, Liliane Bettencourt !

  7. Algayani says:

    On n’est plus tranquille à Morges depuis qu’il y a tous ces wapitis qui sont venus sniffer NOTRE cocaïne.

  8. mlle-cassis says:

    Morges a bien changé, que veux-tu…

  9. Nitt says:

    – Fais gaffe ! Derrière toi, plein de lecteurs morts de rire !
    – Mais non voyons, …
    Quand soudain, l’ordi fut emporté par un groupe de zombies, morts de rire suite à la lecture de cet article haut en rebondissements, et tous débarqués via Gogole, grâce à de fort poétiques recherches comme “fait gafe deriaire blague drole Tokyo Sirkis lol”.

  10. Aurélia says:

    Le mieux serait sans doute que des Roms préparent eux-même la menace terroriste, à base de liquide de lavage de pare-brises bien entendu, la boucle serait bouclée et l’Europe n’aurait plus rien à dire.

  11. vivien says:

    Et attention devant toi, aussi.

  12. hurluberlulu says:

    Magnifique exégèse de la pensée de notre immmmense wapiti présidentiel ! D’ailleurs, je pense qu’il devrait bientôt nous faire le “fais gaffe derrière toi” en triple axel double boucle de mouton piquée, avec vrille des tympans simultanée.

    Ce qui me fait du bien, quand j’y pense, c’est qu’après son mandat, il devrait logiquement venir vivre chez vous. Merci pour tout.