C’était par un de ces jours de début d’automne où la grisaille ambiante incite à la mélancolie et à acheter des tas de trucs peu diététiques pour mettre un peu de gras pour l’hiver. Tout naturellement, je me suis donc rendu en Franche-Comté voisine, paradis de la saucisse, Nirvana du fromage (je sais pas si tu te rends compte, ils font de la Morteau au Comté (quand j’ai découvert ça, j’ai failli devenir croyant)). Je me rendis chez un charcutier traditionnel du lieu, un certain monsieur Leclerc, lequel vendait également, c’est cocasse, des billets de concerts.
Et c’est là que je réalisai que, contrairement à tant d’autres en ce mordoré septembre, Roch Voisine n’était pas mort, même si certaines mauvaises langues prétendront qu’artistiquement parlant, se produire à Montbéliard y ressemble beaucoup.
Roch Voisine qui lui aussi s’était fait connaître en se penchant sur cette période vaporeuse où l’été s’achève avec une chanson qui en dérange certains, mais je n’ai pas peur :
Seul sur le sable les yeux dans l’eau
Ce qui est une position pour le moins inconfortable, surtout à marée montante.
Mon rêve était trop beau
L’été qui s’achève tu partiras
C’est l’histoire d’un amour de vacances, d’une histoire sans lendemain, mais à laquelle on repense les yeux plein de chagrin.
A cent mille lieues de moi
Là je m’excuse, mais il va falloir être un peu technique. Vous n’êtes pas sans savoir que Roch Voisine est québécois. On peut donc déduire qu’il parle de la lieue nord-américaine, soit 4,828032 kilomètres, et non de la lieue postale ou de la lieue marine, ni des bâtonnets de lieu du Cap’tain Igloo.
100 000 lieues équivalent donc à 482 803,2 kilomètres, soit 12 fois le tour de la terre et environ 2800 kilomètres, si vous me permettez d’arrondir, ce qui fait quand même pas mal. Si l’on admet que la plage dont on parle est située au Québec, car oui, il y a des plages au Québec, 2800 kilomètres ça fait soit plein d’endroits qu’on ne connaît pas aux Etats-Unis, soit quelque part à Cuba, nous dit cet outil de calcul de distance (qu’est-ce que tu crois, y a de la recherche, dans mes posts). Alors de là à se demander ce qu’elle peut bien venir foutre à la plage dans un pays qui n’est pas un pays mais l’hiver, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas parce qu’on risque de commencer à s’égarer.
Comment oublier ton sourire
Et tellement de souvenirs
Là, la réponse est assez simple, oublier un souvenir, par définition, on ne peut pas.
Nos jeux dans les vagues près du quai
Car ce n’est pas parce qu’on batifole fougueusement avec une accorte touriste qu’il faut oublier les règles élémentaires de sécurité. C’est un bien bel exemple que nous donne Roch Voisine.
Je n’ai vu le temps passer
Oui, là, je n’ai pas grand chose à ajouter, c’est sûr que s’il s’était ennuyé comme un rat mort, il n’en aurait peut-être pas fait une chanson.
L’amour sur la plage désertée
Là encore, bel exemple de civisme. Si vous aussi, chez vous, vous tenez absolument à faire l’amour sur la plage, attendez que les gens soient partis. Il y a tellement de monde en général qu’on risque de se rouler par mégarde sur le linge de bain d’un voisin. Et, dans ces moments-là, se retrouver nez à nez avec des dauphins qui s’ébrouent devant un coucher de soleil ou des chatons espiègles sous un parasol Ricard peut avoir des conséquences psychologiques irréversibles.
Nos corps brûlés enlacés
Par contre, là, on ne le répète jamais assez, protégez-vous, mettez de la crème solaire, sinon on meurt.
Comment t’aimer si tu t’en vas
Dans ton pays loin là-bas babababa
Skype, msn, voire twitter, mais c’est sûr que ça enlève assez vite le côté roulades sur la plage de la relation.
Hélène things you do make me crazy about you
Comme il est très énervé, limite nervous breakdown, il se met soudain à parler anglais sans crier station. Pour les non-anglophones, il dit Hélène les choses que tu fais me rendent fou de toi, ce qui est joli.
Pourquoi tu pars reste ici j’ai tant besoin d’une amie
Elle part parce que l’été s’achève, tu l’as dit au début de la chanson. En plus, vu la nature de vos jeux de plage, lier une relation d’amitié va s’avérer des plus délicats.
Hélène things you do make me crazy about you
Pourquoi tu pars si loin de moi
Là où le vent te porte loin de mon coeur qui bat
Alors moi je dis ça je dis rien, mais lui, s’il y mettait un peu de bonne volonté, il pourrait se faire engager comme gardien de hockey au CP La Havane et il serait plus si loin d’elle.
Hélène things you do make me crazy about you
Pourquoi tu pars reste ici reste encore juste une nuit
Et là tout s’explique, il veut lui faire rater l’avion juste pour une ou douze galipettes de plus. De là à dire ahlala c’est bien les mecs, il n’y a qu’un pas que je ne me refuse à franchir que par solidarité masculine.
