Cinq minutes de défoulage

Tu es entré dans ma vie sans trop prévenir, mais avec fracas.
Alors que je jouissais de quelques jours de vacances bien mérités (ou pas), tu as décidé de combattre ma tendance à l’oisiveté et à la grasse mat’ en venant perceuser les appartements avoisinants. Comme tu es taquin, tu as irrupté sans prévenir avant, ce qui aurait gâché l’effet de surprise.

Puis tu t’es présenté à moi en m’écrivant une lettre dans laquelle tu me demandais de régler mes loyers en retard. J’ai trouvé la démarche sympathique et amusante. J’aurais pu me sentir terrifié par cette lettre, nos relations seraient parties sur un mauvais pied, genre par exemple si j’avais eu du retard dans mes loyers.

Tu as eu le courage de racheter un immeuble moche, mal placé, inascenseurisé, inlouable, peuplé d’un sourd paranoïaque, d’un alcoolo, d’un fumeur de gazon technoïdomane et d’un bordélique chronique. Et tu affirmes, le plus sérieusement du monde que tu vas faire de ce bouge un eldorado. Et tu sembles y croire. Tu es un rêveur. Franchement, je t’admire.

Et tu as décidé de mettre la main à la pâte, mais surtout au mortier. Tous les matins, tu débarque avec ta perceuse pour rénover ton nouveau jouet, pour en faire le palace de tes rêves. Alors forcément, il y a des accrocs, des fois, tu coupes le chauffage en plein hiver. Tu as la décence de ne pas venir nous importuner avec de bêtes excuses. Tu sais que nous nous réjouissons de redécouvrir la vie de nos ancêtres grelottant comme des castagnettes espagnoles quand les ibères sont rudes. (Oui je sais qu’elle est archi connue) Au fond, tu dois être un romantique.

Et puis, tu as des talents d’orateur incroyables. Tu aurais pu faire de la politique, mais non, tu as préféré réaliser tes visions en rachetant un immeuble. Tu as donc, gentiment, griffoné ces quelques mots, délicatement posés sur ma porte pendant mes vacances: “nous avons du procédé à une coupure de courant, veuillez m’aviser s’il y aurait un problème”. Conformément à tes désirs, je t’ai avisé. Et là, tu as passé une demi heure à me dire que c’était bizarre mais que c’était pas ta faute, nous on a pas coupé le courant, hein. Tu as fini par me convaincre, trois appareils qui meurent en même temps, juste au moment où qu’il y a des travaux, les faibles croiraient à la défaillance technique. Mais tu as su m’expliquer que c’était une coïncidence. Je te remercie de m’avoir ainsi ouvert les yeux.

Cher nouveau proprio, je crois vraiment que quelque part tu es un gens bien. Le tout, c’est de trouver où.

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3 Responses to “Cinq minutes de défoulage”

  1. fredoche says:

    un an après, yavait déménagement. Faut croire que sa partie gens bien, elle était introuvable.

  2. Raph says:

    ah mais si ça se trouve, il est sympa avec les petits enfants aveugles!
    enfin aveugles et pas locataires chez lui

  3. tica says:

    ha ha, très cool ton système de remontage de vieux post !