Seul sur le sable les yeux dans l’eau
Mon rêve était trop beau
L’été qui s’achève tu partiras
A cent mille lieues de moi
Comment t’aimer si tu t’en vas
Dans ton pays loin là-bas
Dans ton pays loin là-bas
Dans ton pays loin de moi
Et là, j’aimerais citer le philosophe qui disait “La distance est à l’amour ce que le vent est au feu: Elle éteint le petit. Elle attise le grand.” Le même philosophe qui d’ailleurs disait”Je n’aime que deux choses, la rose pour un jour et toi pour toujours”, voire “J’aimerais être une larme pour naître dans tes yeux et mourir dans un vieux mouchoir sale.”
Nos poètes contemporains sont tellement moins mufles que les Ronsard d’autrefois !
Au moins, il est délicat, Roch. A son Hélène, il a la décence de ne pas lui dire “hé, t’es pas encore trop blette mais ça va venir – bon, on nique ?”
Le CP La Havane ;)
…et alors, “sans crier station”, j’ai envie de dire, lol trop bien lol.
Limite même je te pardonne de te moquer de cette chanson qui berça quelques-unes de mes (jeunes – enfin, pfff quoi) soirées.
(Sébastien Roch non plus n’est pas mort)(je tenais à ce que le monde sache)(maintenant je peux lire)
Ouais mais ou sinon, cent mille lieues de lui, ça peut être genre pas loin de sur la Lune.
Ohlala mais c’est quoi encore cette histoire de vieux mouchoir sale ! Les mecs sont bien tous les même finalement, ils laissent tout trainer dans des mouchoirs.
Quelqu’un aurait-il l’obligeance d’expliquer le titre ?
Merci d’avance.
lol bisous (c’est comme ça qu’on dit ?)
Mais le plus poétique dans tout ça, c’est le mouchoir sale.
Encore un magnifique post, de très belles images (les dauphins et les chatons, grandiose), des références humoristiques à couper le souffle, et un choix de chanson très fin, merci Raph, ça s’applaudit! D’ailleurs, clap, clap!
@ Funambuline : ayant une connaissance approfondie de la culture canadienne, Raph fait référence à un chef-d’½uvre cathodique (dont la traduction française est “Cogne et gagne”, ça ne s’invente pas) dont il est le seul à se rappeler en Europe.
Même à 2h54, on en rit, c’est dire. Fort, en plus.
Roch n’est pas que chez ta voisine qui vend de la magic morteau au comté, maintenant il participe à des festivals (veaux??) de Country !! (http://i138.photobucket.com/albums/q257/efarenc/wordpress%203/RochetJennifer.jpg)
N’en reste pas moins que pour bronzer à plat ventre la tronche dans la flotte pour y baigner ses globes oculaires, il faut être un brin spécial quand même.
Je suis fort déçue par le manque de rigueur de ce blog que j’érigeais jusque-là au rang de modèle universel. Toute l’intensité dramatique du propos de Roch Voisine est compromise par une transcription approximative de son chef-d’oeuvre, dont je vous livre ici et maintenant l’exacte transcription des poignantes dernières secondes : “…dans ton pays loin là-bas (bah-bah-bah-bah).”
Ca change tout.
Attention !
Après avoir sali le mouchoir sale plein de larmes, il ne faut pas oublier de le jeter dans une poubelle à mouchoirs sales plein de larmes, et de se laver les mains à partir du coude !
Ceci était un message du ministère de anxiogénitude.
Merci Chick, effectivement, cette oeuvre cathodique (qui fait très envie) reste inconnue dans ma culture générale. Faut-il que je me rattrape ?
Il existe un Saint-Zotique ? Faut le signaler à Dieu Maurice : il n’en a jamais parlé …
Je croyais qu’il était mort tôt Felix Leclerc !
on m’aurait menti ?
De quelle Hélène s’agit-il ? Celle des garçons ? Elle n’est pas morte, elle aussi ?
@funambuline et chick
-non Raph n’est pas seul, seul à se rappeler de cette série
-non pas la peine pour toi de te visionner les 1498 saisons d’amour goire et beauté à la patinoire
Quand j’ai le cafard, je viens faire un tour ici (j’ai souvent le cafard), certaine de ne jamais être déçue. Et je repars le coeur joyeux !
Bon, on ne peut pas dire que je te connaisse bien, parce que ça ne fait pas bien longtemps que je viens traîner ma souris par ici (grâce à Miss Quoide9 qui ne donne que de bonnes adresses), mais on dirait presque que tu es jaloux… Ca ne t’es jamais arrivé à toi, un bel amour de vacances sur la plage, qui te rend triste, triste à en crever quand vous vous quittez, à tel point que tu crois que plus jamais tu n’Aimeras avec un grand A… Pfff, z’êtes pas romantiques, les hommes ! (ou alors, z’avez pas de mémoire !)
Bon, cela dit, bonne tranche de poilade, je vais réécouter encore la chanson rien que pour me bidonner…
Oui bon mais c’est pas une raison pour mettre les yeux dans l’eau
Pauvre Roch… Quand j’étais petite j’essayais de vraiment me figurer son chagrin au bord de l’eau, et je me posais des questions vraiment premier degré sur les 100 000 lieues par exemple, sur Hélène qu’il veut baiser un dernier coup avant qu’elle parte, ce qui finalement est mufle, non ?
On pourrait aussi citer un autre grand écrivain “qu’importe ton passé ma belle…je t’aime d’un amour fidèle”, mais là ce serait plus la chanson de Roch mais celle de Francis!